Entretien avec le Général Clément Bollée - 2 -

Les aspects militaires des FAZSOI dans la COI

21 février 2007

Nous évoquions hier le rôle des FAZSOI au sein de la COI. Voici la suite de notre interview.

Les FAZSOI ont été très actifs dans la COI. Récemment, ils sont intervenus par deux fois à Madagascar lors des cyclones Bondo et Clovis qui ont tous deux touché les côtés malgaches. En outre, le bâtiment “La Grandière” intervient pour aider un navire de pêche malgache au début octobre 2006 et de tels sauvetages en mer se produisent régulièrement. Pourriez-vous nous dire l’ampleur de l’action humanitaire que vous menez ?

- Nous menons de différentes façon un gros travail que l’on peut qualifier d’humanitaire. Il y a d’abord les opérations d’urgence. Nous sommes la seule force organisée de ce niveau capable de se projeter extrêmement rapidement sur toute la zone. Cela signifie pour nous que chaque fois qu’il arrive une catastrophe naturelle (cyclone, volcan, tempête, éboulements, tremblement de terre) ou non (crash d’avion par exemple), cela nous oblige. Là aussi directement dépêchés par la métropole, nous activons nos moyens pour apporter une première réponse. Cela nous arrive en permanence. Nous sommes intervenus pour le Karthala [le volcan des Comores], le chikungunya, la sécheresse, des cyclones, des inondations.
Après, il y a le travail de fond. Les FAZSOI ne sont pas des humanitaires. Par contre, il y a de multiples organisations humanitaires, ainsi que la PIROI (Plate-forme d’Intervention Régionale de l’Océan Indien). Et là, nous pouvons proposer nos services. Nous aidons ainsi une centaine d’ONG à transporter des équipements, des médecins. C’est un travail de complément que j’effectue au profit des acteurs en charge de l’humanitaire dans la zone sud de l’Océan Indien.

Est-ce que l’humanitaire fait partie des missions d’un militaire ?

- La réponse n’est pas nette. Est-on en temps de crise ou non ? La zone sud de l’Océan Indien est sensible mais calme. Elle ne connaît pas de crise identifiée. Dans ce cadre là, les acteurs de l’humanitaire travaillent de façon plus sereine. Si jamais une crise survient comme en Somalie ou dans les Balkans il y a quelques années. Effectivement dans ce cas-là, les militaires, pour le temps de la crise, peuvent être chargées de l’humanitaire. J’ai souvenir qu’à Sarajevo, mes soldats conduisaient les camions de ravitaillement de l’UNHCR. Cela dit, dès que le temps de crise est terminé, chacun doit reprendre sa place.

De façon moins médiatique, il me semble que les FAZSOI luttent aussi contre les kwassa-kwassa, ces embarcations remplies de clandestins mahorais qui souhaitent gagner Mayotte pour vivre mieux que dans leur île. Quelle est la réalité de votre action en ce domaine ?

- Cette action est à replacer dans le cadre de l’action de la lutte contre l’immigration illégale. Les FAZSOI sont une des pièces d’un dispositif global coordonné par le préfet de Mayotte et qui vise à remplir cette mission. Concrètement, les FAZSOI y participent de l’exploitation de sites radars, de patrouilles maritimes au large de Mayotte et de patrouilles terrestres sur les accès de Mayotte.
Il y a une dimension humaine obligée dans ces interventions. La plupart du temps, l’état physique des gens récupérés est proche de l’épuisement. Cela oblige à des comportements adaptés, particulièrement humains pour récupérer ces clandestins avant de les remettre à la police aux frontières.

Les relations militaires avec Madagascar semblent importantes, avec notamment la tenue de l’exercice militaire Makalioka 2006 dans ce pays auquel vous avez participé. Pouvez-vous nous dire les grands axes de cette coopération et leur utilité dans un pays aussi pauvre ?

- Notre impact en termes de coopération est extrêmement important et nous sommes en train de le faire évoluer à la demande des Malgaches eux-mêmes qui en sont les premiers bénéficiaires. Au plan quantitatif, il y a quasiment en permanence des stagiaires malgaches ici ou des instructeurs FAZSOI partout au sein de l’armée nationale malgache. Nous avons une permanence de notre coopération bilatérale militaire.
En termes qualitatifs, nous faisons beaucoup de coopération en termes de maintien de la paix depuis 2002 suite à la demande de Marc Ravalomanana qui souhaite, dans le futur, que son pays assume des responsabilités dans ce domaine.
Faire participer l’armée nationale au développement du pays est le second point. Le projet demandé et suivi par le président est le Service Militaire Adapté au Développement (SMAD) depuis l’année dernière. Ce projet est mené par le général Gandouli qui est un ancien patron du Service Militaire Adapté (SMA). Il est à la retraite et je lui ai proposé de mettre ses grandes compétences au service des FAZSOI. L’esprit du SMAD à Madagascar obéit à une autre logique que le RSMA à La Réunion. Ce dernier répond à un défi social qui consiste à donner une deuxième chance à une jeunesse en difficulté. Le projet malgache vise à répondre au défi du développement du pays. Nous ne faisons que les aider dans la réalisation de leur objectif. Celui-ci vise à terme, c’est-à-dire en 2013, à former chaque année 1800 jeunes, trois-quarts dans le secteur agricole, un quart dans le secteur urbain. Ceux-ci seront répartis dans trente unités correspondant aux vingt-deux régions et aux huit grandes villes.
Comment réalise-t-on le développement ? Ces jeunes ont une formation d’un an puis une application d’un an notamment dans les grands chantiers du pays. Ensuite, les gens du secteur agricole se voient affecter par l’État cinq hectares de terre avec des équipements pour monter leur exploitation agricole autour du centre de formation qui continuera à les aider, contribuant à fixer ainsi des populations dans des endroits oubliés.

Madagascar a réussi l’alternance politique en 2001. A cette époque, le président Jacques Chirac a penché longuement en faveur de Ratsiraka, avant d’être un des derniers dirigeants politiques à reconnaître la victoire de Marc Ravalomanana. Une tout autre attitude a prévalu lors de l’élection présidentielle, l’année dernière, qui a conduit à la réélection du président. Vous êtes allés, ainsi que Dominique Bussereau et Michel de Bonnecorse, le Monsieur Afrique de l’Élysée, à l’intronisation de Marc Ravalomanana à la mi-janvier 2007. Où en sont les relations entre la Grande-Ile et la France ?

- J’ai remarqué l’enthousiasme au cours de cette cérémonie dans la population de la capitale. L’ampleur des actions que je fais dans mon domaine me laisse penser que tout va très bien, aujourd’hui, entre Madagascar et la France. Nous réalisons plus de vingt escales par an sur la Grande-Ile ce qui est exceptionnel. Je suis amené à me rendre en moyenne une fois par mois pour coordonner nos projets communs ce qui témoigne de leur vigueur. Dans mon budget coopération, je consacre la moitié de mon budget pour des actions avec Madagascar. Il n’y a pas d’équivalent. Je constate que je ne suis pas le seul, et loin s’en faut, comme acteur de coopération française avec Madagascar. Et j’observe un effort similaire au mien dans les domaines de la culture, et de l’éducation...

A suivre...

Propos recueillis par Matthieu Damian


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