Accueil > International > Monde
La Coalition de la Gauche radicale arbitre du nouveau Parlement grec
Défaite des partisans de l’austérité aux élections législatives
mercredi 9 mai 2012, par
Les élections législatives de dimanche 6 mai en Grèce ont entrainé un bouleversement dans le pays. Les deux partis historiques se sont affrontés, recueillant respectivement moins de 20% aux élections. Les partis de gauche opposés à l’austérité ont recueilli près de 33% des suffrages.
Les deux partis pro-austérité et pro-Européens, le Pasok (socialiste) et la Nouvelle Démocratie (droite), ont recueilli respectivement 13,2% (41 sièges) et 18,8% des suffrages (108 sièges). Les deux partis qui gouvernement depuis fin 2001, ne pourront pas former de gouvernement de coalition sans un troisième parti.
La débâcle des deux partis traditionnels
Le Pasok et la Nouvelle Démocratie réunissaient, tous les deux, 77,4% des voix lors des dernières législatives en 2009, mais aujourd’hui ceux-ci possèdent seulement 149 sièges, soit moins que la majorité absolue au parlement (151 sièges). Ce résultat remet en cause la formation d’un gouvernement de coalition pour poursuivre la politique de rigueur imposée par l’UE et le FMI. Les deux gagnants du scrutin sont connus pour être anti-austérité et contre les mesures imposées par la troïka Union européenne, FMI et Banque centrale européenne. La formation de Gauche radicale, Syriza, devient la deuxième force politique du pays avec 16,5% des voix soit 52 sièges, et le parti néonazi Aube dorée (6,9% soit 21 sièges) fait son entrée au Parlement pour la 1ère fois.
La Gauche anti-austérité oscille entre 29 et 33% des voix, en comptant la progression du parti communiste entre 8% et 9,5% et une percée autour de 6% de la Gauche démocratique qui réunit « des dissidents modérés du Syriza ». A Droite, les partis rejetant la politique de rigueur de l’UE et du FMI, parviennent à remporter entre 16,5 et 18,5% voix, dont près de 7% pour le seul groupe néo-nazi Chryssi Avghi. Selon les derniers chiffres publiés dans les médias, trois petits partis entrent également au parlement, après avoir récolté au-dessus du seuil requis de 3% des votes : le Laos d’extrême-droite, les Verts et la formation de Centre-Droite pro-austérité Alliance démocratique (MVL).
Bouleversement politique en vue
« C’est un séisme politique qui frappe les partis gouvernementaux », a estimé sur la chaîne Mega, Panos Panagiotopoulos, responsable de la Nouvelle Démocratie, parti conservateur à l’annonce des résultats a expliqué l’Agence France Presse. Outre le déclin des partis gouvernementaux, l’inquiétude vient de l’entrée des néo-nazis au Parlement. Lors de l’annonce des résultats, le dirigeant néo-nazi a affirmé que son groupe allait lutter contre les "usuriers mondiaux" et "l’esclavage" imposé selon lui au pays par l’UE et le FMI en échange de leur aide financière. « L’heure de la peur a sonné pour les traîtres à la patrie », a annoncé, le leader du mouvement, appelé "Fuhrer" par la presse grecque. Ex-groupuscule semi-clandestin aux méthodes notoirement violentes et aux thèses racistes et antiparlementaires, Chryssi Avghi a obtenu 19 députés sur 300 au parlement grec, avec 6,9% des voix.
L’instabilité parlementaire devrait s’installer, car la Nouvelle Démocratie de Antonios Samaras est le seul parti avec le Pasok à avoir signé avec l’Union européenne un engagement à poursuivre la politique de rigueur et de réformes, mais son score ne pourrait pas faire pencher la balance. Face aux résultats, Antonios Samaras a proposé la formation « d’un gouvernement de salut national » pour maintenir la Grèce dans l’euro, en s’engageant à « changer la politique du mémorandum » d’austérité. Cependant, la Syriza, est très hostile aux plans européens de sauvetage et à la politique d’austérité et ne souhaite pas pour le moment de coalition.
Céline Tabou
Syriza, le nouveau parti de gauche
La "Coalition de la Gauche radicale", appelée Syriza est une coalition de mouvements politiques de Gauche en Grèce, fondée au début des années 2000. Membre du Parti de la Gauche européenne, la Syriza est né de scissions du Parti Communiste Grec. Nikos Sigalas, chercheur à l’Institut français des études anatoliennes (Ifea), a expliqué à "Rue89" que « dans les années 70, à l’image de ce qui s’est passé en Italie, le parti communiste s’est divisé entre les communistes favorables à l’influence de l’Union soviétique et ceux qui préféraient s’en détacher. Syriza est issu des courants communistes qui souhaitaient devenir indépendants de Moscou : la partie pro-européenne du parti communiste. » Cette coalition a été fondée par le Synaspismos, la Gauche du Renouveau écologique et communiste (AKOA), la Gauche ouvrière internationaliste (DEA), le Mouvement de la Gauche unifiée dans l’action (KEDA, née d’une scission du KKE) et les Citoyens Actifs (une organisation proche de Manolis Glezos). En froid avec le KKE, le Parti Communiste de Grèce, Alexis Tsipras, leader au Parlement, s’est exprimé à plusieurs reprises en faveur d’une coalition de Gauche, progressiste, regroupant toutes les forces anti-mémorandaires (mémorandum : accords européens) a indiqué le quotidien "L’Humanité". |
L’extrême droite en Une des médias
Minimisant la montée en puissance de la Gauche en Grèce, les médias occidentaux ont accès leurs Unes et leurs articles principaux sur l’entrée du groupe néo-nazi Chryssi Avghi au Parlement. A l’instar de la place médiatique réservée à Marine Le Pen, durant l’entre-deux tours de l’élection présidentielle (22 avril et 6 mai), les néo-nazi sont devenus pour les médias grecs et européens, les principaux acteurs de la vie politique du pays, bien que ces derniers ne récoltent que 19 sièges sur 300. Phénomène récurrent, les médias mettent en avant une force politique existante dans l’Histoire mais souvent marginalisée. Aujourd’hui, l’extrême droite est préférée à la Gauche, dont la Syriza fondée par des partis communistes. Occultant l’avancée des communistes dans la société européenne et notamment en France, avec le Front de Gauche, et en Grèce avec la Syriza, les médias jouent le jeu de la droite. |