Danuta Hübner au contact des réalités de terrain

Des visites tournées vers l’avenir

6 septembre 2005

La commissaire européenne à la politique régionale, Danuta Hübner, a quitté l’île hier soir avec son équipe de conseillers, après une journée de visites qui l’a laissée sans doute harassée mais mieux au fait des réalités de l’île, plus convaincue de leur particularité et apparemment conquise par les efforts, constatés partout, pour transformer nos handicaps en atouts pour l’avenir.

Pour sa dernière journée dans l’île, la commissaire Danuta Hübner a parcouru d’Ouest en Est la moitié nord de l’île, en commençant par un survol en hélicoptère des grands chantiers menés avec le soutien de l’Union européenne (route des Tamarins, transfert des eaux...) et du cirque de Mafate. Une halte en montagne, en compagnie du Préfet et des présidents des deux collectivités territoriales, lui a permis de voir de près les installations solaires et photovoltaïques, ainsi que la réalité d’un enclavement géographique que les populations du cirque s’efforcent de contrer. La modernité, à Mafate, passe par les énergies renouvelables et la population du cirque a pu témoigner des bienfaits qu’elle en tirait.
Au Port ensuite, où la commissaire a été accueillie par le maire, Jean-Yves Langenier, la visite était focalisée sur les activités de création et de production d’images concentrées dans le parc de l’Oasis où, dans une même pièce d’un bâtiment préfabriqué, la commissaire a écouté Alain Séraphine, directeur de l’école des Beaux-Arts, lui présenter les activités de quatre structures différentes : l’institut de l’image de l’océan Indien, le Conservatoire national des Arts et Métiers (CNAM), l’école des Beaux-Arts, la société Pipangaï et une petite société privée qui fera bientôt parler d’elle dans le domaine du multimédia. Ensemble et séparément, elles contribuent à faire de ce parc central de la ville maritime un haut lieu de la création d’images (dessins animés, story board...) et du multimédia, de l’enseignement à distance, d’une formation de haut niveau à la création artistique dans le domaine des nouvelles technologies de l’information, de la communication et de l’image. Alain Séraphine et tous les acteurs de cette “ruche” vouée aux nouvelles technologies ont pu faire toucher du doigt par la commissaire, la réalité d’une conversion préparée au Port depuis une quinzaine d’années : ou comment faire du “handicap de la distance” un atout pour le positionnement de La Réunion dans la compétition mondiale des productions multimédias. Ce défi est relevé au Port avec le concours d’organisme nationaux (le CNAM, l’école Boulle et la chambre de commerce de Paris...) et, de plus en plus, internationaux, comme la commissaire a pu le constater.

Une première

À un jet de pierre de cette mecque de l’informatique et du multimédia, Danuta Hübner a été entraînée par ses hôtes portois - le maire et une partie de son conseil municipal - dans l’opération de RHI (résorption de l’habitat insalubre) du Centre ville. Une façon de lui faire toucher du doigt la complexité de la situation du logement à La Réunion et comment les élus s’efforcent d’optimiser les lignes de crédits dont ils disposent dans l’élimination d’un des problèmes les plus tenaces dans notre société.
La matinée s’est achevée à la préfecture, avec à peine deux heures pour souffler avant de “passer à l’Est”, à Bois-Rouge, où les industriels du sucre mais aussi des organisations de planteurs et les membres de la CPCS (commission paritaire de la canne et du sucre) ont fait visiter l’usine à la commissaire Hübner. La commissaire est originaire d’un pays qui produit à lui seul les 2/3 de la production de sucre de l’Europe de l’Est, à partir de la betterave ; mais elle n’avait encore jamais visité d’usine traitant la canne à sucre. Elle a fait la visite des points clés du processus de transformation : les étapes de la fabrication du sucre, puis la production du rhum et enfin celle d’électricité. À la sortie, une cinquantaine de planteurs de la CGPER - syndicat des petits et moyens planteurs - attendaient la commissaire pour lui dire, avec leur leader Jean-Yves Minatchy, l’inquiétude de la filière devant la réforme de l’OCM-sucre.

La commissaire “à l’écoute”

Danuta Hübner a répondu à leurs inquiétudes en énonçant, comme elle l’avait fait dimanche matin avec les présidents de RUP, les mesures déjà prises par la Commission européenne pour distinguer la situation des RUP. "La Commission reconnait que le secteur du sucre dans les régions ultrapériphériques est en expansion et non en reconversion", avait-elle dit aux présidents des RUP. Elle a tenu le même discours hier devant la CPCS. Sans cacher que la réforme de l’OCM-sucre - inéluctable, selon elle - n’entrait pas dans son champ de compétence, la commissaire européenne s’est voulue encourageante pour la modernisation toujours plus poussée de la filière. Elle a dit comprendre la nécessité de soutenir la filière canne et son passage par Bois-Rouge lui permettra à l’avenir, en tant que commissaire de la politique régionale, de faire percevoir à sa collègue commissaire à l’agriculture, les différences entre régions du point de vue des process sucriers et des perspectives industrielles, sociales et environnementales.
Dans l’ensemble, la journée de visite a semblé très positive à l’ensemble des participants. La commissaire s’est mise “à l’écoute” des réalités sociales et économiques réunionnaises. Elle a semblé apprécier les secteurs d’activités qui lui ont été présentés et le dynamisme mis par les différents acteurs à transformer les handicaps structurels et permanents en atout pour la consolidation de “pôles d’excellence”, capables de situer une île du bout du monde dans la construction d’échanges et de projets tournés vers l’avenir.

P. David


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