États-Unis

« La Cour suprême donne un signal clair : les exécutions doivent être suspendues »

6 novembre 2007

La Cour suprême a suspendu, mardi dernier, juste avant l’heure fatidique, l’exécution d’Earl Wesley Berry, condamné à mort pour un meurtre en 1987. Ses avocats ont invoqué les risques d’inconstitutionnalité de la méthode d’injection létale employée. Que signifie cette décision, alors que la plus haute juridiction américaine doit trancher début 2008 sur un recours similaire de deux condamnés à mort dans le Kentucky ?

Réaction de Lisa McCalmont, juriste et consultante à la Death Penalty practice clinic de l’Université de Californie, à Berkeley.

Quelle est la portée de la décision de la Cour suprême ?

Même si la Cour suprême n’a pas posé de moratoire formel sur les exécutions par injection létale, c’est un signal clair que, dans l’attente de la décision qu’elle doit rendre dans un cas similaire au Kentucky (Baez vs Rees) début 2008, les exécutions doivent être suspendues. Cela ne veut pas dire que les états ne continueront pas d’essayer d’exécuter - ils sont libres de le faire -, mais c’est un signal que la Cour arrêtera sans doute ces exécutions tant que sa décision est pendante.

Cela remet-il en cause l’injection létale ?

- Il est important de comprendre que ces deux cas soulevés dernièrement ne portent pas sur la constitutionnalité de la peine de mort par injection létale elle-même. Il n’y a pas débat, légal ou médical, sur cette question. Ce qui est en jeu, ce sont les procédés et les moyens mis en place pour conduire l’injection, en utilisant un cocktail de trois médicaments comme le veut le protocole en vigueur [dans les 37 états pratiquant la peine de mort, ndlr]. Les juges de la Cour s’en tiennent aux critères pouvant prouver une violation du 8e amendement [de la Constitution américaine, qui proscrit les châtiments cruels et inhabituels, ndlr] afin de savoir si les tribunaux des États ont pris des mesures raisonnables pour compenser les risques induits par cette méthode. En tranchant sur cette question, la Cour suprême pourrait ordonner aux États d’utiliser un protocole moins risqué, par exemple en employant un seul médicament. C’est ce qui importe à la Cour suprême : tant qu’elle n’a pas tranché sur l’affaire du Kentucky, les condamnés exécutés le seraient selon des protocoles plus risqués que ceux qui pourraient être appliqués quelques mois plus tard.

Que risque-t-il de se passer dans l’immédiat pour les condamnés à mort ?

- On pourrait voir deux types de réponses de la part des États américains ; certains décideront de ne pas fixer de dates aux exécutions afin de ne pas voir surgir d’autres recours devant la Cour suprême. C’est ce qu’ont déjà fait certains états comme l’Oklahoma, ce qui est une façon rationnelle de procéder dans pareil cas. Mais d’autres états plus prompts à exécuter - traditionnellement, ceux du sud des États-Unis - pourraient maintenir les dates déjà fixées. Et il est alors probable que l’on verra les avocats des condamnés soulever cette objection au recours à l’injection létale.

Propos recueillis par Gilles Bouvaist, à New York
Sources 20minutes.fr


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