Impuissance, indifférence ... et embonpoint

20 juin 2008, par Roger Orlu

Récemment, une société de télévision diffusait un reportage sur une campagne de sensibilisation contre l’obésité et soulignait que l’excès de poids d’une part grandissante de l’humanité, surtout dans les pays riches, est en train de devenir une des principales maladies sur Terre. Les médecins nous disent que l’obésité peut avoir diverses causes (génétiques, sanitaires etc...), mais que la cause la plus fréquente est la surconsommation alimentaire, et notamment les abus d’aliments faisant grossir (sucres, graisses et féculents). Une bâfrerie liée à la richesse. Mais la consommation de tels aliments est aussi souvent provoquée par la pauvreté, qui empêche d’acheter des produits sains.
Or, tout est fait par les producteurs et vendeurs des aliments entraînant l’obésité pour qu’on en consomme toujours plus, parce que cela leur rapporte toujours plus de profits. C’est la même chose pour les bagnoles, qu’on nous pousse à acheter et qui ont les mêmes effets négatifs sur notre santé - par manque d’exercice physique et par les atteintes à l’environnement - comme sur notre porte-monnaie. Comment résister à ces facteurs d’embonpoint ?

Plus récemment, un ami m’envoie un article paru le mois dernier dans un journal britannique, pour qui « l’accumulation sans précédent des richesses par une petite minorité financière dans un contexte de baisse des revenus réels pour la grande majorité de la population mondiale engendre une augmentation du mécontentement et de la colère ». Cet article s’appuie sur un sondage réalisé en Europe, en Asie et aux États-Unis par l’institut Harris et commandité par le “Financial Times” de Londres.
Il ajoute que « deux milliards et demi de personnes - soit 40% de la population mondiale - vivent avec moins de 2 dollars par jour et sont confrontées, de par l’augmentation faramineuse du prix des denrées alimentaires, au spectre imminent de la famine ». Et dans un communiqué publié quelques jours plus tôt, le directeur général de la FAO (organisation onusienne pour l’alimentation et l’agriculture), Jacques Diouf, a dénoncé « la spéculation financière » comme étant la cause majeure de cette catastrophe imminente.
Selon un autre article du “Financial Times”, « il y a 30 ans, les dirigeants des multinationales gagnaient 35 fois plus qu’un employé moyen, maintenant, ils gagnent plus de 350 fois plus ». Résultat : « les 1.100 personnes les plus riches du monde ont presque deux fois plus de biens que l’ensemble des 2,5 milliards de personnes les plus pauvres ».

D’où le coup de colère de Jean Ziegler, pour qui le récent Sommet mondial sur la sécurité alimentaire tenu à Rome du 3 au 5 juin est un « échec total ». L’ancien rapporteur de l’ONU pour le droit à l’alimentation, devenu membre du Comité consultatif du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, affirme que les décisions prises par les chefs d’État lors de ce Sommet risquent « d’aggraver la faim dans le monde, au lieu de la combattre ». « C’est la victoire des grandes entreprises, qui contrôlent environ 80% du commerce agricole dans le monde », ajoute-t-il.
Affirmation confirmée par le réseau d’ONG Eurodad, pour qui les pays du Sud reçoivent chaque année 583 milliards d’aide publique au développement, de transferts financiers et de nouveaux crédits ; mais dans le même temps, ces pays voient repartir vers le Nord 830 milliards d’euros sous forme de rapatriements des profits des sociétés multinationales et d’évasion fiscale.

Quand j’en parle à une amie, elle me dit que devant ce genre d’information, on est pris d’un sentiment d’impuissance. Que faire, en tant que personne, face à de tels phénomènes planétaires ? Du sentiment d’impuissance, on passe rapidement à l’indifférence, à la résignation, à la passivité. Et finalement à l’embonpoint. Une nouvelle victoire pour les tenants du capital. Mais comme nous dit tout le temps notre frère et camarade Élie Hoarau, « on finira par les avoir ! ».

 Roger Orlu 

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