Fonds structurels en peau de chagrin

La Réunion, seule responsable de l’avenir de sa filière canne

9 mars 2005

Paul Vergès, président de la Région Réunion et président de la Conférence des présidents des RUP (Régions ultra-périphériques), se veut réaliste quant à la future répartition des fonds structurels européens. Les deux commissaires européens rencontrés par les présidents des sept Régions ultra-périphériques la semaine dernière à Bruxelles, malgré la qualité de leur écoute offerte à leurs hôtes, ne sont guère plus optimistes. Seul le Conseil européen est à même de trancher sur l’avenir des RUP, mais tout semble déjà décidé.

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Le calendrier est serré, d’ici le 10 juin, la ligne budgétaire européenne pour les années à venir et jusqu’en 2013 sera définie. Les sujets que les RUP (Régions ultra-périphériques) auraient encore à défendre sont aussi nombreux que complexes et mériteraient un examen attentif et particulier, à l’image de la diversité de l’ultra-périphérie européenne.
Bien que les RUP constituent des atouts indéniables pour l’espace économique européen, que leurs handicaps permanents (éloignement, démographie, pauvreté) appellent à des dotations budgétaires particulières, rien ne sert pour le président Vergès, de nourrir de fausses illusions, le statut, l’influence gouvernementale, et les dotations des RUP vont être fragilisées.

Les RUP devront puiser dans leurs fonds

Passer de 15 à 25 États membres, sans augmenter la contribution des pays européens, laisse peut d’espoir d’arriver à un développement équilibré en Europe, avec 10 nouveaux pays, éligibles à l’objectif 1 en raison de leur retard de développement. Les présidents des RUP vont avoir à gérer les sujets délicats de la réforme sucrière, de l’avenir de la banane, de la libre concurrence, de leurs projets de développement, avec des dotations restreintes. L’Europe leur confie l’entière responsabilité de puiser dans leurs fonds (POSEI) pour compenser les problèmes nouveaux liés à son élargissement, de favoriser le développement d’un secteur d’activité plutôt qu’un autre. Il leur appartiendra d’expliquer à leur population leur impossibilité de répondre à la hauteur des ambitions de développement de leurs régions.
L’impact de la réforme de l’organisation du marché du sucre va à lui seul poser de gros problèmes quant à l’avenir de la filière canne à La Réunion, comme dans les Petits États insulaires et en développement. Elle représente localement un risque de catastrophe sociale pour des milliers de planteurs et de salariés, et menace de déstabiliser l’économie de notre pays.

La réforme du sucre : l’exemple marquant

"Cette réforme soulève, dans la quasi-totalité des pays producteurs européens et ACP, une inquiétude justifiée par la rupture fondamentale qu’elle représente avec la politique communautaire développée depuis des années dans ce secteur (...). Pour La Réunion, elle s’inscrit en contradiction avec l’action de l’Union, incitant depuis plus de 40 ans au développement de la filière canne-sucre". C’est en ces termes que le président Vergès faisait partager les inquiétudes des RUP dont La Réunion, sur la réforme sucre dans un courrier adressé le 9 décembre 2004 à la commissaire européenne chargée de la Politique agricole, Mariann Fischer Boel.
Il lui demandait alors l’engagement que des études d’impact, notamment sociales, soient engagées par la Commission, et transmises au Parlement européen avant que celui-ci ne se prononce pour une application de la réforme. Le 27 janvier 2005, Mariann Fischer Boel, envoyait par courrier sa réponse au député européen Paul Vergès. Nous retiendrons de cette lettre ce que nous avancions précédemment, à savoir qu’il appartiendra aux États membres de gérer la compensation financière de cette réforme sur les fonds structurels délégués aux régions. "De manière générale, les fonds actuellement prévus pour les mesures spécifiques, tant dans l’OCM-sucre que dans les programmes POSEI, dont bénéficie le secteur sucrier dans les Régions ultra-périphériques, sont maintenus (...). Les États membres pourraient élaborer des programmes ciblés pour le secteur sucrier dans les Régions ultra-périphériques. Ces programmes seraient financés par l’enveloppe correspondant au soutien direct des producteurs, qui englobe également les dépenses d’aide à l’écoulement, et si les États membres le souhaitent, par des fonds actuellement disponibles au titre des programmes POSEI". Selon Mariann Fischer Boel, ces dispositions suffisent à garantir l’équilibre social et économique des RUP. La réforme sera néanmoins suivie, "dans le cadre d’études et travaux ultérieurs".
Selon le président Vergès, le débat du 10 mars à Strasbourg sur l’OCM-sucre est déjà abouti. Les conditions de libre concurrence imposées par l’Organisation mondiale du commerce, et astucieusement reprises par Franz Fischler, ancien commissaire européen à l’agriculture, dans la réforme de la Politique agricole commune (PAC), ont déjà changé la donne. Malgré les 1 million 970.000 tonnes de cannes livrées aux usiniers en 2004, malgré une richesse de la canne en augmentation, la détermination des agriculteurs réunionnais à maintenir une activité prometteuse pour notre pays, risque de ne pas suffire à convaincre l’Europe du poids culturel, historique, et social de cette culture pour La Réunion.

Estéfany


Errata

José Manuel Durao Barroso, ancien Premier ministre portugais, est président de la Commission européenne et non vice-président du Parlement européen comme annoncé dans notre édition d’hier. Veuillez nous excuser pour cette erreur.

Calendrier européen

- 10 mars : débat sur l’OCM-sucre à Strasbourg ;

- 22 mars : rencontre des chefs des gouvernements européens pour connaître la position des 25 États membres de l’Union sur les dotations budgétaires ;

- 7 juin : José Manuel Durao Barroso étudiera les problématiques des RUP au sein de l’Union élargie ;

- 10 juin : le Conseil européen tranchera sur la répartition du budget européen entre les 25 États membres ;

- Septembre : conférence annuelle des RUP à La Réunion, en présence de la Commissaire européenne à la politique régionale, Danuta Hübner qui a accepté l’invitation du président Vergès ;

- Novembre : exposé des experts de l’ONERC sur les conséquences des changements climatiques sur l’aménagement des littoraux européens, en présence, entre autres, du Commissaire européen à l’environnement, Stavros Dimas qui a accepté l’invitation du président Vergès.


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