Convergences à conforter

23 novembre 2007, par Roger Orlu

Mardi et mercredi derniers, le Laboratoire des langues, textes et communication dans les espaces créolophones et francophones (LCF) de l’Université de La Réunion a organisé un colloque à l’Institut d’administration des entreprises (IAE), rue de la Victoire à Saint-Denis. Le thème de ce colloque était : “Paroles d’outremer. Identités linguistiques, expressions littéraires et espaces médiatiques”.
Divers chercheurs des Antilles, de France, de l’Océan Indien et de La Réunion ont contribué avec les autres participants à « montrer qu’un dialogue au cœur des outremers est à renforcer parce qu’il est indispensable » pour relever leurs défis. « De plus, la complexité de ces situations permet (...) de ne pas rester orientés uniquement vers ce que propose l’Europe continentale. L’objectif serait de souligner que la pensée est produite depuis l’espace observé », affirment les organisateurs de ces échanges.

« Un poète fédérateur »

Une communication a particulièrement illustré les perspectives ouvertes par ce colloque : c’est celle qui fut présentée au terme de ces travaux par Daniel-Henri Pageaux, professeur à l’Université de Paris III, sur “L’île-monde d’Alain Lorraine : entre témoignage et imaginaire”. En effet, l’exposé de cet universitaire parisien a mis en lumière en quelques minutes toute la richesse de la vie et de l’œuvre de ce grand Réunionnais, porteur à la fois des trésors de la réunionnité et des aspirations les plus nobles de l’humanité.
Le chercheur a montré combien le journaliste, écrivain et poète Alain Lorraine a su à la fois exprimer l’amour de son île et la portée internationale de son combat contre le colonialisme et le capitalisme. Il a souligné la très forte émotion que suscitent ses écrits par l’évocation des « cicatrices de l’Histoire » et par son plaidoyer « pour un monde généreux, fraternel, partagé ». Tout cela fait de l’auteur de “Tienbo le rein” « un poète fédérateur », conclut Daniel-Henri Pageaux.

« Piquer le fric »

Trois jours avant que ces paroles soient prononcées, un journal local a publié un débat entre un ancien professeur de philosophie, ex-responsable de la Direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, dirigeant du Parti socialiste réunionnais (PSR), René Junker, et Jean-Marc Brébion, ex-dirigeant d’une importante chaîne de grandes surfaces. (1) Le premier dénonce le patronat qui « a basculé dans la logique de l’actionnariat et de la finance » et souhaite que « la puissance publique apporte quelques garde-fous à des acteurs qui ont la religion de l’argent ». Le second proteste également contre le fait que l’on soit « passé de l’ère des entrepreneurs à celle des financiers. (...) L’entreprise est une machine à faire du fric et uniquement ça » ; il déclare par ailleurs : « le capitalisme pur et dur avec une rentabilité de 15% où on tire le maximum de la bête ne correspond pas à un schéma pour La Réunion. (...) Il faut piquer le fric et le remettre dans le circuit ».
Ces convergences - éloge par un universitaire parisien d’un Alain Lorraine longtemps ignoré et “bordé” par les médias et les institutions, dénonciation du système économique inhumain qui domine la planète par d’anciens responsables administratifs et patronaux - font réfléchir. Elles incitent à renforcer le dialogue entre nous pour les rendre efficientes et réellement transformatrices de notre société.

Roger Orlu

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(1) “Le Quotidien” du dimanche 18 novembre 2007.


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