’Alon filozofé’ … !*

Billet philosophique

19 juin 2009, par Roger Orlu

Les élections 2009 au Parlement européen ont eu lieu les 6 et 7 juin derniers en France et Outre-mer. À La Réunion comme dans l’ensemble des Départements d’Outre-mer, c’est la liste qui prônait l’union la plus large des citoyens autour d’un projet de développement durable qui a réalisé le meilleur score.
Cette liste est celle de l’Alliance des Outre-mer, qui était conduite par le militant réunionnais Élie Hoarau. Quand on pense aux attaques malhonnêtes lancées par les adversaires des communistes réunionnais contre cette liste, on ne peut que se féliciter de cette victoire car elle illustre le haut niveau de conscience politique du peuple réunionnais et des autres peuples des DOM. Un niveau à élever sans cesse si nous voulons créer les conditions de l’épanouissement de chaque personne et de nos sociétés.
En tout cas, ces peuples des DOM ont prouvé qu’en grande partie, ils sont conscients que s’ils veulent achever la décolonisation de leur pays et mettre en œuvre un autre modèle de développement, ils doivent s’entendre pour créer un rapport de forces favorable à un tel projet.
Voilà pourquoi nous trouvons intéressant de publier dans cette chronique philosophique deux textes de philosophies français que nous a envoyés une amie au sujet de ces élections. Ces textes ont été publiés par "l’Humanité" le jeudi 4 juin dernier, soit à trois jours du scrutin.

Michel Onfray : « Je vois qui propose et réalise l’union »

Le premier de ces textes est un entretien avec Michel Onfray. Ce philosophe, que nous avons eu la chance d’accueillir récemment à La Réunion à l’invitation de l’École des Beaux-Arts du Port, estime que la gauche anticapitaliste se devait de s’unir lors de ces élections. C’est pourquoi il a soutenu le Front de gauche. Voici le texte de cet entretien :

• Pourquoi soutenez-vous le Front de Gauche ?

- Michel Onfray :
Je suis constant dans mon choix : je soutiens la gauche antilibérale, qui est la plus unitaire possible. Certains estiment que j’ai changé d’avis ; or, j’ai toujours défendu celui qui, dans ce courant, œuvre dans ce sens. Cela fait longtemps que je demande qu’on se parle, qu’on s’entende. Il y a de nombreuses personnes qui n’attendent que cette union. Et, avec le Front de Gauche, elle existe.

• À la Présidentielle de 2007, vous aviez voté pour Olivier Besancenot en justifiant que « la Gauche doit être de Gauche ». Pourquoi ne pas renouveler votre soutien aujourd’hui au NPA ?

- Je suis pragmatique. Je vois qui propose et réalise l’union. C’est honorable que Buffet, Mélenchon et Picquet l’aient fait. Besancenot la refuse clairement. De même que Lutte Ouvrière. Il est clair que je ne donne pas ma voix à des candidats qui fractionnent et ne font pas d’efforts pour l’union.
Des différences existent dans la Gauche antilibérale, et tant mieux, mais on devrait tabler sur ce qui nous réunit. D’autant qu’il y a en face Nicolas Sarkozy, qui risque de se maintenir lors du prochain mandat et que, comme seul recours aujourd’hui, il y a Ségolène Royal ou Dominique Strauss-Kahn. Si dans cette configuration la Gauche antilibérale n’est pas capable de comprendre qu’elle tient dans ses mains une carte formidable pour dépasser le Parti socialiste, c’est désespérant.
Il y a une vie après le mégaphone, ce n’est pas suffisant d’être dans la revendication, comme le fait le NPA. Ce qui m’intéresse, dans le PCF, c’est sa capacité de gérer les villes, les villages. Il faut avoir une vraie alternative dans tous les domaines de la vie.

• Vous estimez que le Front de Gauche est un pas vers une construction plus durable ?

- J’aimerais bien que ce soit l’occasion de commencer à cristalliser quelque chose, de ramener les déçus et les perdus vers cette force qui gagnerait à être “trans-partis”. On peut garder son identité de parti (je pense au PCF ou au Parti de gauche), tout en ayant une stratégie d’alliance, et, éventuellement, un programme commun de la gauche antilibérale. Si dimanche prochain le Front de gauche passe devant le NPA, ce sera une bonne leçon.

Régis Debray : « Mac Do et Fouquet’s exclus »

Voici à présent le point de vue du philosophe Régis Debray sur ce scrutin :
« Simple question de goût. Je n’aime pas le champagne ni le rosé, mais le bon coup de rouge, franc du collier. Et même si le verre n’est pas grand, je préfère encore boire dans mon verre — suivant en cela la double recommandation, aristocratiquement plébéienne, d’Alfred de Musset et de Charles de Gaulle.
Je me fie en somme aux bonnes vieilles recettes du terroir, sans chichis. Cuisine populaire qui ne brouille pas l’estomac et évite de se retrouver patraque le lendemain. L’espoir restant de se retrouver bientôt tous ensemble autour de la table, fraternellement — Mac Do et Fouquet’s exclus ».

Si nous "réunionnisons" ces propos de Régis Debray, on imagine tout l’espoir que peut donner le fait de s’unir autour d’une table pour un bon cari et un rougail bien pimenté afin de débattre ensemble comment surmonter tous les pitons sociaux, culturels et politiques de notre île. C’est l’espoir cultivé par l’Alliance.

 Roger Orlu 

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