Avec le Traité constitutionnel

Menaces sur les droits sociaux

25 mai 2005

Les dispositions du projet de Traité constitutionnel européen font peser de lourdes menaces sur le système français de protection sociale (minimas sociaux comme le RMI, politiques de lutte contre le chômage...).

(page 3)

En Droit international, les Traités sont supérieurs aux lois nationales. Si elle est approuvée, la Constitution européenne sera d’une force supérieure à la Constitution française. La Constitution française devra donc être modifiée pour se conformer aux dispositions de la Constitution européenne.
C’est pour cela qu’on dit que le droit communautaire prime sur le droit national.
En ce qui concerne les droits sociaux, la Constitution proclame le principe de l’harmonisation dans toute l’Union.
L’article III-209 du Traité proclame : "à cette fin, l’Union et les États-membres agissent en tenant compte de la diversité des pratiques nationales, en particulier dans le domaine des relations conventionnelles, ainsi que de la nécessité de maintenir la compétitivité de l’économie de l’Union. Ils estiment qu’une telle évolution résultera du fonctionnement du marché intérieur qui favorisera l’harmonisation des systèmes sociaux, que des procédures prévues par la Constitution, et du rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États-membres."
Cela signifie clairement que l’harmonisation des systèmes sociaux est un objectif. Mais l’article que nous citons un peu plus haut dit qu’il faut s’en remettre au marché pour "favoriser l’harmonisation des systèmes sociaux".
Soumise à "la nécessité de maintenir la compétitivité de l’économie de l’Union", cette harmonisation n’échappera donc pas à l’alignement sur les niveaux de salaires les plus bas, et les législations sociales les plus défavorables aux peuples.
Le système de protection sociale français est le plus favorable aux travailleurs. Les travailleurs français sont ceux qui ont le plus à perdre dans une harmonisation telle que celle proposée par le Traité constitutionnel.
Ainsi, la Constitution française proclame "le droit des citoyens à des ressources suffisantes" pour assurer sa subsistance. C’est sur ce principe que sont basés les "minimas sociaux" (RMI-AVTS etc.). La Constitution européenne parle du "droit à une aide sociale", sans qu’il soit question d’une aide assurant un minimum de subsistance. L’harmonisation des droits sociaux ne garantit pas le maintien des minimas sociaux en France.
La Constitution française proclame le droit de chaque citoyen à un travail. C’est ce qui fait que la politique de l’emploi est une responsabilité de l’État. Il en découle des politiques de lutte contre le chômage et l’exclusion, par exemple par les contrats aidés (CES, CEC, etc.). La Constitution européenne réduit ce droit à celui "de rechercher un travail", sans qu’il soit fait obligation aux États de mettre en œuvre une politique visant le plein emploi.


Ce travail au rabais qui affole la France

Le quotidien parisien “Libération” a consacré son édition d’hier à ces cas de dumping social que l’on recense en France. "Les plaintes se multiplient contre les pratiques qui favorisent l’emploi de travailleurs peu payés venus du reste de l’Union européenne", écrit le journal.
"À cinq jours du référendum, le plombier polonais, le routier espagnol, le maçon portugais ou tchèque... sont devenus des figures majeures de la campagne française (...) Pas un jour sans qu’un élu ou un syndicat ne dénonce un contrat de sous-traitance portugais, un appel d’offres remporté par une entreprise tchèque, ou un déménagement d’usine par des Polonais", commente “Libération”.
Celui-ci ajoute : "à chaque fois, les conditions de travail et de salaire sont au mieux discutables, sinon franchement illégales. Comme si les menaces de dumping social n’avaient pas attendu la directive Bolkestein et son fameux principe du pays d’origine, pour s’incruster dans de nombreux secteurs de l’économie française".
Le journal cite la manifestation avant-hier de routiers français "contre la concurrence déloyale de l’Europe du Sud sur les routes françaises", le blocage par une centaine de marins de la compagnie Irish Ferries du débarquement des passagers "pour protester contre la décision de remplacer une partie de l’équipage irlandais par des employés originaires des pays de l’Est (Polonais et Lituaniens), payés moins cher".
Le journal rappelle le cas de Constructel, un sous-traitant de France Télécom, "épinglé parce que les salariés portugais auxquels il avait recours ne respectaient pas la législation française". Il signale que dans une usine LU, "une dizaine d’ouvriers polonais ont travaillé à démonter des machines pendant 3 semaines, 6 jours sur 7, payés 22 euros par jour".
“Libération” donne la parole à Alex C., patron d’une petite entreprise de bâtiment qui travaille exclusivement avec des Polonais : "Nos salariés sont détachés pour une période de 2 mois, payés un quart du salaire français. Cela nous permet de proposer des chantiers entre 20 et 30% moins chers que la concurrence, en totale légalité".
Il rappelle la situation du maire d’Avallon qui a attribué "après appel d’offres, 8 lots (sur 12) à une société basée à Prague pour la rénovation de la salle des fêtes" et qui a déclaré : "les salariés sont payés entre 1.100 et 1.500 euros (primes comprises), selon la législation tchèque (...) Personne n’a rien trouvé à y redire. Si c’est illégal, c’est à l’Inspection du travail de faire son travail. Je ne peux suspecter une entreprise de tricher parce qu’elle est étrangère".
Pour “Libération”, il est "difficile d’évaluer l’ampleur du phénomène, mais plusieurs secteurs comme le BTP ou l’agriculture profitent de la complexité de la réglementation pour prospérer en toute illégalité".
"De ce manque de contrôle surgissent parfois des relents de racisme", constate le journal qui ne peut s’empêcher de noter que la médiatisation de toutes ces affaires contribue à faire monter le “non”.


