Madagascar - Réunion

’Ambassadeur’ d’une région sinistrée

3 août 2006

Abdou Katabi est Franco-malgache, originaire d’Antsiranana (Diego-Suarez), à la pointe Nord de la Grande Ile. Il a été un temps technicien des constructions navales. À la retraite depuis 1993, il s’occupe aujourd’hui à mettre en chantier des projets de développement pour sa région d’origine, Diana (pointe Nord-Ouest de Madagascar).

La région de Diana est, selon ses descriptions, la partie pauvre de la pointe Nord de la Grande Ile, par contraste avec le versant Nord-Est, où se trouve le pays de la vanille, autour de Sambava et Antala. Au Nord-Ouest, d’où il vient,
se trouve Ambilobe, à quelque 130 km au Sud de la capitale du Nord. Abdou Katabi est même ici comme "conseiller spécial" du Maire d’Ambilobe "pour les relations extérieures", fonction qu’il cumule avec celle d’assistant parlementaire du Député de Diego II, Nasser Ahmed.
Son ambition déclarée, en venant ici, est de trouver des Réunionnais avec qui mettre sur pied des actions de co-développement dans les domaines où les besoins sont les plus urgents selon lui : formation (notamment dans les NTIC), santé et actions contre les feux de brousse. "Nous avons besoin de 5 ordinateurs, pour la Préfecture et la Mairie", ajoute-t-il.
La région de Diana, qui comprend l’île de Nosy-Be, en face d’Ambamja, vit principalement du tourisme et des cultures du café, du cacao et de l’ylang-ylang. Mais la vraie richesse de cette zone, autour d’Ambilobe (entre Ambamja et Antsiranana), c’était la canne à sucre. "C’est une région sinistrée depuis la fermeture de la Sosumava", explique Abdou Katabi. La Sosumava était un important complexe sucrier appartenant à la SIRAMA, société d’État, qui regroupait, lorsqu’elle était en activité, une population de près de 10.000 habitants, en grande majorité des immigrés en provenance du Sud de la Grande Ile, mais aussi des Comores, de La Réunion et de Maurice. "C’était la plus grosse usine sucrière de Madagascar, produisant près de 47.000 tonnes de sucre par an, et du rhum. Lorsqu’elle a fermé, elle a mis au chômage entre 2.000 et 3.000 salariés", complète l’émissaire malgache, en évoquant "la gabegie du régime précédent" et quelques exactions attribuées à "l’ancien Directeur de la SIRAMA et l’ancien directeur financier". En fermant, l’usine a cessé de faire fonctionner l’hôpital de la région, qui aujourd’hui manque de tout.
Pour ne rien arranger, l’actuel gouvernement, dans son programme routier, aurait “oublié” le trajet Tana-Diego.
Il trace ainsi le portrait d’une région très sinistrée, que quelques responsables politiques locaux cherchent à remettre sur pied par tous les moyens. Son silence sur l’actuel pouvoir semble indiquer que la région de Diana ne fait pas partie des priorités gouvernementales, au point que les responsables locaux se tournent davantage vers l’extérieur - y compris pour porter des projets qui seraient ensuite soumis au gouvernement malgache.
"Nous avons un gros problème de santé ; nous manquons de matériel paramédical, et il n’y a pas d’ambulance à Ambilobe", poursuit Abdou Katabi, qui décrit aussi un plateau agricole "qui prend feu chaque année". Évidemment, pas d’eau, pas de pompiers.
Il a envisagé un jumelage avec une ville réunionnaise et voudrait impulser dans ce cadre un programme d’actions multiples. Il dit pouvoir mettre gratuitement 2 maisons (de 500 m2 chacune) à la disposition de l’organisme ou de l’association qui voudrait se charger des formations (NTIC, couture) pour les jeunes d’Ambilobe.
Et au passage, il vient prendre contact avec les Malgaches de notre île et relever des cas concrets de non attribution de visas à ses compatriotes, même lorsqu’ils ont hérité comme lui de la nationalité française.

P. David


Brève

Politique foncière : 17.000 hectares de concessions classés "Zones d’Investissement Agricole"
("L’Express de Madagascar" - 21 juillet). "(...) 17.000 hectares de concessions ont été classés en ZIA (Zones d’Investissement Agricole) et constituent des réserves foncières disponibles aux investisseurs. Des vastes étendues de terres agricoles destinées à la location pour les opérateurs étrangers et à la vente pour les locaux. C’est le cas par exemple de 1.900 hectares dans la région d’Antsirabe, attribués à 9 investisseurs malagasy pour l’élevage de 700 vaches de 700 vaches laitières, de même que 1.700 hectares de rizières octroyés à 4 autres opérateurs locaux. Selon certaines indiscrétions, Madagascar serait menacé de surproduction de riz en cette année 2006. D’où l’urgence de la mise en place d’une filière d’exportation. Dans le grenier d’Ambatondrazaka, le groupe Tiko a installé un grand silo destiné au stockage de la récolte en vue de l’exportation de riz de luxe sur les États-Unis et l’Europe. On sait enfin qu’un projet de détaxation des machines agricoles est de nouveau dans les tuyaux. Après les zébus, on est passé progressivement aux motoculteurs, distribués dans plusieurs zones rurales dans le cadre du PSDR (Programme de soutien au développement). Les Malagasy aspirent aujourd’hui à une mécanisation agricole toujours plus efficace et digne des défis à relever".


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