Élections régionales le 16 mars : les partis d’opposition unanimes refusent d’y participer

14 février 2008, par Bernard Yves

Au cours des 15 mois écoulés, les élections se sont succédé à un rythme accéléré dans la Grande île. En 2006 : élections présidentielles, en 2007 referendum constitutionnel, élections législatives, élections communales et municipales, et en Mars 2008 la désignation par les électeurs des conseillers régionaux.
Les 152 conseillers régionaux qui seront élus le 16 mars prochain devront élire à leur tour conjointement avec les Maires et Députés les membres du Sénat. Ces élections à la Chambre Haute auront lieu le 16 avril.

Les élections se suivent et se ressemblent

Tout au long des scrutins qui se sont succédés depuis Décembre 2006 qui a marqué le deuxième mandat du Président Ravalomanana l’environnement politique de ces scrutins, a été marqué par des évènements d’importance :
• l’unanimité qui s’est dégagée au sein de l’opinion publique et de toutes les forces vives du pays (partis politiques, société civile, cheth religieux, syndicats etc..) et par la communauté internationale, autour de la revendication d’un Code Electoral rénové et de l’utilité du bulletin unique
• la pratique par le pouvoir de la désignation des responsables à tous les niveaux des collectivités. A ce propos rappelons que dès 2004 les Chefs des 22 Régions qui aux nient du être élus, ont été désignés, et durant les trois années qui ont suivi 18 d’entre eux ont été limogés. Le même scénario s’est déroulé dans les communes d’importance, telles que Toamasina, Fianarantsoa, Antananarivo ou les Maires ont été remplacés par des Présidents de délégation spéciale. Pas plus tard qu’en Décembre 2007, les chefs de fokontany autrefois élus par la population des quartiers sont à présent désignés par le Préfet de police.
• L’érosion de l’enthousiasme des électeurs qui se détournent ostensiblement de leur devoir citoyen en refusant de se rendre aux urnes. Le summum de ce rejet s’est exprimé lors des élections législatives de septembre 2007, ou le taux d’abstention a atteint les 75 80%.
Il est patent que de plus en plus d’électeurs sont conscients que le pouvoir refuse de leur faire confiance, et les empêche, d’user de leur droit à un vote libre et démocratique, en utilisant tous les moyens dont il dispose : pressions, menaces, fraudes multiples, manipulations des résultats électoraux, chantages etc..
Le scrutin du 12 décembre 2007 que les électeurs pensaient marquer une ouverture vers leur participation directe au développement, a illustré la volonté du pouvoir de verrouiller toute tentative de contestation, et d’imposer la prééminence du parti Présidentiel TIM.
Or, la défaite du TIM dans la capitale lors des élections municipales du 12 décembre dernier a soulevé de larges échos dans la pays, puisque des informations officielles font état de 175 recours en annulations déposés auprès des Tribunaux administratifs des régions, pour cause d’irrégularités, fraudes, manipulations des résultats électoraux. Toutefois cela, n’a pas empêché le Gouvernement, d’officialiser ces élus “contestés” par la remise d’écharpes au cours de manifestations publiques.

Les électeurs seront ils présents au rendez vous ?

Les observateurs unanimes appréhendent ainsi un taux d’abstention élevé, le 16 mars, dernière élection au suffrage direct durant ce deuxième mandat de Marc Ravalomanana.
D’autant que la majorité des électeurs ignore le rôle dévolu aux conseillers régionaux, tout comme elle s’interroge sur le bien fondé des limitations des régions, le nombre des élus etc..
• Des associations de la société civile dont la notoriété et la neutralité sont reconnues au plan national et international, comme le CNOE (Comité national d’observation des élections) et le SEPAFI (observatoire de la vie publique) s’interrogent en effet à ce sujet
• les partis politiques de l’opposition - et même des partis qui disent appartenir à la mouvance présidentielle - ont décidé de ne pas participer A. ce scrutin.
Dans la capitale Antananarivo, le parti Présidentiel TIM sera le seul à présenter des candidats aux régionales et les médias informent que dans 85% des circonscriptions électorales, le TIM sera le seul en lice.
Même si dans ces conditions, la “victoire” du TIM est assurée, les questions soulevées par le SEFAFI dans une déclaration publique datée du 6 février, retiennent l’attention.
Sous le titre “Quelle crédibilité pour nos élections et pour nos élus”, le SEFAFI déclare entre autres :
« En réalité, un pouvoir issu d’élections contestées n’est pas à même d’assurer ses responsabilités. Dans de nombreuses communes, les populations ont manifesté publiquement leur refus de se voir Imposer des dirigeants qu’elles n’ont pas élus. Est il possible seulement que de tels dirigeants aient le front de parler au nom du peuple ? La question ne se pose pas seulement pour les maires et les conseillers municipaux, elle vaut tout autant pour les députés et tous les élus qu’ils le soient au suffrage direct ou indirect.
Il en résulte une situation que Madagascar a souvent connue depuis son indépendance, celle d’un pouvoir qui a certes les formes extérieures de la légalité, mais qui pour la plupart des citoyens est frappé d’illégitimité parce qu’ils ne se reconnaissent pas on plus en lui. Pareille situation paralyse le présent et handicape l’avenir ».

De notre correspondant
B. Y.


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