Constitution européenne

Dix bonnes raisons de voter “non”

1er avril 2005

Dix bonnes raisons, chacune suffisante, de voter “non” au référendum sur la Constitution européenne. Car si elle était approuvée...

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1 - Signée par les 25 États membres de l’Union européenne, elle ne pourra être modifiée qu’à l’unanimité.
Donc le Luxembourg ou Malte, avec leurs 400.000 habitants chacun, soit un centième de la population européenne, ou le Royaume-Uni dont la population n’est pas franchement pro-européenne, ou certains des dix derniers petits arrivés dont le PNB par habitant sont au dixième de celui du Luxembourg, pourront s’opposer avec les mêmes droits à toute modification de la Constitution !

2 - Les ultra-libéraux auront enfin la garantie que les principes qu’ils défendent sont garantis et qu’on ne pourra plus revenir dessus :
La Constitution américaine est écrite sur moins de 20 pages. La Constitution européenne fait 350 pages, et plus de 850 avec les annexes !
Cela signifie que tous les détails et les lois sont "gravés dans la pierre" et qu’il sera quasiment impossible de les changer, impossible par exemple de changer la politique économique de l’Europe (ou d’un quelconque des sujets soulevés dans cette liste) d’une manière démocratique par une législation débattue au Parlement européen. La Constitution deviendra la base juridique pour les futures législations ainsi que pour la Cour européenne du Luxembourg.

3 - Compte tenu de la réaffirmation de l’indépendance de la BCE (Banque centrale européenne), qui ne peut "solliciter ni accepter des instructions" des États, l’Europe deviendra le seul et unique pays au monde et dans l’Histoire où l’indépendance absolue d’une Banque centrale aura été constitutionnalisée dans un cadre définitif d’une politique prédéterminée que les citoyens ne pourront même plus orienter.
Aucune Constitution dans le monde ne verrouille à ce point le champ de la politique économique et monétaire.
Une véritable Banque centrale devrait au contraire être mise au service du développement et de l’harmonisation. L’emploi devrait être sa priorité, des objectifs de change devraient être fixés de manière coordonnée, une inflation différenciée devrait être tolérée, et la Banque centrale devrait pouvoir financer les politiques structurelles.

4 - Le gouvernement, et donc en définitive chacun des citoyens de nos pays, devra payer un intérêt à un système bancaire privé pour l’usage de sa propre monnaie, qu’il pourrait émettre lui-même, sans intérêt !
C’est hélas déjà le cas depuis le Traité de Maastricht... mais est-ce qu’une erreur doit être, pour autant, constitutionnalisée ?

5 - La Charte des droits fondamentaux, reprise dans la partie II du projet, n’aura pas de valeur contraignante, et sur certains points, elle se situera même en deçà de la législation internationale :
Ainsi le revenu minimum ou le droit au logement ne sont-ils pas reconnus ?

6 - Elle érigera en "objectif de l’Union" (article I-3-2) "un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée" et en disposant dans son article III-148 que "les États membres s’efforcent de procéder à la libéralisation des services au-delà de la mesure qui est obligatoire en vertu de la loi cadre européenne [...]. La Commission adresse aux États membres intéressés des recommandations à cet effet".
La Commission européenne refuse de retirer la directive Bolkestein et va simplement la réformer. Elle objecte déjà que si on veut faire de l’Europe une économie performante et réellement compétitive, les dispositions de la charte ne sont pas négociables.
En rupture totale avec la démarche classique d’harmonisation "par le haut" par l’édiction de règles ou principes, le projet ouvre donc un marché hautement concurrentiel sur le plan social et juridique, au prétexte de simplifier les procédures d’établissement et/ou de prestation de services au sein de l’Union.
Or qui pourrait accepter sans broncher de voir la législation sociale, les conventions collectives ou la protection des consommateurs rabaissées au rang d’avantages commerciaux ?

7 - Le droit de vote et l’éligibilité aux élections municipales ne seront accordés qu’aux citoyens de l’Union...
... alors que la citoyenneté - à ne pas confondre avec la nationalité - devrait être accordée à tous les résidents, sous condition de résidence pendant un certain temps.

8 - La Politique agricole commune restera productiviste...
... alors qu’elle a largement démontré sa capacité de nuisance non seulement sur le plan environnemental, mais aussi en ce qui concerne l’exode rural, le chômage des paysans et l’écrasement des agricultures non européennes.

9 - Des citoyens de l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatif d’États membres, pourront prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de l’Union est nécessaire aux fins de l’application de la Constitution.
Donc, si 1 million de citoyens européens font la demande d’un acte législatif, la Commission européenne pourra y donner suite, dès lors que cette proposition entre dans le cadre de la Constitution. Mais il y a deux verrous :
Premier verrou : la Commission pourra, elle ne doit pas. Si ça ne lui plaît pas, elle ne fait rien. C’est la Commission, et elle seule, qui décide si elle donne suite ou pas !
Deuxième verrou : ça ne pourra se faire que dans le cadre de la Constitution, les principes de la Constitution. Par exemple, pour la taxe Tobin, la Commission dira : "Désolé, il y a un article qui dit qu’on n’a pas le droit d’empêcher la totale liberté de circulation des capitaux, ou bien il faut l’unanimité". Donc votre pétition s’arrête là.
Par contre, si vous voulez plus de libéralisme, il n’y aura pas de problème ! Si on dit par exemple : "On va abolir la durée maximum de travail", il n’y aura aucune difficulté, la Commission donnera suite.

10 - Ce projet de Constitution ne mentionnera pas le droit des femmes à disposer de leur corps et donc du droit à l’avortement.
Oui.


Entre Raffarin et Sarkozy

L’affrontement

Dans son édition datée d’hier, “Libération” fait remarquer que lors de la réunion du groupe UMP de l’Assemblée nationale, Jean-Pierre Raffarin a été applaudi. "Il paraît que cela n’arrive pas si souvent", écrit le journal qui ajoute : "les mauvaises langues rappellent qu’à la précédente réunion du groupe, les mêmes députés avaient applaudi avec encore plus de fougue Nicolas Sarkozy". "En fait de hiérarchie, dans la majorité, c’est plutôt la course à l’échalote qui continue entre le Premier ministre et le président de l’UMP", note “Libération”.
Si les deux hommes ont pris pour habitude de se retrouver régulièrement, "dans les faits, leurs tactiques diffèrent sérieusement". Le journal explique : "pour Raffarin, l’objectif reste de défendre la politique de son gouvernement ; Sarkozy, lui, veut affirmer son leadership sur la base de l’UMP. Du coup, l’attelage tire à hue et à dia. Raffarin entend mener une “campagne d’explication” en alliant les “visites de terrain” à des meetings (...). Objectif : rassurer les inquiets en vantant les effets concrets de l’Europe. À l’inverse, Sarkozy mène une campagne exclusivement tournée vers l’électorat de droite, en plaidant pour le “non” à la Turquie ou en exaltant les vertus du travail".
Si la tactique semble marcher "dans les sondages, le “oui” domine largement chez les sympathisants de l’UMP", il y a cependant un risque : "en droitisant le “oui”, Sarkozy prend le risque de faire fuir ceux-là mêmes que Raffarin tente de retenir : les électeurs de la gauche modérée", analyse “Libération”. Ce dernier conclut ainsi : "il est vrai que les deux hommes n’ont pas le même horizon politique. Et que Chirac n’y peut plus grand-chose".


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