Déclaration finale de la 10ème Conférence des présidents des Régions ultrapériphériques

« Mieux asseoir la stratégie de développement des R.U.P. »

6 septembre 2004

La 10ème Conférence des présidents des Régions ultrapériphériques (RUP) a souligné l’importance de l’affirmation du concept de l’ultrapériphérie dans le corps du Traité européen, à l’heure de l’élargissement de l’Union européenne.
L’objectif de la cette conférence était de définir une stratégie globale pour ces régions, pour les intégrer au sein de la sphère européenne tout en les aidant à coopérer avec les États et territoires voisins.
À cet effet, les présidents ont adopté la Déclaration finale que nous reproduisons intégralement ci-après.

Les présidents des Régions ultrapériphériques et leurs représentants, réunis à Ponta Delgada, les 2 et 3 septembre 2004, à l’occasion de leur dixième conférence annuelle, remercient :

- Monsieur Jacques Barrot, Commissaire européen chargé de la Politique régionale, ses collaborateurs, ainsi que les membres de l’Unité RUP de la DG REGIO ;

- Madame Brigitte Girardin, Ministre de l’Outre-Mer de la République française ;

- Madame Maria Joao Botelho, représentant le ministère des Affaires étrangères du gouvernement portugais ;

- Madame Pilar Marin, représentant le Ministre des Affaires étrangères du Gouvernement espagnol ;

- Monsieur Herman Froger, ambassadeur des Pays-Bas représentant de la présidence de l’Union européenne ;

dont la présence témoigne de l’intérêt et du soutien des institutions nationales et communautaires pour les Régions ultrapériphériques.

La Conférence des présidents salue la présence de Monsieur Xavier Gizard, Secrétaire général de la Conférence des régions périphériques maritimes, dont l’Assemblée générale a apporté un appui constant aux travaux des RUP.
Une Europe élargie, des institutions communautaires renouvelées, un nouveau traité, un contexte mondial toujours marqué par de nombreux conflits, au sein duquel l’influence et les règles de l’organisation mondiale du commerce sont de plus en plus déterminantes, telle est la situation dans laquelle se tient la 10ème Conférence des présidents des Régions ultrapériphériques (RUP).
Les présidents des Régions ultrapériphériques tiennent à rappeler le long processus qui a marqué l’émergence de leur statut au sein de l’Union européenne, à analyser les réponses apportées et à exprimer leurs positions sur les propositions les plus récentes.
En conclusion de cette dixième Conférence, les présidents ont adopté la Déclaration suivante :

Le statut de RUP

1) Les présidents des RUP rappellent que le processus qui a conduit à la reconnaissance juridique du statut de l’ultrapériphérie, et la déclinaison de celui-ci dans le cadre des différentes politiques communautaires reposent sur des principes constants qui gardent toute leur pertinence :

- un cumul unique d’handicaps et d’atouts, y compris dans l’Europe élargie ;

- l’appartenance à un double espace : celui de l’Union européenne, mais aussi l’espace de leur proximité géographique très éloignée du continent européen ;

2) La création de la Conférence des présidents des RUP, amorcée à Funchal en 1988, décidée à Saint-Malo le 14 octobre 1993, concrétisée à Gourbeyre en 1995, avait notamment pour objectif, dans le contexte de l’approfondissement et de l’élargissement de l’Union européenne, d’affirmer le concept de l’ultrapériphérie dans le corps du Traité.

Dans ce cadre, ils se félicitent de l’appui constant apporté dans cette démarche par leurs États-membres, par le Parlement européen, ainsi que l’esprit d’ouverture dont a fait preuve le Conseil européen à de nombreuses reprises. Par ailleurs, ils notent avec satisfaction les prises de position du CES (Conseil économique et social) et du CDR (Comité des Régions) ;

Ils tiennent également à souligner le rôle de la Commission européenne, au titre du mandat actuel, notamment du Commissaire chargé de la politique régionale, afin de définir une stratégie d’ensemble pour les RUP - COM (2004) 343 - et sa volonté d’approfondir un partenariat fort et novateur avec les RUP et la Conférence des présidents.

