Jean-Claude Fruteau doit la vérité :

Est-il candidat à un mandat ou un demi-mandat ?

1er juin 2004

Pour amadouer les progressistes antillais, l’élu réunionnais s’est engagé, par écrit, à démissionner en 2007, pour aller à la Mairie de Saint-Benoît. Il n’a pas informé les Réunionnais de ses intentions. Il n’a pas non plus précisé si son engagement est conditionnel : démissionnera-t-il avant les municipales ou seulement au cas où il est serait élu ?

On attendait de François Hollande qu’il apporte des clarifications sur les arguments de campagne adoptés par la Fédération socialiste de La Réunion. S’il n’a pas abondé dans le même sens que Fruteau, Vergoz ou Lebreton, le premier secrétaire du PS n’a, malheureusement, pas aidé à lever certaines ambiguïtés.
Lors de sa conférence de presse, il a dit : "Vergès ne voulait pas d’un Réunionnais" comme tête de liste. Sans doute pense-t-il, et les journalistes avec lui, que les Réunionnais ont la mémoire courte. Il est désormais connu que la direction nationale du PS avait, au départ, proposé la constitution d’une liste avec son secrétaire national à l’outre-mer comme tête de liste. Cette proposition qui écartait la candidature de Jean-Claude Fruteau émanait bien de la direction du PS. Elle a été immédiatement soutenue par la majorité des militants socialistes de l’outre-mer et par la majorité des fédérations du PS.
Or, la presse locale a fait état de la démarche d’une délégation de la fédération réunionnaise qui s’est rendue à Paris et qui s’est appuyée sur le jeu des tendances au sein du Parti socialiste pour écarter la proposition de la direction du PS et obtenir que Fruteau soit désigné comme tête de liste. Comment peut-on dire que Vergès ne voulait pas d’une tête de liste réunionnaise alors que la proposition initiale de la direction du PS était celle d’une liste conduite par un secrétaire national du PS et suivi par une Réunionnaise en seconde position. Soit dit en passant, si cette liste avait été maintenue, la deuxième sur la liste aurait été certainement élue.

Ce qui est bon pour les zorèys

On aura noté que le premier secrétaire du PS n’a pas repris à son compte un argument employé par les dirigeants de la fédération : celui de la disponibilité de l’élu au Parlement européen. Sans doute s’est-il rendu compte à la fois de la faiblesse d’un tel artifice mais aussi de sa dangerosité.
Se cantonner à tel argutie revient à reconnaître que l’on est pauvre en argument de fond.
De plus, si l’on regarde de près les listes socialistes en métropole, on y trouve des motifs suffisants pour mettre en pièce l’argument de la fédération.
Robert Navarro, secrétaire de la fédération socialiste de l’Hérault, vice-président du Conseil régional de Languedoc-Roussillon, Kader Arif, secrétaire de la fédération de Haute-Garonne, vice-président de la Région Midi-Pyrénées et Guy Bono, secrétaire de la fédération des Bouches-du-Rhône, vice-président du Conseil régional de PACA, sont tous les trois candidats aux européennes en position éligible. Tous les trois peuvent donc cumuler responsabilité politique, direction d’un exécutif local et poste de parlementaire européen. Eux, mais pas les domiens.
Ce qui est vérité en Métropole ne l’est plus, passé les Tropiques. Car, la polémique ouverte par la fédération socialiste ne concerne pas seulement Paul Vergès. Elle vise aussi deux de ses co-listiers : Madeleine de Grandmaison, vice-présidente du Conseil régional de Martinique et Paul Naprix, vice-président du Conseil régional de Guadeloupe qui sont en deuxième et troisième position. Au nom de leur fonction à la tête d’une collectivité locale, la théorie frutalienne voudrait qu’ils ne peuvent se faire élire à Strasbourg.
Cet argument de circonstance peut se retourner aisément contre son principal auteur.

Un attrape-couillon ?

Pour amadouer les progressistes antillais et obtenir leur soutien, Jean-Claude Fruteau leur a adressé un courrier où il s’engage à abandonner son mandat au Parlement européen en 2007 pour se faire élire à Saint-Benoît. L’élu réunionnais met ainsi en difficulté son premier secrétaire. En effet, François Hollande a expliqué que la candidature de Jean-Claude Fruteau a été retenue, parce que les élus du groupe socialiste européen du Parlement européen déclaraient avoir besoin de lui. Soit-dit en passant, le PS pouvait fort bien répondre à cette demande en proposant la candidature de Fruteau sur une de ses listes métropolitaines. Cela aurait eu pour mérite de conforter l’intéressé dans son ambition de représenter un grand parti métropolitain. La direction du PS a, semble-t-il, été plus sensibilisée par la demande de ses élus au Parlement européen que par celle de ses militants et élus domiens qui eux étaient favorables à une autre candidature. Si ce n’est pas Paris qui a dicté la loi, c’est Strasbourg qui a influencé la réponse de la direction nationale du PS.
Toujours est-il que l’élu réunionnais affirme aux Antillais qu’après 2007, il ne sera plus disponible. A-t-il prévenu le groupe socialiste du Parlement européen qui dit avoir besoin de lui ? En a-t-il soufflé mot à son premier secrétaire ?
Mais, va-t-il au moins informer l’électorat réunionnais et lui apporter les clarifications nécessaires ? Jean-Claude Fruteau a-t-il bien pour ambition de quitter son mandat en 2007 pour aller à la Mairie de Saint-Benoît ? L’honnêteté l’oblige à dire aux Réunionnais qu’il est candidat pour un mandat entier ou pour un demi-mandat. La même honnêteté l’oblige à présenter sa démission avant les élections municipales de mars 2007 et non après, au vu des résultats. Son remplacement au Parlement européen par la candidate antillaise qui la suit en seconde position sur la liste ne peut être conditionnée à son succès aux municipales. Sinon son engagement ne serait, au pire, qu’un attrape-couillon.


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