Pétition lancée par des salariés du service public d’information

’Le “non” censuré dans les médias, ça suffit !’

7 mai 2005

Nous diffusons ci-dessous un appel émanant de journalistes et salariés des médias dénonçant ’le traitement à sens unique de la campagne pour le référendum du 29 mai 2005’. Lancée par plus de 110 personnes qui travaillent essentiellement dans le service public à France Télévisions, RFO, Radio France ou l’INA, la pétition avait recueilli hier près de 2.000 signatures. (1)

(page 5)

Citoyens et personnels des chaînes de service public participons, chacun à notre niveau, à l’information télévisée ou radio. À ce titre, nous ne pouvons plus ignorer le déroulement et le traitement à sens unique de la campagne pour le référendum du 29 mai 2005 sur nos antennes.
Au sein de nos entreprises de Service Public autant que sur les chaînes privées, manque d’objectivité et matraquage pour le “oui”, sous prétexte de pédagogie, soulèvent de plus en plus d’indignation et contribuent à discréditer les métiers d’information que nous servons.

Nous exigeons, donc, une information équilibrée. Le “non” doit dès aujourd’hui trouver toute sa place dans les médias. L’émission “Arrêt sur images” de France 5 du 10 avril 2005 indiquait, entre autres, que toutes chaînes confondues, le nombre d’intervenants à la télévision sur le Traité constitutionnel européen entre le 1er janvier et le 31 mars 2005 était :

- pour les favorables au “non” : 29%

- pour les favorables au “oui” : 71%

Nous dénonçons la dérive à laquelle nous avons assisté, impuissants, avec l’émission télévisée du président de la République sur TF1 qui durant deux heures a pu défendre le “oui” sans même que son temps de parole ne soit pris en compte. L’absence de pluralisme, la mise en avant d’animateurs producteurs en lieu et place des journalistes, la dérive de l’info-spectacle contribuent à la “désinformation”, mettent en danger l’avenir de nos métiers, et aggravent le discrédit sur le journalisme.

Nous dénonçons tout autant la connivence honteuse entre le chroniqueur Alain Duhamel et Lionel Jospin, le premier servant de faire-valoir au second dans le seul but d’appeler au vote “oui”.

Habituellement, le CSA intervient pour maintenir un équilibre dans les campagnes. Aujourd’hui, face à son silence, nous constatons les positions publiquement exprimées, ou sous entendues comme une évidence, par nombre de chroniqueurs, correspondants, présentateurs, ou patrons de presse qui, dans l’exercice de la profession, outrepassent leur fonction en prenant position pour le “oui”.

Quant aux émissions de débat, leur déséquilibre en faveur du “oui” confine à la propagande.
Jusque-là dans nos métiers, et en particulier dans le service public, il était de coutume de vouloir taire des convictions personnelles et de s’imposer un devoir d’impartialité.

Personnels de télévision, nous n’en sommes pas moins nous aussi citoyens. À ce titre, nous tenons à affirmer que nous ne nous reconnaissons pas dans ce soutien apparemment unanime des médias à la Constitution. Nous constatons en effet que le texte qu’on nous propose de voter ne garantit pas le droit à l’information :

- La banque centrale européenne n’est pas tenue de rendre publiques ses décisions (art III 190)

- Le conseil européen n’est pas tenu de rendre publiques les recommandations qu’il formule à un état en situation de déficit excessif (art III 184)

- Le conseil européen n’est pas tenu de rendre publics les projets de sanctions qu’il formule à l’égard d’un état dont la politique économique ne serait pas conforme aux grandes orientations de la politique économique de l’union (art III 179)

"En matière de politique étrangère et de sécurité" en cas de crise, aucune garantie d’accès à l’information n’est inscrite pour les journalistes.

- Les risques d’harmonisation sociale par le bas menacent directement les statuts des personnels de télévision et des entreprises de presse, conventions collectives, clauses de consciences par exemple...

- Droits des pigistes, droits d’auteur, fiscalité, aides à la presse... risquent bien de ne pas résister au sacro-saint principe de la "concurrence libre et non faussée" (art I-3-2).

- Mise à mal de la notion même de Service Public et de son financement...

Aujourd’hui, il nous semble impossible de taire nos convictions et notre attachement à la démocratie et au traitement honnête complet et pluraliste de l’information.

(1) Signature du texte : “Le non censuré dans les médias, ça suffit !”
Sur Internet, centralisation des signatures à l’adresse suivante : http://www.appel-info-impartiale.ras.eu.org/petitions/


Un député socialiste dénonce l’attitude partisane de France Télévisions

Dans son édition d’hier, “Le Monde.fr” signale que dans le même esprit que les signataires de la pétition ci-dessus, plusieurs députés ont adressé leurs critiques au CSA.
“Le Monde.fr” signale l’initiative du député socialiste Didier Mathus qui a dénoncé la partialité de l’émission "France Europe Express". Diffusée sur France 3 le 26 avril et animée par Christine Ockrent, au cours de laquelle Henri Emmanuelli, député PS partisan du non, a été, selon lui, "interrompu, harcelé, déstabilisé". "Il y a une sorte d’engagement des télévisions et radios publiques pour le oui qui crée un malaise. Il n’y a pas un journal qui ne soit pas pour le “oui”" , affirme le député socialiste Didier Mathus.


Réactions, prises de position...

o Dix raisons de voter “non” (suite)

5 - la Charte des droits fondamentaux, reprise dans la partie II du projet, n’aura pas de valeur contraignante et sur certains points, elle se situera même en deçà de la législation internationale : ainsi le revenu minimum ou le droit au logement ne sont-ils pas reconnus, alors qu’ils le sont dans la Déclaration universelle de 1948.

6 - elle érigera en "objectif de l’Union" (article I-3-2) "un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée" et en disposant dans son article III-148 que "les États-membres s’efforcent de procéder à la libéralisation des services au-delà de la mesure qui est obligatoire en vertu de la loi cadre européenne .... La Commission adresse aux États-membres intéressés des recommandations à cet effet" .

La Commission européenne refuse de retirer la directive Bolkestein et objecte déjà que si on veut faire de l’Europe une économie performante et réellement compétitive, les dispositions de la charte ne sont pas négociables.
Ce projet de directive concerne l’ensemble des services dont la fourniture implique une contrepartie financière, à quelque niveau que ce soit, indépendamment des missions d’intérêt général qui peuvent être les leurs, sans adoption préalable d’une directive cadre sur les services publics ou d’intérêt général. Considérés comme des entraves au développement du marché intérieur, les agréments exigés par les États sont réputés illégaux. Les procédures de contrôle échappent aux États sur le territoire desquels le service est fourni et relèvent du pays dans lequel le prestataire est établi : c’est le principe dit du "pays d’origine".

En rupture totale avec la démarche classique d’harmonisation "par le haut" par l’édiction de règles ou principes, le projet ouvre donc un marché hautement concurrentiel sur le plan social et juridique, au prétexte de simplifier les procédures d’établissement et/ou de prestation de services au sein de l’Union. Or qui pourrait accepter sans broncher de voir la législation sociale, les conventions collectives ou la protection des consommateurs rabaissées au rang d’avantages commerciaux ?

7 - le droit de vote et l’éligibilité aux élections municipales ne seront accordés qu’aux citoyens de l’Union, alors que la citoyenneté - à ne pas confondre avec la nationalité - devrait être accordée à tous les résidents, sous condition de résidence pendant un certain temps.

(à suivre...)

A-J Holbecq


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