L’appel de Nouméa pour la diversité culturelle : Oui à l’universel, non à l’uniformité

25 août 2006

La rencontre entre Les présidents de la Province Nord de Nouvelle-Calédonie, Paul Néaoutyine, et de la Région Réunion, Paul Vergès, est le prolongement de l’événement historique que fut l’Appel de Nouméa lancé à Nouméa le 18 décembre1999 par Marie-Claude Tjibaou et Paul Vergès. Il y était rappelé la diversité culturelle et l’universalité de chaque culture. Véritable plaidoyer pour l’interculturel.
Pour cette nouvelle rencontre entre un Calédonien et un Réunionnais, nous avons voulu présenter à nouveau cet appel qui n’a rien perdu de son actualité.

La diversité qui fait la richesse de la culture humaine au-delà des frontières et à travers les siècles, est menacée. À l’heure, en effet, de la "mondialisation" du marché et des échanges, l’uniformisation d’une production de masse et des modes de vie, de plus en plus soumise aux contraintes de ce marché, menace les expressions multiples de la créativité humaine. L’ordre économique mondial qui se met en place porte en lui une police de la pensée et de la création.

De tous temps la diversité culturelle a été constamment soumise à la barbarie des pouvoirs conquérants. Des œuvres lentement et mûrement réfléchies ont cessé de faire sens et de faire vivre des peuples : les Amérindiens décimés comme les Tasmaniens disparus, les royaumes africains dissous par la traite, le Codex mexicain détruit au XVI siècle, Samarkand pillé par Gengis Khan au XIllème siècle et tant d’autres cultures et civilisations effacées à jamais. La conquête de territoires dans le passé laisse la place à la conquête des esprits. Sous des formes différentes, le contrôle des marchés dans tous les domaines, secrète aujourd’hui les mêmes maux : la domination du plus fort et la négation des cultures soumises ou dites minoritaires.
Le déplorer ne suffit pas. Le renoncement vaut certes acceptation, mais le repli sur soi ne saurait empêcher le mouvement de “mondialisation”. Par contre, la finalité et la forme des échanges sont à changer radicalement.
À la violence de l’uniformité mortifère, nous opposons la vitalité de la création continue et diversifiée. Nous devons échanger non des marchandises équivalentes mais du sens, dans la différenciation entre soi et l’autre. Si nous consommions tous la même chose nous sombrerions dans la morne répétition et l’abolition même de l’échange.
Nous ne nous résignons pas aux logiques de destruction tant des espèces végétales et animales que des créations mêmes de l’Homme. Car c’est l’humanité qui en est appauvrie.
Prédateur impitoyable de la nature, l’Homme a commis en ce siècle des atteintes à l’environnement d’une ampleur inédite. Il a désormais les moyens de la mettre en péril partout.
En juin 1992, la Conférence de Rio en appelait à la Communauté internationale pour sauvegarder la biodiversité nécessaire à la survie de la planète. Cette prise de conscience constitue une reconnaissance de la responsabilité de l’espèce humaine.
À l’échelle planétaire, une avancée considérable dans l’histoire de l’humanité, un acte réel de civilisation.

C’est pourquoi nous lançons aujourd’hui un appel pour que le pas accompli à Rio soit prolongé par un sursaut collectif identique afin de sauvegarder la diversité culturelle, création continue depuis des millénaires.
La revendication “d’exception cultureIle” et le refus d’un monde uniforme et standardisé manifestent, dans certains pays, la légitime défense du droit à une expression, à une créativité et à un mode de vie propre. Cette exigence doit s’appliquer à tous, partout où existent des foyers de création, aussi réduits soient-ils. Les cultures dites minoritaires, égales aux autres et toujours vivantes, ne doivent pas être oubliées. Leurs peuples proclament le droit de partager avec le monde une expression originale constitutive du patrimoine commun de l’humanité.

Nous lançons donc un appel :

- pour la sauvegarde de la diversité culturelle et contre l’uniformité appauvrissante

- pour la reconnaissance et l’expression des cultures dites minoritaires

- pour que la mondialisation du marché n’étouffe pas la dimension universelle de toute culture humaine

LA CULTURE UNIQUE EST LA MORT DE TOUTE CULTURE
OUI À L’UNIVERSEL, NON A L’UNIFORMITÉ


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