RFO : Débat sur “les enjeux du referendum pour l’Outre-mer”

Dans un climat de malaise et de crise, une Constitution piège

19 mai 2005

Il n’est pas sûr que les éleveurs, les pêcheurs, les producteurs de banane ou de sucre et les citoyens de l’Outre-mer en général aient trouvé dans le débat d’hier sur RFO des réponses de nature à apaiser leurs craintes.

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Le premier trait marquant est l’inquiétude plus ou moins forte, mais générale exprimée par les habitants de l’Outre-mer dans les reportages réalisés par les journalistes des diverses stations : ils craignent surtout pour l’emploi et le partage des aides au développement de leurs régions. Ces gens ont tous exprimé une attente : dans les difficultés qu’ils vivent, en dépit des aides de l’Europe, souvent indispensables à leur activité, que peuvent-ils espérer des dispositions de la Constitution mise aux voix des Français, pour la première fois dans un referendum ?
Pour les partisans du “oui”, la réponse à tout est de dire : ces difficultés que vous vivez, ces craintes que vous avez, tout cela existe déjà. C’est la faute à Maastricht ! C’est la faute à Nice ! Cela n’a rien à voir avec la Constitution !
La baisse des fonds structurels ? La circulaire Bolkestein ? Rien à voir avec la Constitution ! On voit déjà le front des travailleurs se rembrunir : si cela n’a rien à voir, alors pourquoi nous demander de voter ?
C’est alors que Jean-Claude Fruteau et Margie Sudre embouchent les trompettes conventionnelles : cette Constitution multiplie les assurances, les garanties démocratiques et sociales, c’est un bouclier ! Non seulement elle n’attaque pas les services publics mais elle les protège, comme elle protège les droits sociaux, les libertés démocratiques, etc.
C’est une véritable “Constitution-miracle” qu’est venu nous vanter Jean-Claude Fruteau, Margie Sudre tenant quant à elle un discours plus terne, mais sur le même registre, d’où il est ressorti ici ou là quelques perles. Celle-ci, par exemple : "Je n’ai jamais vu poser une question à un referendum pour qu’on réponde “non” !" Cette Constitution est à la fois la meilleure qui soit et forcément renégociable, mais seulement si on vote “oui” !

"La globalisation d’une politique réactionnaire"

Face à deux marchands de rêve, le seul partisan du “non” à opposé "aux beaux discours" la force de la réalité. Donnant rendez-vous à tous tout de suite après le referendum : pour la décision sur le régime sucrier, sur le budget. L’ensemble des choix sont faits, selon lui, pour harmoniser l’Europe avec les règles ultra-libérales de la mondialisation, pour la "globalisation d’une politique réactionnaire". Dire “non” dans un tel contexte, c’est rejeter le tout-marché, redonner à la France son rôle de guide démocratique et aux peuples, l’espoir de forger une alternative.
Une fois de plus, le partisan du “non” a eu deux fois moins de temps que les autres pour s’expliquer, mais la force de son discours tenait dans l’invocation de la réalité des faits, le recadrage dans un monde où l’ultra-libéralisme s’impose partout et où les deux grands partis de l’alternance au pouvoir en Europe, socialistes et PPE, ont amplement démontré qu’ils n’entendaient en rien s’opposer à cet impérialisme mondial. Ils ne cherchent qu’à s’y conformer. Et c’est apparu très clairement dans le débat d’hier.

P. David


Protestation de responsables politiques de l’Outre-mer

Halte au chantage aux crédits et au matraquage médiatique !

Quatre responsables politiques de l’Outre-mer - Christiane Taubira, députée de Guyane, Élie Hoarau, secrétaire général du Parti communiste réunionnais, Axel Urgin, ancien secrétaire national du Parti socialiste, et Stéphane Pocrain, ancien porte-parole des Verts - ont publié hier le communiqué au sujet de la campagne électorale sur le référendum dans nos pays. On lira ce communiqué ci-après.

"Dans le cadre de la campagne du référendum sur le Traité constitutionnel européen qui, outremer, aura lieu les 28 et 29 mai prochains, les Français d’Outremer son confrontés depuis plusieurs semaines à une campagne gouvernementale en faveur du “oui” qui prend la forme de plus en plus affichée d’un chantage inadmissible aux crédits européens et aux autres subventions nationales.
Dans le même temps, et alors qu’outremer plus encore qu’en Métropole, le déséquilibre en faveur du “oui” dans les médias, en particulier ceux du service public, apparaît patent, il semble que la Direction de France Télévision, cédant aux pressions de l’Élysée, envisage de programmer une émission spéciale de France 0 à destination de l’ensemble des collectivités d’Outremer avec comme unique invité le chef de l’État bien-sûr interrogé par des journalistes triés sur le volet (on a appris hier que cette émission était effectivement prévue pour ce vendredi - NDLR).
Ces pressions des pouvoirs publics sur le corps électoral de l’Outremer appellent de la part de tous les républicains, quelle que soit leur position sur le Traité constitutionnel, la plus grande des vigilances pour éviter que notre pays renoue avec des méthodes néo-coloniales qui ont resurgi lors de la récente crise polynésienne et dont ont pendant longtemps été victimes les Français de l’Outre-mer".


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