Famine au Niger : un dossier paru dans “l’Humanité” - 2 -

Le système D comme mode de survie

30 juillet 2005

Suite du dossier de “l’Humanité” consacré au Niger. Aujourd’hui, le quotidien d’un village frappé par la famine. Faute d’aide, les paysans de la région de Tahoua ont développé mille et une stratégies de survie, comme le montre cet article paru mercredi et reproduit ici avec des intertitres de “Témoignages”. Demain, nous visiterons en compagnie de l’envoyée spéciale de “l’Humanité” un centre de Médecins sans frontières.

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"Chaque jour on doit chercher ce qu’on va manger parce qu’on n’a pas de réserves". Un gamin dans les bras, une petite accrochée aux jambes, une jeune femme en large chemise marron bordée de dessins blancs est plantée devant la hutte en paille et banco qui constitue l’habitat traditionnel.
Dans ce hameau de Saouna, commune de Tabalak, à une quinzaine de kilomètres au Nord de Tahoua, cela fait au moins trois ans que les cultures n’ont pas donné assez pour tenir toute l’année. "De toute façon, ici, on mange rarement plus d’une fois par jour", se lamente de son côté l’adjoint du chef de village.
La tête enveloppée dans un cheich beige usé, la barbe blanche éparse, il cultive la terre avec quelques hommes du village. Sous un soleil de plomb, ils bêchent, courbés en deux, une terre sableuse qui se craquelle et résiste. "Demain, si on ne trouve pas à manger, on n’ira pas aux champs parce qu’on sera trop faible", renchérit un paysan assis sur la lame de sa bêche.

La situation est pire que jamais

Après des années de vaches maigres, tous s’accordent à dire que la situation est pire que jamais. Juste avant la dernière récolte, les criquets se sont chargés ici d’avaler le peu qui avait été produit. Les greniers à mil sont vides depuis des mois. "Si la saison est bonne, on peut tenir sept mois sans acheter de mil, mais cette année on a dû commencer à acheter dès octobre", explique une femme du centre-ville de Tabalak, qui n’a pas trop de difficulté à compenser le manque grâce à son commerce de condiments.
Pas question ici non plus de vendre quoi que ce soit, les récoltes sont insuffisantes. Dans le village d’Akokou, Ibrahim, jeune homme d’une vingtaine d’années, cultive avec sa sœur le champ familial. "Le champ donne de quoi manger, pas de quoi vendre", explique-t-il. D’ailleurs, les commerçants ont renoncé à s’approvisionner dans la région. "Ce qu’ils vendent, ça vient de Maradi ou du Nigeria", assure le vieux chef.

Trésors d’inventivité

Faute de vivres, il faut déployer des trésors d’inventivité. D’autant qu’ici, les commerçants ne font pas d’avances, tant ils craignent de ne pas être remboursés. "Pour trouver de quoi préparer à manger, ceux qui ont un enfant valide l’envoient travailler sur les champs des autres contre de l’argent", explique la jeune femme. La journée de travail rapporte 1.000 francs CFA. "Parfois, c’est le mari qui y va pendant que sa femme cultive son propre champ".
Le groupe de cultivateurs a été la veille louer ses bras au marché hebdomadaire de Tabalak. Même partiellement asséchée, l’énorme mare a également permis des cultures maraîchères. Les femmes ont loué des terrains et les hommes ont creusé six puits "parce qu’on avait besoin de beaucoup d’eau".
La vente du petit bétail est aussi pratiquée, même si elle dépossède les paysans de leur principale richesse. "Avec une brebis ou une chèvre, tu peux trouver du mil pour deux ou trois semaines", explique un homme. L’arrivée des pluies à partir de juillet offre d’autres possibilités. Certaines herbes se cuisinent mélangées avec de la farine de manioc.


L’exil, seule porte de secours

Pour fuir la misère, les Nigériens choisissent d’émigrer.

La principale source de revenu des Nigériens souffrant de la misère reste l’exil. Un, deux ou trois fils de famille partent "à l’aventure" à l’étranger, en Libye, parfois en Algérie, souvent en Côte d’Ivoire. De là, ils envoient régulièrement des fonds pour que leurs proches survivent. Le plus souvent, ils reviennent de juin à août. Courte, la saison des pluies a besoin de tous les bras valides.
Rentable, cette stratégie semble pourtant menacée. En effet, avec les accords sur l’immigration passés avec l’Union européenne, rien ne dit que la Libye restera une option.
Mais c’est surtout la Côte d’Ivoire qui inquiète. Ibrahim a déjà passé trois ans à Abidjan où son père, qui s’y rend depuis longtemps, a investi dans une maison : "S’il n’y avait pas ça, on ne pourrait pas survivre". Mais il s’inquiète : "Beaucoup ont dû rentrer à cause des ennuis là-bas".


50.000 enfants nigériens pris en charge par M.S.F.

Médecins sans frontières (MSF) a décidé d’apporter une aide médicale et alimentaire à 50.000 enfants nigériens "modérément malnutris ou vulnérables", indique un communiqué rendu public mercredi.
La prise en charge de ces 50.000 enfants vient compléter celle de 12.600 enfants nigériens souffrant de "malnutrition sévère", précise le communiqué, ajoutant que le rythme d’admission dans les centres nutritionnels de MSF est allé jusqu’à 1.000 enfants par semaine.
"Nous mettons en place cinq unités de soins pédiatriques dans les régions où nous intervenons. La première distribution gratuite de nourriture a eu lieu samedi 23 juillet dans la région de Maradi", indique l’ONG dans son communiqué. Il précise en outre que 180 tonnes de farine enrichie en vitamines et minéraux ainsi que 36.000 litres d’huile ont été distribuées à près de 8.000 enfants nigériens et leurs parents.
"Sur la totalité de l’année 2005, nous prévoyons de distribuer 8.450 tonnes de nourriture et le budget de cette opération d’urgence devrait s’élever à 9 millions d’euros", a encore indiqué l’ONG humanitaire.
Lundi prochain, “Témoignages” publiera de larges extraits d’un article de “l’Humanité” qui montre le travail de MSF sur le front de la famine.


Quand “le Quotidien” n’a rien à se mettre sous la dent...

C’est un choix systématique au “Quotidien” : chaque fois que la Région Réunion prend une décision ou réalise quelque chose au service des Réunionnais et le fait connaître, l’information est minimisée, écrasée voire même censurée. Par contre, dès qu’il y a un pou ou une lente à chercher dans la politique de la collectivité dirigée par Paul Vergès, notre confrère se lâche. Alors c’est la polémique, les procès d’intention, sous-entendus de bas niveau et autres ladi-lafé en grand format et en “une”.
Ce fut le cas une fois de plus hier avec le projet de la Région Réunion de participer en qualité de "Région d’honneur 2005" à la fête de “l’Humanité” du 9 au 11 septembre prochain. Cette participation devrait se faire aux côtés d’autres Régions françaises voire d’autres collectivités comme la Ville de Bordeaux par exemple, dans le but notamment de promouvoir le tourisme à La Réunion. “Le Quotidien” voit tout cela par le p’tit bout de la lorgnette. Est-ce parce qu’il n’avait rien de plus sérieux à se mettre sous la dent ? Tout cela avec la complicité de RFO-Radio, qui s’en est largement fait l’écho lors de sa revue de presse hier matin.

L. B.


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