Giscard dévoile le pot aux roses sur le Traité simplifié

3 novembre 2007

Dans le quotidien anglais “The Independent”, Valéry Giscard d’Estaing avoue qu’il n’y a pas de différence entre le Traité simplifié et le Traité constitutionnel rejeté par les Français en 2005.

« Les outils sont exactement les mêmes. Seul l’ordre a changé », déclare, à la fois sur son blog, dans le journal anglais “The Independent” et dans “Le Monde” du 29 octobre, l’ancien président de la République. Pour Valéry Giscard d’Estaing, qui dirigeait, en 2002 et 2003, le Convention sur le Futur de l’Europe, la différence entre le Traité constitutionnel (TCE) de 2005 et le Traité modifié de 2007 est dans la méthode plus que dans le contenu. Le texte de 2005 avait été débattu publiquement et devait remplacer tous ceux écrits précédemment : « Il s’agissait de simplifier les institutions européennes rendues inefficaces par les derniers élargissements, de mettre davantage de démocratie et de transparence dans l’Union Européenne, et d’ouvrir la voie vers une Constitution pour les citoyens européens ». Pour le Traité de Lisbonne, le processus n’a pas été le même, ce sont les juristes du Conseil qui ont été chargés de rédiger le texte, mais aucune suggestion n’a été faite, ils ont simplement repris les mêmes principes dans un ordre différent.

Les rares changements sont symboliques. L’appellation de “Constitution” a disparu, et les symboles européens, comme le drapeau et l’hymne de l’Europe, ont été supprimés. « Quoique ridicules, et destinées heureusement à rester inappliquées, ces décisions sont moins insignifiantes qu’elles n’y paraissent. Elles visent à écarter toute indication tendant à évoquer la possibilité pour l’Europe de se doter un jour d’une structure politique », précise Giscard. Bref, si l’Europe est bien en train de se doter d’une Constitution, il ne faut pas que cela se voit.
Autre changement par rapport au TCE : les concessions faites aux Anglais. La Charte des Droits Fondamentaux, sorte de version améliorée et actualisée de la Charte des Droits de l’Homme, est retirée du projet, et fera l’objet d’un texte séparé, ce qui permettra à la Grande-Bretagne de ne pas être liée par elle. On ne peut pas vraiment parler d’une avancée...

VGE dit tout haut ce que les rares et courageux lecteurs du Traité (240 pages pas du tout simplifiées) savent, sans un instant se poser la question du respect du suffrage universel. Suffrage qui, en 2005, a rejeté un texte, de son aveu très similaire. Ce déni de démocratie ne semble pas l’atteindre. Sur la possibilité d’un référendum, il reste d’ailleurs très obscur : « La phase suivante sera celle des ratifications. Elle ne devrait pas rencontrer de grandes difficultés - en dehors de la Grande-Bretagne où un référendum aboutirait manifestement à un rejet -, car la complication du texte, et son abandon des grandes ambitions suffisent pour en gommer les aspérités ». Est-ce à dire qu’il faut continuer à ce que les textes européens soient imbuvables pour qu’ils soient acceptés sans débat ? Difficile d’en être sûr, tant la prose giscardienne est alambiquée.

Pauline Delassus,
marianne2.fr


Les Français veulent un référendum

Coup sur coup, deux sondages relèvent que plus de 60% des Français souhaitent être consultés sur le Traité « simplifié ». Cette exigence se retrouve dans les autres pays de l’UE.

L’institut CSA a réalisé un sondage, publié lundi dans les colonnes du “Parisien”, qui indique qu’une large majorité de Français veulent être consultés par référendum sur le nouveau Traité européen, sur lequel se sont mis d’accord les 27 chefs d’État et de gouvernement à Lisbonne, et qui doit officiellement être adopté lors du prochain Conseil européen le 13 décembre prochain. Selon cette enquête, 61% des sondés demandent un référendum. C’est avant tout une exigence de démocratie qui anime les Français puisque, selon ce même sondage, 68% des personnes interrogées auraient l’intention de voter oui à une telle consultation.

Ratification par voie parlementaire

Le principal enseignement que l’on peut tirer est que les citoyens croient Nicolas Sarkozy quand celui-ci affirme que son Traité « simplifié » tiendrait compte des opinions émises par 55% des Français qui ont voté contre le Traité constitutionnel au référendum du 29 mai 2005, mais que cet a priori positif n’entame en rien leur volonté de pouvoir se prononcer eux-mêmes. Bien sûr, l’intention de vote qu’ils manifestent doit être tempérée dans la mesure où ils ne connaissent pas le texte. L’expérience de la campagne référendaire sur la Constitution européenne tend à démontrer que les citoyens s’intéressent au contenu du projet et que cette connaissance devient à un moment donné l’élément déterminant qui conditionne leur choix. Mais Nicolas Sarkozy ne veut pas leur donner l’occasion d’en débattre. Il s’est engagé, a-t-il avoué dans sa conférence de presse tenue en conclusion du Sommet de Lisbonne, auprès des autres dirigeants européens à faire ratifier le Traité par voie parlementaire. Il n’entend pas être « parjure », selon sa propre expression, vis-à-vis de ses partenaires, il préfère piétiner la démocratie en France.
Tous les dirigeants de l’UE ont le même “problème avec leurs concitoyens. Le sondage CSA vient en fait confirmer une autre enquête, réalisée par l’institut Louis Harris pour le “Financial Times”. Selon celle-ci, 63% des Français souhaitent un référendum, et seulement 27% sont d’un avis contraire. Une tendance que l’on retrouve dans d’autres grands pays européens. Les partisans de référendum sur le Traité européen représentent 76% de l’opinion en Allemagne, 75% en Grande-Bretagne, 72% en Italie et 65% en Espagne. En contournant le suffrage universel, les gouvernements contribuent à aggraver la crise de confiance qui plombe la construction européenne. Tant il est vrai qu’il est illusoire de bâtir un projet européen sans la participation des peuples. Parmi les pays cités par le sondage, deux avaient organisé des référendums en 2005 : la France et l’Espagne. Sur le nouveau Traité, outre Sarkozy, le nouveau Premier ministre Gordon Brown refuse lui aussi de consulter les Britanniques (contre 75% de l’opinion publique).

PS et UMP sur la même longueur d’ondes

Comme en 2005, le Parti Socialiste se retrouve sur la même longueur d’ondes que l’UMP. Au micro de France Info, François Hollande a confirmé que son parti n’avait pas l’intention de mener la bataille pour exiger un référendum. Et le Premier secrétaire, qui a été reçu par le président de la République, a précisé que les socialistes « laisseraient passer » le Traité « simplifié ». Ce ralliement risque cependant de raviver les divergences au sein du PS. Laurent Fabius s’est nettement démarqué de cette position, et réclame toujours un référendum. Ce en quoi il est en phase avec l’opinion.


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