Création d’une instance de coordination de 17 organisations anti-coloniales des Antilles, de Guyane, de Corse, de Kanaky et de Polynésie

Front international de libération des dernières colonies françaises : donner une dimension mondiale à la lutte pour la décolonisation

20 juillet, par Manuel Marchal

Le Front international de libération des dernières colonies françaises a été créé le 18 juillet à Bakou, lors du premier Congrès des colonies françaises, 53 ans après la Convention de Morne-Rouge. Le Front international de libération vise à être « une plateforme centralisée contre le colonialisme français ». Les organisations indépendantistes du Groupe d’initiative de Bakou ont choisi de donner une dimension internationale à leur lutte, comme c’est le cas en Kanaky Nouvelle-Calédonie.
Le monde a profondément changé, plus de 50 ans après Morne-Rouge. Il se réorganise autour des BRICS+. Le Congrès des colonies françaises s’inscrit dans cette dynamique qui annonce une nouvelle ère sans hégémonie des dirigeants occidentaux. Il est possible de construire un monde basé sur la coopération et les partenariats gagnant-gagnant dans le Sud global.
La Réunion partage de nombreux points communs avec les pays représentés au premier Congrès des colonies françaises.

Les 17 et 18 juillet derniers s’est tenu à Bakou, capitale de l’Azerbaïdjan, le premier Congrès des colonies françaises. Il était organisé par l’Union populaire pour la libération de la Guadeloupe (UPLG) et le Groupe d’initiative de Bakou.
Le Groupe d’initiative de Bakou comprend les organisations suivantes :
-  Kanaky Nouvelle-Calédonie : FLNKS (Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste) ; MJKF : (Mouvement des Jeunes Kanak en France)
-  Polynésie : Tavini Huiraatira
-  Guyane : MDLS (Mouvement pour la Décolonisation et la Libération Sociale)
-  Martinique : PALIMA (Parti pour la Libération de la Martinique)
-  Guadeloupe : ANG (Alyans Nasyonal Gwadloup) ; CIPPA (Comité d’Initiative de Projets Alternatifs) ; FKNG (Fòs pou konstwi nasyon Gwadloup) ; KSG (Kolèktif pou sove Gwadloup) ; MIR (Mouvement international pour les réparations) ; UPLG (Union Populaire pour la Libération de la Guadeloupe) ; CIPN (Comité International des Peuples Noirs)
-  Corse : Nazione

Pendant deux jours, les débats du Congrès des colonies françaises ont permis d’aborder la lutte anti-coloniale menée dans ces pays. Le thème principal était « l’émergence d’un front international de libération ».
Ce 18 juillet 2024, la conclusion de cette première fut la signature de la Déclaration fondant le « Front international de libération des dernières colonies françaises ». Ce front international permettra aux membres du Groupe d’initiative de Bakou de mieux se coordonner en tant que « une plateforme centralisée contre le colonialisme français ».
La veille, le FLNKS a tenu une conférence de presse où il a notamment demandé le retrait des troupes françaises stationnées en Kanaky Nouvelle-Calédonie, et pris position contre le projet visant à détacher la région de la capitale Nouméa du reste du pays.

53 ans après la Convention de Morne-Rouge

Tous les pays représentés à ce Congrès ont été envahis par les armées françaises et annexés. Officiellement, la Corse n’a pas eu le statut de colonie, même si ce pays était indépendant et avait une Constitution au moment de l’invasion française. Les autres pays avaient le statut de colonie jusqu’en 1946. Ils sont devenus en droit français des départements et territoire d’outre-mer. Les citoyens de ces pays ont la nationalité française, et dans les départements s’appliquent à l’identique les lois votées par le Parlement français.
La fin des années 1960, des organisations de ces pays ont organisé des actions communes pour décoloniser. Ce fut en 1968 la déclaration pour l’Autonomie signée notamment par le Parti communiste réunionnais, puis en 1971 la Convention de Morne-Rouge regroupant 15 organisations venues de Martinique, Guadeloupe, La Réunion et Guyane, dont les partis communistes et les CGT.
La Convention de Morne-Rouge prenait acte de l’échec de « la départementalisation » et appelait à une prise de responsabilité pour résoudre les problèmes de fond : c’était la définition du projet d’Autonomie.

