Asie du Sud

Des avancées dans une région peuplée par plus d’un milliard 300 millions d’habitants

Rencontres entre l’Inde et le Pakistan, deux puissances nucléaires

6 janvier 2004

Le président pakistanais, Pervez Musharraf, a reçu hier à Islamabad le Premier ministre indien, Atal Behari Vajpayee, pour la première rencontre au sommet entre les deux pays depuis juillet 2001 et la première visite du Premier ministre indien au Pakistan depuis le début de son mandat. Une rencontre an marge du sommet de l’Association d’Asie du sud pour la coopération régionale, une organisation qui regroupe six pays peuplés par plus d’un milliard 300 millions d’habitants :
Bangladesh, Bhoutan, Inde, Maldives, Népal, Pakistan et Sri Lanka.

Même qualifiée de « visite de courtoisie » par Islamabad, la rencontre entre le président pakistanais, Pervez Musharraf, et le Premier ministre indien, Atal Behari Vajpayee, en marge d’un sommet des sept pays d’Asie du Sud, marque une nouvelle étape du réchauffement des relations entre les deux pays, tous deux détenteurs de l’arme nucléaire, après deux années de tensions qui les avaient placés au bord d’un conflit militaire au printemps 2002.
Le Premier ministre indien avait déjà eu la veille un entretien privé avec son homologue pakistanais Zafarullah Jamali. L’amélioration des relations avec le Pakistan est « une grosse responsabilité », a affirmé le Premier ministre indien juste avant sa rencontre avec le président pakistanais lors de la pose de la première pierre d’une extension de l’ambassade indienne à Islamabad. « J’ai l’espoir que cette pierre que je pose constituera une fondation solide face aux tempêtes et que ceux qui travailleront ici rempliront leurs responsabilités, parmi lesquelles la grosse responsabilité d’améliorer les relations avec le Pakistan », a affirmé Atal Behari Vajpayee.

Un pas important

De son côté, le président pakistanais a appelé dimanche à mettre fin aux tensions en Asie du Sud à l’occasion d’un dîner offert aux chefs d’État et de gouvernement de l’Association d’Asie du Sud pour la Coopération régionale (Bangladesh, Bhoutan, Inde, Maldives, Népal, Pakistan et Sri Lanka) dont le 12ème sommet s’achève aujourd’hui. « L’Asie du Sud doit faire face à son avenir en affrontant ses problèmes, sans les fuir et sans refuser leur existence », a affirmé le général Musharraf, en ajoutant :« Nous devons laisser derrière nous cet héritage terni de méfiance, aigreur et tension ».
Tendues depuis la création des deux pays en 1947 lors de la partition, les relations entre le Pakistan et l’Inde souffrent essentiellement du problème de la province du Cachemire, divisée entre les deux pays qui en revendiquent la souveraineté.
Pakistan et Inde se sont livré deux guerres pour la Cachemire (en 1948 et 1965), et depuis 1989, une lutte armée engagée contre la présence indienne au Cachemire a fait entre 40.000 et 100.000 morts.
La venue du Premier ministre indien Vajpayee au Pakistan, la première de son mandat, marque à elle seule un tournant dans les relations entre les deux pays, quelques semaines après la conclusion d’un cessez-le-feu total. Si cette décision n’a pas marqué l’arrêt complet des violences sur le terrain, plusieurs attaques terroristes perpétrées par des groupes séparatistes ayant depuis eu lieu, elle a notamment été interprétée par les États-Unis comme une véritable avancée.

Sommet de l’Association d’Asie du sud pour la coopération régionale
Projet d’une zone de libre échange
C’est dans un contexte diplomatique favorable que s’est ouvert dimanche à Islamabad la douzième édition de l’Association d’Asie du sud pour la coopération régionale (SAARC), une organisation créée en 1985 qui regroupe l’Inde, le Pakistan, le Bhoutan, les Maldives, le Sri Lanka, le Népal et le Bangladesh. Ses deux principaux membres, l’Inde et le Pakistan, entretiennent depuis 1947 une querelle territoriale sur la région frontalière du Cachemire qui a entraîné le déclenchement de trois conflits armés au cours des 55 dernières années. Or, ces deux pays multiplient depuis quelques semaines les gestes de bonne volonté et semblent être prêts à engager une discussion constructive. Le Pakistan et l’Inde avaient décidé début décembre de reprendre les vols aériens à compter du 1er janvier, une décision respectée au pied de la lettre puisqu’un avion commercial pakistanais a effectué jeudi un aller-retour entre Lahore et New Delhi. Le trafic aérien avait été suspendu en décembre 2001 après l’attaque du Parlement de New Delhi, attribuée par l’Inde à un commando islamiste venu du Pakistan. Des lignes de bus avaient déjà été rouvertes en juillet 2003, le trafic ferroviaire entre les deux pays devant lui recommencer dans une dizaine de jours.

Le réchauffement des relations entre ces deux pays est de très bon augure pour le déroulement de ce sommet. En proie à de nombreux conflits, l’Asie du sud ne parvient pas à exploiter son potentiel de croissance, une situation qui pénalise durement les quelque 1,3 milliard d’habitants de cette région. Trois thèmes sont à l’ordre du jour de cette douzième édition : le libre-commerce, la pauvreté et le terrorisme. Au terme d’une première réunion de préparation, les ministres des Affaires étrangères des sept pays membres ont convenu vendredi de créer une zone de libre échange régionale, la SAFTA. Une annonce qui est intervenue après plusieurs années de discussion entre les deux principales puissances de l’Association d’Asie du sud pour la coopération régionale et leurs cinq autres partenaires, beaucoup plus faibles économiquement et peu enclins jusque-là à créer une zone de libre-échange. Saluant la perspective d’un accord qui transformerait « la maison de la moitié des pauvres du monde en un puissant bloc commercial », le ministre pakistanais des Affaires étrangères, Khursheed Mehmo Kasurodi, a estimé que cet accord pourrait même être signé lors du sommet.

L’accolade entre Khursheed Mehmo Kasurodi et son homologue indien Yashwant Sinha a été l’image la plus forte de cette première journée de travail. Beaucoup d’observateurs l’ont interprétée comme un signe encourageant pour les discussions qui doivent se dérouler entre les représentants des deux pays au cours des trois journées de ce sommet.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus