Alon filozofé ! Billet philosophique de Roger Orlu

« Aux méprisés et aux exclus »

19 janvier 2007, par Roger Orlu

La diffusion d’un chant dénonçant les violences policières et les outrages de certains représentants de “la loi” contre des jeunes Réunionnais a suscité une vive polémique dans les médias. Et même des poursuites judiciaires contre les artistes, auteurs de ce rap, jugé insultant contre la police.

Cette affaire peut nous conduire à nous interroger d’abord sur les raisons d’une telle création artistique. On peut la trouver belle, médiocre ou sans valeur esthétique particulière. On peut la juger violente, excessive ou plutôt juste, pertinente, opportune. Cela relève du goût et de l’opinion de chacune et chacun d’entre nous.
Mais on peut aussi se demander pourquoi des jeunes ont poussé ce cri de colère. A-t-on réfléchi aux causes profondes et multiples de cette protestation ?

Dans les débats suscités à cette occasion, on a également vu et entendu de nombreux Réunionnais poser le problème de l’existence de deux mondes dans notre île et celui des rapports entre ces deux mondes : celui des exclus, “sak na poin ryin”, et les autres, “sak nana” ; celui des victimes d’un système social injuste et le monde des privilégiés.
Comment résoudre les contradictions entre ces deux mondes pour créer une société harmonieuse et solidaire ? La réponse à cette question est de la responsabilité à la fois des décideurs et de chaque citoyen.

Interrogé dans le dernier numéro de “Philosophie Magazine”, Axel Honneth, chef de file de l’école de Francfort, affirme que « sans reconnaissance, l’individu ne peut se penser en sujet de sa propre vie ». Ce défenseur d’une philosophie sociale, dénonce les mécanismes qui dans le capitalisme « empêchent les êtres humains d’accéder à la réalisation de soi ».
Pour Axel Honneth, « à l’heure de la mondialisation, l’évolution prise par le capitalisme s’oriente de fait dans une direction où les conditions du respect de soi risquent d’être considérablement meurtries, que ce soit à travers les tendances à la marchandisation, à la destruction des relations privées ou à travers les exigences de performance qui pèsent sur chacun ». C’est pourquoi, dit-il, « l’une des questions majeures de notre époque est de conférer aux méprisés et aux exclus la force d’articuler leurs expériences dans l’espace démocratique ».


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