Encore des morts ! Cinq à Fianarantsoa et Mahajanga

5 mars 2009, par Bernard Yves

La crise est encore loin d’être résolue, et la démission du Président en exercice de la Confédération des Eglises Chrétiennes (FFKM), Mgr Odon Razanakoloona, en tant que négociateur n’a fait qu’ajouter à une situation complexe et inquiétante.

Ce prélat, sollicité par le représentant personnel du Secrétaire général de l’ONU de revenir sur sa démission, a accepté sous réserve des préalables suivants : arrêt des emprisonnements et kidnappings, arrêt de l’usage de la force pour réprimer les manifestants, ouverture des médias publics à tous les acteurs de la crise. Or, les observateurs s’interrogent sur l’attitude du pouvoir qui se prépare à faire usage de la force pour “mater” les manifestations d’où qu’elles viennent.

La contestation gagne toute l’île

À Fianarantsoa, une importante manifestation des partisans du mouvement pour la démocratie de Andry Rajoelina, qui s’est déroulée le dimanche, a été réprimée par les forces de l’ordre, qui ont tiré sur la foule à balles réelles, faisant un mort et trois blessés graves qui sont décédés à l’hôpital de Fianarantsoa.
A Mahajanga, le lundi suivant, une manifestation de l’opposition a été marquée par des échauffourées entre les manifestants et les forces de l’ordre venues pour les disperser : un enfant est mort asphyxié par les gaz lacrymogènes utilisés par les militaires. Ce même lundi, à Ambositra, à l’issue d’une manifestation qui a réuni une foule importante, les partisans de Andry Rajoelina se sont rendus dans les locaux du chef de Région, ce dernier étant absent, ils ont occupé les lieux et cloué les portes pour empêcher le retour des autorités.
Toujours ce même lundi, les forces de l’ordre venues à la cité universitaire d’Ankatso (Antananarivo) pour arrêter le principal animateur sur la Place du 13 Mai, un artiste connu dénommé Sareraka, ont fait irruption au petit matin dans la résidence universitaire en usant de gaz lacrymogène. Les étudiants en colère, soutenus par la population du quartier, ont riposté par des jets de pierres et ont installé des barrages forçant les militaires à se retirer ; en emmenant un étudiant supposé « meneur » du mouvement. Le mardi, les dirigeants de l’association estudiantine représentant les résidents de toutes les régions ont dans une déclaration publique averti le Gouvernement et les forces de l’ordre qu’ils répondraient par tous les moyens à toute tentative de pénétration dans la cité, qu’ils ont érigée en « zone rouge », ils ont donné 24 heures pour la libération de leur collègue arrêté, auquel cas ils prendraient en otage tout militaire passant à proximité.
Par ailleurs, des rumeurs font état de la possible arrestation d’une trentaine de dirigeants politiques, partisans de Andry Rajoelina ; soulignons à ce propos que le samedi 28 février a été mis en place le “Comité national pour la défense de la démocratie”, qui rassemble une trentaine de partis et organisations politiques qui, à l’unanimité, en ont confié la présidence à Andry Rajoelina.

L’enjeu du Sommet de l’Union Africaine

On sait que l’Union Africaine avait décidé de tenir son prochain Sommet en juillet prochain à Antananarivo, et Marc Ravalomanana se faisait fort d’en faire un succès afin de conforter sa politique. Or, de source informée, l’Union Africaine, préoccupée par la crise à Madagascar, aurait donné quinze jours à Marc Ravalomanana pour normaliser la situation dans le pays afin que soit garantie la sécurité des participants au Sommet.
C’est ce qui explique, selon les observateurs, la volonté de Marc Ravalomanana de briser à tout prix le “Comité national pour la défense de la démocratie” en s’attaquant à tous ses dirigeants et en premier Andry RAjoelina. Tous pensent que Marc Ravalomanana utilisera les « grand moyens » pour venir à ses fins. Déjà la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Est a annoncé « qu’elle mettrait au service de Madagascar » une force militaire « afin de ramener le calme » (!), ce qui provoque un profond malaise au sein de l’opinion, et notamment des forces armées, qui se sentent ridiculisées et reléguées au rang « d’utilité », alors que déjà, le capital de sympathie dont elles bénéficiaient au sein de la population s’amenuise au fil des évènements actuels.
Sur la Place du 13 Mai, Andry Rajoelina a lancé ce lundi un appel à tous les opérateurs malgaches à venir rejoindre le mouvement pour la démocratie.

B.Y.


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