Après le massacre de Madrid

La lutte contre le terrorisme en débat

17 mars 2004

Depuis les attentats de jeudi dernier à Madrid, les pays occidentaux ont renforcé les mesures ’sécuritaires’ pour lutter contre le terrorisme. Pourtant, malgré la multiplication des moyens engagés contre les poseurs de bombes depuis plus de deux ans, la menace d’attaques aveugles, massives et meurtrières a rarement été aussi présente. De plus en plus de personnes s’interrogent sur les causes profondes et diverses de cette menace comme sur les moyens les plus efficaces d’y faire face.

Lundi dernier, soit quatre jours après les attentats de Madrid, c’est à dire dans un contexte où l’émotion était loin d’être dissipée, un communiqué de l’ambassade américaine annonçait que notre région de l’océan Indien reste une zone dangereuse. Et si l’on en croit le représentant du gouvernement américain, La Réunion est sous le coup d’une menace terroriste. Il recommande donc aux citoyens américains d’éviter de se rendre dans notre pays.

Cet avis concerne les Comores, Djibouti, l’Erythrée, l’Ethiopie, le Kenya, Madagascar, Maurice, les Seychelles, la Somalie, le Soudan, la Tanzanie et La Réunion. « Les partisans du groupe terroriste Al-Qaïda ou d’autres organisations extrémistes restent actifs dans cette partie du monde », précise l’ambassade des États-Unis à Maurice.

Au même moment, l’Europe cherche à construire une ligne de défense contre le terrorisme. Quant au scrutin qui a sanctionné les conservateurs en Espagne, il a débouché sur la victoire du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), dont les priorités sont le retrait des soldats espagnols d’Irak, mais aussi la lutte contre le terrorisme.

Il apparaît que l’Occident cherche à dresser une ligne défensive pour éviter la répétition d’un carnage. Pourtant, depuis le 11 septembre 2001, les démocraties occidentales ont multiplié les mesures qui visent à lutter contre les poseurs de bombes. Des lois "sécuritaires" sont apparues, et certaines comportent des atteintes aux libertés. Malgré tout cela, la menace d’un attentat imprévisible et meurtrier est encore plus réelle. Et plus de deux ans après le déclenchement de la guerre en Afghanistan pour soi-disant en finir avec "Al-Qaïda", ce dernier "concept" n’a jamais paru aussi puissant que maintenant, malgré les centaines de tonnes de bombes déversées dans les montagnes afghanes, malgré l’invasion de l’Irak et la liquidation du régime de Saddam Hussein. N’oublions pas qu’en France, un groupe appelé AZF soumet le gouvernement à un chantage que l’opinion a rarement connu.

Les citoyens s’interrogent de plus en plus

Mais au moment où certains responsables politiques font de "la lutte contre le terrorisme" la priorité de leur action et restreignent les droits des citoyens à cette fin proclamée, un nombre croissant de personnes s’interrogent sur l’origine de cette violence aveugle, massive et meurtrière. Elles se posent la question : Quelles sont en effet les raisons qui amènent des personnes à constituer des réseaux complexes, organisés au point de commettre des crimes à grande échelle ? Et elles se demandent si les remèdes utilisés sont appropriés à la gravité et à la nature du mal.

D’autres soulignent qu’il existe une forme de "terrorisme" qui touche la majorité des habitants de la planète, qui tue des dizaines de milliers de personnes par jour. Il a pour noms sous-alimentation, misère, insalubrité, maladies non traitées. Et en 2004, chaque jour des milliers d’humains perdent la vie alors que leur mort est parfaitement évitable.

Mais ce terrorisme agit loin de l’Occident. Il amplifié par la loi de l’argent et du profit, par une conception ultra-libérale de la mondialisation des marchés et par un partage inégal des richesses au niveau de la planète.

Ces dernières années, la planète constate l’émergence d’une autre mondialisation, celle de la terreur. Elle peut frapper n’importe où, même au cœur de la première puissance militaire mondiale, et elle entretient la peur. Jeudi, elle a touché l’Europe, et avant-hier, elle a visé encore une fois notre région, car les informations publiées par l’ambassade américaine, qu’elles soient fausses ou avérées, auront de toute façon un retentissement sur l’activité économique.
Manifestement, le débat va se poursuivre pour étudier les liens entre la mondialisation ultra-libérale et la mondialisation du terrorisme…


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