Budget européen et diminution des aides aux régions

Gerhard Schröder confirme les craintes de Paul Vergès

L’Allemagne s’oppose vigoureusement à toute augmentation du budget de l’Union européenne. La France ayant adopté la même position, on voit mal comment les promesses de Jacques Chirac, lors de son interview spéciale DOM avec Stéphane Bijoux, pourraient être tenues. Paul Vergès avait donc raison d’alerter les Réunionnais sur les diminutions des fonds structurels pour les régions en difficultés, en particulier les RUP.

Sous le titre "Budget de l’UE : la situation en Allemagne rend un accord difficile", “Le Monde” a publié hier un article confirmant que les élections législatives anticipées, annoncées dimanche dernier en Allemagne, rendent plus hypothétique encore un accord en juin sur le budget européen pour 2007-2013. Le journal rappelle que le Royaume-Uni menace d’utiliser le veto pour s’opposer au démantèlement du rabais accordé en 1984. Et il ajoute : "à Bruxelles, on s’attend que Berlin durcisse le ton sur l’autre volet des négociations : les dépenses".
Et d’ajouter : aux côtés de la France, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de la Suède et de l’Autriche, Berlin est le pilier le plus solide du club des six, qui propose de plafonner le niveau des engagements financiers de l’Union à 1% de son Produit intérieur brut (PIB). Et le premier contributeur au budget communautaire n’est pas près de baisser la garde, en pleine campagne électorale.
"On ne voit pas comment, face à la CDU, le chancelier Schröder pourrait proposer davantage d’Europe, au point d’augmenter la contribution allemande au budget communautaire", dit un diplomate de haut rang cité par “Le Monde”.

"Trop chère"

Suivie par ses 5 alliés, l’Allemagne a jugé "trop chère", dimanche, la proposition de compromis présentée en fin de semaine dernière par la présidence luxembourgeoise. Celle-ci envisage de plafonner les dépenses de l’Union entre 1,06 et 1,09% de son PIB, soit entre 868 et 903 milliards d’euros sur la période 2007-2013.
Pour Berlin, le budget communautaire ne doit pas dépasser 815 milliards d’euros (1% du PIB). Jeudi 19 mai à Nancy, lors d’une rencontre avec les présidents français et polonais, M. Schröder avait déjà adopté un ton très dur pour tenter de limiter la contribution allemande, rappelle “Le Monde”.
Celui-ci rappelle également qu’en 1999, le chancelier Schröder avait déjà tenté de réduire la participation allemande sur la période 2000-2006. Sa fermeté avait suscité une crise sans précédent, en particulier avec la France, inquiète pour la PAC (Politique agricole commune).
"L’Allemagne connaît une croissance atone depuis dix ans et accumule les déficits budgétaires. M. Schröder estime qu’elle n’a plus les moyens d’être le portefeuille des Vingt-Cinq. Le chancelier ne cesse de répéter qu’il est difficile de faire plus alors qu’il demande à ses concitoyens d’accepter des réformes impopulaires ", conclut “Le Monde”.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus