L’isolement de La Réunion est préoccupant.

9 septembre, par Ary Yée-Chong-Tchi-Kan

L’édition 2024 du Forum sur la Coopération Sino-Africaine (FCSA) vient de se terminer à Beijing. C’est probablement la plus grande initiative diplomatique de l’année. Elle a permis aux différents acteurs de mettre en avant les centres d’intérêts de 2 continents milliardaires en population.

La rencontre a enrichi la réflexion sur « la communauté de destin partagé » et sur le rôle du « sud global dans la nouvelle ère ». Des moyens seront dégagés pour des objectifs concrets. Le pan-africanisme a trouvé un allié solide. Retenons la participation très active de Assimi Goïta parlant du Mali et de l’AES. Peu de choses ont filtré dans les médias réunionnais. Pourtant, dans ce contexte géo-politique, il est facile de noter l’isolement de La Réunion. C’est très préoccupant.

La modernisation.

Voici un extrait du discours de Xi Jinping : « La modernisation est un droit inaliénable de tous les pays du monde. La voie occidentale a infligé de profondes souffrances aux pays en développement. Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les pays du tiers-monde, dont la Chine et les pays africains, ont successivement accédé à l’indépendance et réalisé le développement, et œuvré sans relâche à corriger les injustices historiques dans le processus de modernisation. La République populaire de Chine célébrera cette année son 75e anniversaire. Elle reste déterminée à promouvoir sur tous les plans l’édification d’un grand pays socialiste moderne et le renouveau de la nation par la modernisation à la chinoise. L’Afrique connaît quant à elle un nouvel éveil et avance solidement vers les objectifs de la modernisation fixés par l’Agenda 2063 de l’Union Africaine. Dans notre recherche commune de la modernisation, nous lancerons une vague de modernisation du Sud global et écrirons un nouveau chapitre dans la construction d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité. » Il a ensuite détaillé un plan en 10 points sur 3 années. Personne ne sera laissée sur le bord du chemin du progrès.

Madagascar, Maurice, la Chine.

Tous les Présidents présents ont eu des séances de travail directes, à portée stratégique. La Chine milite pour un développement pacifique. Cité en exemple pour sa participation historique à cet espace de dialogue, Madagascar aura un soutien décisif pour la modernisation de son agriculture rizicole, tant pour ses besoins intérieurs que dans le but de devenir « le grenier à riz de l’Océan Indien ». Le Président XI Jinping a déclaré que les produits malgaches vont entrer sur le marché chinois 100% détaxés. Dans la table ronde qui se tenait en parallèle, les entreprises sont invitées à investir dans l’énergie et les infrastructures. Déjà, le 1er septembre 2021, Maurice a eu le privilège de signer avec la Chine, le premier accord de libre échange avec un pays d’Afrique. Maurice bénéficie d’un abattement des droits de douanes sur 90% de ses productions. Ainsi, de 2021 à 2024, nos 2 plus proches voisins structurent avec la 2e plus grande économie du monde un accord de libre échange global.

Et La Réunion ?

La Réunion a le choix de saisir les opportunités de cette ouverture exceptionnelle ou alors de se complaire à jouer le rôle de supplétif choisi par l’Occident dans sa stratégie militaire indo-pacifique anti-chinoise. Ironie de l’Histoire, La Réunion est exclue de la Commission de l’Océan Indien au profit de la France alors que la Chine en est membre observateur. La Réunion est exclue des Accords de Partenariat Économique que l’Union Européenne discute avec nos voisins. Sommes-nous condamnés à n’être qu’ une enclave européenne dans cet immense espace de dialogue sino-africaine ? Nous tournons le dos à nos voisins situés à 200 km pour Maurice et 600 km pour Madagascar.

Dans une autre logique, issue de la solidarité devant l’inondation dévastatrice, 2 écoles en Chine portent le nom de « Ecole Espoir Ile de La Réunion ». Allons-nous entretenir et élargir cet outil de coopération sino-réunionnaise pour l’avenir des générations d’enfants ou abdiquer par ignorance, manque d’ambition et de courage ? Nous avons un lycée aéronautique à Stella, il est tellement facile de le jumeler avec le lycée AirBus à Tianjin. C’est encore plus beau si ce lycée accueille des enfants boursiers des pays voisins. En 2014, anticipant la COP21 à Paris (2015), Paul Vergès a déposé une proposition de résolution « pour une nouvelle politique énergétique et un co-développement durable et solidaire dans l’Océan Indien ». La COI s’en est félicitée mais la France l’a rejetée. L’avenir aurait été différent si la France avait fait adopter à la COP21 l’initiative de coopération du Réunionnais Paul Vergès. La France aurait pu travailler avec la Chine pour réussir ce projet exemplaire au service de tous les pays voisins.

Ary YEE-CHONG-TCHI-KAN


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?