ASSEDIC

Plus d’un chômeur sur trois touché

Les demandeurs d’emploi moins indemnisés et moins longtemps

4 septembre 2003

Fin 2002, au moment où l’on espérait tout de même un taux de croissance convenable, où l’on ne parlait pas encore de morosité économique, de guerre en Irak, de déficit colossal, tant du budget de l’État que de la Sécurité sociale, le gouvernement - voulant faire des économies - avait amorcé une refonte du système d’indemnisation des personnes privées d’emploi. En février 2003, le Ministère des Affaires sociales et du Travail passe son décret. Septembre 2003 : c’est la récession. Et une note interne de l’UNEDIC estime que cette réforme touchera un chômeur sur trois. L’inquiétude est grande parmi les personnes privées d’emploi et chez tous ceux qui luttent contre le chômage. Plusieurs organisations « demandent à rencontrer en urgence l’ensemble des syndicats pour débattre de ce problème et pour organiser la riposte ».

À la suite de l’accord de décembre 2002 sur l’assurance chômage, le décret gouvernemental N° 2003-98 du 5 février 2003 - portant dispositions relatives à l’assurance chômage - a été publié au Journal Officiel du 8 février. Il modifie ainsi les durées maximales d’indemnisation du chômage pour les salariés de 50 ans et plus (modification de l’article R. 351-1 du code du travail) :
• 7 mois pour les salariés justifiant d’une activité de 6 mois au cours des 22 derniers mois précédant la fin du contrat de travail ;
• 23 mois pour les salariés justifiant d’une activité de 14 mois au cours des 24 derniers mois précédant la fin du contrat de travail ;
• 36 mois pour les salariés âgés de 50 ans et plus à la fin de leur contrat de travail, justifiant d’une activité de 27 mois au cours des 36 derniers mois précédant la fin du contrat de travail ;
• 42 mois pour les salariés âgés de 57 ans et plus à la fin de leur contrat de travail, justifiant de la condition prévue au paragraphe c du présent article et de 100 trimestres validés par l’assurance vieillesse au sens des articles L. 351-1 à L. 351-5 du code de la sécurité sociale.
Face à cela, la situation, tant en France qu’à La Réunion est dramatique en termes d’emploi. Et bien plus à La Réunion que dans l’hexagone.

Un sur trois

Une note interne de l’UNEDIC chiffre les conséquences de cet accord sur l’assurance chômage de décembre 2002 : entre 614.000 et 860.000 demandeurs d’emploi seraient ainsi virés du système d’indemnisation du chômage par les ASSEDIC d’ici à 2005.
Cette note interne de la direction des études et des statistiques de l’UNEDIC est datée du 28 mai. Elle n’est venue que confirmer ce que tout le monde craignait : un gros tiers des deux millions d’allocataires des ASSEDIC vont être exclus de l’assurance chômage.
À rajouter aux 42% des chômeurs qui ne perçoivent d’ores et déjà aucune allocation. À partir du 1er janvier 2004, l’exclusion frappera de plein fouet.

Horizon 2005
En décembre 2002, les syndicats de salariés et du patronat en France travaillaient sur un plan de retour à l’équilibre de l’assurance chômage, à atteindre en trois ans. Donc à l’horizon 2005.

Ce plan proposait des mesures d’économies immédiates (hausse des cotisations) et des mesures à effet différé (refonte des filières d’indemnisation ou retour à la dégressivité, prôné par le MEDEF).

L’association "AC !" ("Agir contre le chômage") expliquait alors : « la crise actuelle de l’UNEDIC n’est pas financière mais politique : sur les 3,7 milliards d’euros de déficit pour 2002, 3 milliards au moins proviennent des baisses de cotisations sciemment décidées dans le cadre de la convention d’assurance chômage 2001, dont on cherche aujourd’hui à nous imputer le coût ».

Le MEDEF (syndicat patronal) avait alors accepté une hausse modérée des cotisations mais souhaitait une réduction des allocations, chacun ayant été appelé à « faire un effort ». On sait maintenant que l’effort des entreprises a été limité.

Toujours est-il qu’il ne serait pas inutile de rappeler les pistes évoquées :

- Faire économies dans les "dépenses" du régime, autrement dit sur les prestations.

- La suppression d’une clause de la convention UNEDIC signée en 2000 qui prévoyait le rétablissement de la dégressivité des allocations, en cas de difficulté financière du régime.

- Était envisagée la baisse du taux d’indemnisation minimal, qui était alors à 57,4% du salaire brut antérieur.

- Ou un "ajustement" sur les durées d’indemnisation en contrepartie de l’absence de dégressivité des allocations (l’allocation ne serait plus dégressive, mais serait versée moins longtemps).

- Ou une réforme des différentes filières d’indemnisation (les "filières" déterminent les conditions d’accès et la durée de l’indemnisation, en fonction du nombre de mois travaillés antérieurement).

- Ou de réduire les droits des salariés de plus de 55 ans.

Licenciements
Moins d’un an après sa nomination à la tête d’une mission chargée de « limiter l’impact des plans sociaux sur l’emploi », Claude Viet a été remercié par le gouvernement alors que le chômage continue de s’aggraver.

"Monsieur Plans sociaux" explique : « Les plans sociaux, ça concerne 80.000 à 100.000 personnes par an. Mais les licenciements économiques dans leur ensemble, c’est 250.000. Donc ça veut dire qu’il y a énormément de petites entreprises où les salariés n’ont rien du tout et mon souci c’était d’aider toutes ces personnes.

Ce qui est un peu dommage, c’est que quand on avait des taux de croissance supérieurs à 3% on n’ait pas fait en sorte de préparer l’économie française à la mondialisation. Forcément, c’est beaucoup plus difficile dans des phases où on est à une croissance très faible ».

Or, depuis quelque temps, on a pu constater une hausse des licenciements autres que pour motifs économiques (8,4%), confirmant un phénomène récemment pointé par la DARES (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère de l’Emploi) : « le recours accru, depuis 1997, par le patronat aux licenciements pour motifs dits personnels, illustration du développement de nouvelles pratiques de gestion des effectifs », pour reprendre l’expression de "L’Humanité".

Cette réforme du système d’indemnisation du chômage appartient à la même veine politique que tout ce que le gouvernement a fait depuis qu’il est au pouvoir. Tout répond à la doctrine ultra-libérale qu’il affiche.

Les "petits cadeaux" en réponse aux demandes (injonctions ?) du MEDEF se sont succédé : démantèlement de la loi anti-licenciements, remise en cause des 35 heures, exonérations de charges sociales tous azimuts, réforme du SMIC, blocage des cotisations retraite et, plus récemment, remise en cause du système d’indemnisation des salariés victimes de faillite. Sans oublier le projet de jour férié travaillé - gratuitement - pour soi-disant financer les actions en faveur des personnes âgées...

Chômage et croissance
« Dans notre pays, compte tenu de la politique qui est la nôtre en matière d’emploi, des rigidités de notre marché, il faut au moins 1,5% de croissance pour que la France ne détruise pas d’emplois », déclarait en mars dernier le ministre des Affaires sociales, François Fillon. Pour 2004, le gouvernement ne table plus désormais que sur une croissance du PIB comprise entre 1,5% et 1,7%.

Résultat : le taux de chômage au sens du BIT a augmenté à 9,6% en juillet et l’INSEE prévoit un taux de chômage à 9,8% à la fin décembre 2003.

Par ailleurs, selon une étude publiée mi-août par le Ministère des Affaires sociales, la situation de l’emploi inquiète autant les Français que lors de la récession de 1993. Quatre personnes interrogées sur cinq estiment que le chômage va augmenter dans les prochains mois, contre une sur deux il y a un an.

Peut-on les rassurer ? Est-ce l’objectif de Jean-Pierre Raffarin, qui a entamé hier une série d’entrevues avec les dirigeants syndicaux et patronaux ? Non seulement sur l’emploi mais aussi négociations sur la formation professionnelle, sur les retraites complémentaires, sur l’accompagnement des restructurations...

Pour l’heure, Matignon a annoncé l’entrée en vigueur d’un premier volet du Contrat d’insertion dans la vie sociale (CIVIS), le nouveau dispositif destiné à remplacer les emplois-jeunes avec les "contrats jeunes en entreprise".

Demande de rencontre avec les syndicats
Le Collectif de Lutte contre l’Exclusion (C.L.E.) et plusieurs autres associations luttant contre le chômage (G.C.A. - A.D.E.P. - C.C.A.S.J. - A.C. Réunion - A.C.P.E.R. - A.D.M.C.R.) ont publié hier un communiqué concernant la baisse des droits des demandeurs d’emploi.

Les associations de lutte contre le chômage, l’exclusion et la précarité, réunies ce mercredi au siège du C.L.E., « ont décidé d’interpeller les syndicats sur le problème de la diminution voire de la suppression du droits aux ASSEDIC d’une partie importante des demandeurs d’emploi ».

Ces organisations « demandent à rencontrer en urgence l’ensemble des syndicats pour débattre de ce problème et pour organiser la riposte ».


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