Internationalisation de la lutte contre le colonialisme français

50 ans plus tard, ce sont d’autres organisations qui travaillent ensemble pour faire évoluer le rapport entre Paris et leurs pays. Ils ont décidé de donner une dimension internationale à leur lutte pour faire avancer la revendication d’indépendance.
Cette méthode a fait ses preuves. Elle a permis d’importantes avancées dans la lutte pour le retour à l’indépendance de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Le 24 septembre prochain, ce sera la Déclaration de souveraineté annoncée par l’Union calédonienne.
Le monde a profondément changé, plus de 50 ans après Morne-Rouge. Il se réorganise autour des BRICS+ comprenant le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine, l’Afrique du Sud, l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Iran et l’Éthiopie. L’Afrique travaille à une organisation remettant en cause les frontières issues de la colonisation par l’intégration économique. L’Asie et l’Océanie ont créé le RCEP, la plus importante organisation économique du monde.

La Réunion encore une colonie ?

Le Congrès des colonies françaises s’inscrit dans cette dynamique qui annonce une nouvelle ère sans hégémonie des dirigeants occidentaux. Il est possible de construire un monde basé sur la coopération et les partenariats gagnant-gagnant dans le Sud global.
Il est à noter que La Réunion n’était pas représentée au premier Congrès des colonies françaises. Elle partage pourtant de nombreux points communs avec la Guadeloupe, la Guyane ou la Martinique. Notre île est en effet toujours soumise à une économie de comptoir, au service des intérêts des capitalistes de l’ancienne métropole. C’est le néocolonialisme. Les transferts publics versés sous forme de salaires, d’aides aux entreprises, de prestations sociales, sont transformés en profits privés pour des entreprises principalement françaises. Des sociétés extérieures à La Réunion contrôlent des pans stratégiques de l’économie comme l’énergie, l’eau, le logement social, le BTP et la grande distribution.

M.M.

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Messages

  • L’union fait la force, là aussi, on vit l’histoire, c’est à dire que cet évènement sera plus tard dans les livres d’Histoire après les journaux papiers, ceux en ligne comme "Témoignages", puis évidemment les réseaux sociaux, les radios aussi, comme peut-être aussi le cinéma ? Pour le moment, se sont les journalistes qui en font état, viendront donc plus tard, les historiens, philosophes, enseignants et cinéastes, qui sait ? En attendant, j’ignore si je suis, serais le seul à le signaler : pourquoi l’île de Chagos "colonisée" par les états unis pour la transformer en base militaire, celle de Diégo Garcia, ne figure pas sur la liste ni sur la carte ? N’est-ce pas de fait une colonie ? Prêtée ou bien louée, ou encore vendue, par les anglais ? Avec les autochtones expulsés, rapatriés sur l’île Maurice où celle de la Réunion, ou même au Royaume Uni ? Il y a quand même eu des manifestations, une exposition dans le hall de la Médiathèque François Mitterrand il y a peu. Je ne comprends pas. Est-ce un oubli, une volonté, ou encore autre chose, le manque d’information, de temps pour s’organiser ? En attendant, bon WE zot tout, en ces temps d’incertitude politique, il n’y a qu’à voir la cacophonie, certains parlent de palabres à n’en plus finir..... Arthur qui pédale comme au Tour de France qui s’achèvera demain dimanche. A ce sujet, sur France 2, il faudrait prendre comme modèle celui de la Promenade des anglais où la course s’achèvera. Si on prenait ce modèle pour celui de l’entrée de St Denis, ce serait vraiment top ! Tout le monde serait ravi, touristes compris, une superbe image là aussi. De l’aéroport jusqu’au Barachois. A Nice, c’est quasiment la même distance, environ 7 ou 8 km, c’est de l’aéroport international lui aussi au Port de la ville, à l’autre bout. Une très belle vitrine, animée, vivante. Qu’en pensez-vous, à vérifier donc demain. Arthur.