Culture

La richesse de la musique comorienne

Concert du groupe Toirabe Tradition

12 août 2003

Samedi dernier, l’Association musicale comorienne de La Réunion, présidée par M. Darkaoui, a présenté à la salle de Chateau-Morange (Saint-Denis) un concert de musique traditionnelle comorienne, la musique Toirabe. Un genre musical qui vient de loin - dans l’espace et le temps - puisqu’il est arrivé aux Comores au fil des siècles depuis l’Égypte en passant par Zanzibar, comme l’expliquait le leader du groupe Toirabe Tradition, Omar Awadi Abdoulbar, vice-président de l’association.
« C’est une longue Histoire », dit-il, en rappelant que la base instrumentale de la musique Toirabe est constituée par des instruments acoustiques (violon, luth) et qu’elle s’est enrichie au fur et à mesure par l’apport de l’accordéon, de percussions, de la guitare et même du synthétiseur. « Notre but est de regénérer l’ancien Toirabe traditionnel », ajoutait l’accordéoniste, entouré de Mohamed Hassan, Boina Bacari, Nassor Soilihi et leurs dalons.
Dès les premières notes, le profane se laisse emporter par le charme des sons, des mélodies et des rythmes. Le président de la mosquée Chaféite du Port, Maoihibou Mohamed, nous explique qu’il s’agit généralement de chants d’amour, - ce qu’il n’est pas nécessaire de traduire pour comprendre -, la beauté et la richesse de la musique faisant le reste.
Les rythmes sont tantôt lents et langoureux, tantôt plus rapides et plus saccadés. « Tous les enfants des Comores sont là sur scène, ceux de la Grande Comore, d’Anjouan, de Mayotte et de Mohéli », souligne Omar Awadi Abdoulbar.
Lorsqu’il entonne "Anziza", une chanson d’amour dont il a composé les paroles et la musique en 1972, le public est littéralement envoûté. Visiblement il apprécie…
Des femmes n’hésitent pas à se lever et à monter sur scène pour entourer le cou des chanteurs d’un châle ou pour glisser un billet d’euros dans la poche de leur chemise sous les applaudissements des spectateurs.
À la fin du concert, le secrétaire général de l’association, Mohamed Soilihi, nous a confié son projet d’organiser un tel concert prochainement au Port. D’ores et déjà la date est fixée : ce sera le samedi 6 septembre. Le lieu sera connu dans quelques jours. En tout cas, c’est un rendez-vous à noter dès à présent et à ne pas manquer !

Exclusion
Systématiquement - et depuis toujours - "Témoignages" souligne et dénonce les différentes formes d’exclusion qui frappent notre société post-esclavagiste et post-coloniale. Les immigrés de l’archipel des Comores sont très souvent la cible de ces mises au ban.

Samedi dernier, une association comorienne organisait à Saint-Denis, dans une salle culturelle connue des Dionysiens, un concert de musique Toirabe, musique traditionnelle de l’archipel des Comores. Pour un public culturellement un peu curieux, cette initiative dépasse largement en intérêt une "élection de miss". Ce concert, certes modeste, mais original, dont l’annonce a été faite par notre journal pendant toute la semaine, a été très largement ignoré des Réunionnais comme des Métropolitains, ces derniers pourtant sensibles, d’habitude, à l’exotisme culturel. Pas un journal, pas une radio, pas une télévision, pour faire sentir au public comorien - presqu’exclusivement comorien donc - qu’il fait partie d’une société composite… et accueillante. Pourquoi cela ?

Et pourquoi le service public ne diffuse-t-il jamais de musique des Comores sur ses ondes ? Pas plus qu’il ne diffuse d’ailleurs de musique chinoise (hors Nouvel An), ou indienne, au autre… allant dans le sens d’une ouverture aux différents apports culturels qui composent La Réunion. Vanter le "métissage" sans jamais donner d’aperçu sur ses composantes, c’est parler "la bouche ouverte" comme dit le créole. Et cela n’aide en rien la société réunionnaise à dépasser ses peurs et ses tabous. Encore une occasion manquée.


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