Entre 20% et 30% de participation

Élections générales du 16 mars : victoire des abstentionnistes !

27 mars 2008, par Bernard Yves

Le scrutin du 16 mars, pour la désignation des 147 conseillers régionaux dans la Grande Ile, s’est déroulé dans l’indifférence générale.

Cette indifférence s’explique pour diverses raisons, notamment :

- La méconnaissance de la majorité des électeurs, du rôle et des responsabilités des conseillers généraux,

- Les énormes difficultés rencontrées par la population dans sa lutte quotidienne pour la survie,

- Le boycott décidé par l’ensemble des partis d’opposition.

L’abstention : principal adversaire du pouvoir

Durant les deux semaines de la campagne électorale qui s’est déroulée sans même avoir été marquée par les habituels meetings, les candidats du parti présidentiel TIM n’ont pas développé de programme, se bornant à marteler que le MAP (Madagascar Action Plan) concocté par le Président était le garant du développement du pays.

Ils ont surtout consacré leurs efforts à convaincre les électeurs à venir voter. En effet, la “victoire” des candidats du TIM était assurée puisque dans 81 circonscriptions sur les 114 existantes, le TIM était seul en lice. Face aux résultats des scrutins antérieurs, notamment la défaite du TIM aux élections municipales du 16 décembre dans la capitale, les observateurs prévoyaient un taux d’abstention important le 16 mars.

Le pouvoir, conscient de l’importance de l’enjeu, a alors déployé toutes ses batteries pour atteindre un taux de participation de 50%.

Les autorités de l’Etat, à tous les niveaux (y compris le Président Ravalomanana qui, le jour même du scrutin, exhortait les électeurs à voter), se lancèrent dans la bataille contre l’abstention alternant menaces et promesses.

Chefs de fokontany (quartier), députés, sénateurs, chefs de district et de région se relayant en prévenant les électeurs que les abstentionnistes n’obtiendraient pas leurs documents administratifs auprès des “fokontany”, qu’ils recevraient des ordinateurs, des pompes publiques, des chemins vicinaux réparés, s’ils affichaient un “bon” taux de participation, etc...

Polémiques autour des pourcentages

Pourtant, dès le 17 mars, la plupart des médias privés (presse écrite, radios, télévisions) évaluaient aux environs de 20% le taux de participation dans toutes les régions. Les titres de quotidiens à grand tirage commentant de diverses manières ces résultats ont parlé de « défection généralisée » de « participation famélique ».

Les premiers résultats provisoires rendus publics révélaient que dans les 6 chefs-lieux des (ex) provinces, aucun n’avait atteint le taux de participation de 50% :

Toamasina : 30,83% de participation
Antsiranana : 30,18%
Mahajanga : 27,10%
Antananarivo : 22,4%
Toliary : 21,7%
Fianarantsoa : 19,68%

Les affirmations de Charles Rabemananjara, Premier ministre et Ministre de l’Intérieur, déclarant à la presse le 19 mars (soit 3 jours après le scrutin) que la participation avait atteint 49% n’ont fait qu’attiser la polémique.

D’autant que les dégâts causés par les cyclones Fame et Ivan sont encore visibles : quelques centaines de milliers de sinistrés, des dizaines de milliers de sans-abris, des dizaines de ponts détruits ; sans omettre la distribution défectueuse des nouvelles cartes électorales et les listes électorales toujours aussi fantaisistes.

Le SEFAFI (Observatoire de la vie nationale), entité de la Société Civile connue pour son indépendance et ses analyses pertinentes, n’a pas manqué de réagir, et dès le lendemain 20 mars, devant la presse, s’est dit « étonné » que le chef « de gouvernement ait pu avancer de tels chiffres », alors que tout un chacun avait pu constater de visu la désaffection des électeurs.

Désaveu du pouvoir

Les manipulations des chiffres, les déclarations officielles euphoriques ne peuvent pourtant masquer la réalité : les Malgaches ne font confiance ni aux structures régionales, ni au MAP pour atteindre le développement du pays et obtenir une amélioration de leurs conditions de vie.

Or, le TIM s’entête à poursuivre sur sa lancée et entend assurer sa domination sur le Sénat qui sera élu le 20 avril prochain par l’ensemble des maires et conseilles régionaux élus le 16 mars.

Force est de constater que face à l’abstention massive des électeurs durant les derniers scrutins, le pouvoir devrait oser remettre en cause sa gestion des Affaires nationales et tenir compte de ce désaveu.

Le fera-t-il ?

B.Y.


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