L’EIIL, une conséquence de la guerre lancée par les Etats-Unis en 2003

Les chrétiens d’Irak forcés à l’exil

30 juillet 2014, par Céline Tabou

La population chrétienne de Mossoul, dans le nord de l’Irak, a dû fuir la ville le 19 juillet, suite à l’ultimatum lancé par l’État islamique en Irak et au Levant. Suite aux menaces de morts et à l’exil forcé des chrétiens, Ban Ki-moon a qualifié la situation de de crime contre l’humanité.

Une famille de réfugiés ayant dû fuir après la prise de Mossoul par l’armée de l’État islamique en Irak et au Levant. Depuis l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis en 2003, le nombre de chrétien vivant en Irak est passé de 1,3 million à 300.000 dans ce pays. (photo Louise Redvers - IRIN)

Présente depuis près de deux millénaires dans la région, la population chrétienne de Mossoul, a fui la ville avant l’expiration de l’ultimatum de l’EIIL. Le groupe jihadiste les a obligé soit à se convertir à l’islam, soit à payer l’impôt des non-musulmans, la « jizya », pour rester dans le « califat » qu’ils ont instauré. A défaut de l’une de ces deux conditions, l’EI a annoncé qu’il exécuterait tout Chrétien.

« Leur départ est une grande perte ».

Depuis que l’Etat islamique (EI) a pris le contrôle de Mossoul en juin dernier, la lettre « N » en arabe a été peinte sur les maisons où vivent les chrétiens. « N » comme « nazaréen », signifiant que leur bien est confisqué et fait désormais partie des « biens immobiliers propriétés de l’État islamique ». L’offensive menée par jihadistes a pour but de créer un Etat islamique dans la zone frontalière entre la Syrie et l’Irak. Karim Pakzad, chercheur à l’Institut de recherches internationales et stratégiques, a expliqué au quotidien Metronews, que l’EI est « une grande organisation militaire, avec un armement sophistiqué, qui a adopté la stratégie de la peur ». Ce sont d’ailleurs des « terroristes bien plus radicaux qu’Al-Qaïda ».
Plusieurs centaines de familles ont pris le chemin de l’exil pour se réfugier entre Qaraqosh, Erbil, Dohouk et d’autres villes du nord de la zone autonome du Kurdistan irakien, encore épargnée par les conflits. Selon le patriarche chaldéen Mgr Louis Sako, interrogé par l’AFP, 25000 chrétiens étaient encore présents dans Mossoul à la veille de l’expiration de l’ultimatum. « Pour la première fois dans l’histoire de l’Irak, Mossoul se vide de ses chrétiens », a-t-il déploré.
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a affirmé dimanche 27 juillet « que les attaques systématiques contre des civils en raison de leur origine ethnique ou de leur appartenance religieuse peuvent constituer un crime contre l’humanité dont les auteurs doivent rendre des comptes ». Des habitants sunnites de Mossoul, interrogé par l’agence française ont fait part de leur solidarité avec leurs concitoyens chrétiens. « Nous considérons que c’est injuste et contraire aux principes de l’islam », a déclaré l’un d’eux. « Des chrétiens ont vécu à Mossoul pendant plus de 1.000 ans », a-t-il souligné. « Leur départ est une grande perte ». Des responsables des villes saintes chiites de Kerbala et Najaf, qui accueillent de nombreux réfugiés chiites, ont assuré que leurs portes étaient ouvertes aux chrétiens.

Vers un front uni contre l’EI

Ne parvenant pas à faire reculer les jihadistes, le Premier ministre chiite Nouri al-Maliki a condamné dans un communiqué l’éviction des chrétiens. Pour ce dernier, la persécution envers les minorités religieuses révèlent « la nature criminelle et terroriste de ce groupe et le danger qu’il représente ». Il a exhorté la communauté internationale à faire front uni contre les radicaux et les extrémistes. Son opposant, Ahmed Chalabi, figure politique chiite a blâmé le gouvernement qui « a failli à sa tâche de protéger les citoyens irakiens » dont les chrétiens « font partie intégrante ».
Le département d’État américain a également condamné « la persécution systématique des minorités ». Du côté, français, Laurent Fabius et Bernard Cazeneuve, respectivement ministre des Affaires étrangères et de l’Intérieur, ont exprimé ce lundi leur vive inquiétude : « La France est révoltée par ces exactions qu’elle condamne avec la plus grande fermeté », assurant que le pays était prêt à leur donner asile.
A Rome, le pape François a dénoncé les persécutions des chrétiens d’Irak, « nos frères sont persécutés, chassés, ils sont forcés d’abandonner leurs foyers sans pouvoir emporter quoi que ce soit avec eux ». Cependant, pour le chercheur Karim Pakzad, « l’EI n’a pas pour l’instant le moyen d’étendre son influence à d’autres régions. Mais si l’on ne fait rien pour limiter l’extension de sa puissance, le même genre de scénario pourrait se produire ailleurs, comme en Syrie ».

Céline Tabou

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