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par le Dr Raymond Vergès

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Détresse : plus choquante en blanc ?

Regard de l’Inde sur la pauvreté en Grande-Bretagne

lundi 24 septembre 2012

Le 26 juin 2012, “Témoignages”* s’était fait l’écho d’un rapport scientifique paru dans “The Guardian”, faisant état d’une rapide extension de l’extrême pauvreté au Royaume-Uni. Grande pauvreté dont les enfants étaient les premières et principales victimes.

Vendredi 21 septembre, c’est au tour d’un magazine indien, le bimensuel “Frontline”, de s’étonner, sur le sol du Royaume-Uni, 7ème puissance économique mondiale — dont médias et hommes politiques ne cessent d’encenser la « capacité à surmonter la crise » — de la progression rapide de l’extrême pauvreté.

Au-delà du scandale que constitue le fait de faire lourdement payer aux plus fragiles l’essentiel de la crise causée par les jeux boursiers d’un système économique et politique mondialisé, ce qui, fondamentalement, devrait susciter notre réflexion n’est-il pas ailleurs ?

Pourquoi le monde entier montre une telle capacité à s’émouvoir lorsque la faim touche des enfants occidentaux et pourquoi les Occidentaux font-ils si peu cas de la faim lorsqu’elle tue — quotidiennement — plus de 30.000 enfants dans le reste du monde ? À quoi cette différence de traitement de l’information est-elle due ? Le drame de l’extrême pauvreté serait-il jugé — par nous tous — moins grave à mesure que fonce la couleur de la peau de ses victimes ?

Il faut, hélas, le croire. Et le slogan que l’ONG Save the Children — réputée pour son travail remarquable en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud — a choisi pour sa campagne en faveur des enfants du Royaume-Uni en témoigne involontairement : « It shouldn’t happen here » [cela ne devrait pas arriver ici]. On comprend bien l’idée. Mais le « ici » est lourd d’un sens implicitement accepté de tout l’Occident.
Que ce phénomène survienne “ailleurs”, ben, c’est normal, non ? Chaque fois que la télé nous parle de famine, les images montrées sont celles d’humains vivant ailleurs qu’en Occident. Si bien que, peu à peu, ces images de désespoir écrivent dans nos têtes qu’il est, sinon « normal », du moins « inéluctable », que la couleur du désespoir, ce soit le noir.

 Jean Saint-Marc 

*“Témoignages” 26.06.2012 : « Dans une Angleterre, pays riche, les pauvres toujours plus pauvres et plus nombreux. Et c’est cette politique qu’on nous donne en modèle ! » (http://www.temoignages.re/et-c-est-cette-politique-qu-on-nous-donne-en-modele,56982.html)

Vu d’Inde, les enfants britanniques ont faim

Le journaliste indien Hasan Suroor** s’étonne que les enfants du Royaume-Uni souffrent de plus en plus de la pauvreté, et que le gouvernement ne fasse rien pour y remédier.

Alors que le Royaume-Uni se flatte d’être la septième puissance économique mondiale et d’envoyer des milliards d’euros d’aide à d’autres pays, dont l’Inde, certains s’interrogent : que fait-on pour lutter contre la pauvreté au Royaume-Uni, où un nombre croissant de personnes souffrent de la faim, du chômage et de l’absence de logements ?
Signe de la gravité de la situation après quatre dures années de récession, l’ONG Save the Children lance pour la première fois un appel national pour venir en aide aux pauvres du Royaume-Uni, qui se voient infliger une sorte de double peine avec une récession économique doublée d’un plan de rigueur gouvernemental très controversé.
Dans cette campagne, signée du slogan "It shouldn’t happen here" [cela ne devrait pas arriver ici], l’ONG révèle que le Royaume-Uni abrite près de 3,5 millions d’enfants pauvres, dont 1,6 million vivraient dans une extrême pauvreté.
« Il est inacceptable de voir qu’en 2012, des familles vivant au Royaume-Uni doivent se priver de biens essentiels, notamment alimentaires, ou se retrouver criblées de dettes uniquement pour subvenir à leurs besoins quotidiens », déclare l’organisation humanitaire en soulignant que les enfants les plus pauvres sont les premières victimes de la récession économique.
Le responsable exécutif de Save the Children, Justin Forsyth, indique que la pauvreté a progressé depuis l’élection du gouvernement conservateur qu’il incite à faire davantage pour épargner de nouvelles restrictions budgétaires aux catégories « les plus pauvres et les plus défavorisées ». L’ONG, dont les campagnes mettent plus souvent en scène des enfants africains affamés, a cette fois choisi l’image d’une petite fille blanche en larmes, avec comme bandeau : « Aujourd’hui au Royaume-Uni, 1,6 million d’enfants vivent dans une extrême pauvreté », suivi du slogan : « Cela ne devrait pas arriver ici ».
C’est pourtant bien ce qui arrive. Et la situation ne devrait qu’empirer dans les années à venir. Pendant ce temps, le gouvernement dépense des millions d’euros pour une somptueuse campagne d’affichage visant à redonner sens au qualificatif « grand » de « Grande-Bretagne ».

(Source : Courrier International)

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