3) Ils constatent que leur action permanente basée sur la pertinence de leur diagnostic, sur la solidarité, la continuité et le dialogue ont permis l’émergence d’un concept novateur et la mise en place de mesures adaptées avec pour objectif la croissance et l’emploi sur leur territoire.

Les conditions d’une stratégie globale pour l’ultrapériphérie sont réunies

4) Ils se félicitent de l’adoption à Bruxelles, en juin 2004, des nouveaux articles IV.4 et III.330 au sein du nouveau Traité constitutionnel dont la mise en œuvre doit permettre de décliner dans l’ensemble des politiques internes et externes de l’Union européenne des actions adaptées pour garantir leur processus de convergence ;

Ils rappellent que ces articles renforcent le socle juridique et l’unicité du concept de l’ultrapériphérie. De ce fait, ils sont convaincus que toutes les conditions sont réunies pour que l’Union européenne mette en œuvre une vraie politique transversale à l’égard de l’ultrapériphérie.

5) Ils soulignent avec satisfaction que le rapport de la Commission, demandé par le Conseil européen de Séville établit un nouveau diagnostic qui démontre le faible impact dans les RUP de nombreuses politiques communautaires menées jusqu’à présent au niveau du marché intérieur, des RTE (réseaux électriques), de la politique de concurrence, des transports, des déchets, etc.

De même, ce rapport conforte les options prises par le Mémorandum de Cayenne (février 1999) au niveau des nouveaux axes stratégiques à développer, afin que les RUP puissent participer pleinement aux stratégies de Lisbonne et de Göteborg, et pour inscrire l’ensemble des actions dans un cadre stratégique global.

6) Les présidents remarquent que la première année de mandat de la nouvelle Commission et du Parlement européen sera marquée par un ensemble de décisions et d’orientations (politique régionale, réforme de l’OCM banane et de l’OCM sucre, nouvel instrument pour la pêche, politique de développement rural, négociations au sein de l’OMC etc.) qui permettront de décliner les premières mesures concrètes ;

Tous ces éléments sont donc réunis aujourd’hui pour mobiliser de façon cohérente les différents instruments des politiques communautaires vers une stratégie globale de développement.

Les propositions de la commission : réponses mitigées

7) Tout en partageant le point de vue de la Commission sur la nécessité de définir divers instruments pour tendre vers une analyse des surcoûts qui affectent le développement des RUP, et pour permettre une évaluation de l’impact des mesures communautaires prises à leur égard, la Conférence s’interroge sur les exigences de justifications économiques trop exhaustives ou disproportionnées par rapport à ce qui est demandé aux autres territoires.

La Conférence s’inquiète aussi de l’abandon partiel de la méthodologie de l’étude d’impact des politiques communautaires qui affectent directement et de manière disproportionnée les RUP.

La Conférence attire l’attention sur la nécessité d’associer les Régions à toutes les phases du processus qui devra être mené, avec le souci de la proportionnalité dans les moyens humains et financiers qui devront y être consacrés, et en tenant compte des difficultés méthodologiques qui affectent ce type de démarche.

8) Tout en se félicitant de la proposition de la Commission visant le maintien d’une réelle politique régionale sur un plan global, la Conférence regrette, compte tenu de la situation hors du commun des RUP au sein de l’Union européenne, l’application du cadre général d’éligibilité à leurs Régions.

La Conférence insiste sur le fait que les handicaps communs aux RUP sont permanents, indépendamment de leur niveau de PIB. En conséquence, la problématique de l’ultrapériphérie n’est pas limitée à une question de PIB, mais résulte d’une situation structurelle et complexe, qui affecte à la fois ses citoyens et la compétitivité des entreprises.

La Conférence constate que les RUP, y compris celles qui ont atteint le seuil de 75% du PIB communautaire moyen, continuent à subir un déficit d’infrastructures de base. Les RUP ne satisfont pas encore aux conditions de convergence et de compétitivité nécessaires à l’accomplissement des objectifs fixés par les stratégies de Lisbonne et de Göteborg. Dans ce contexte, la Conférence estime qu’elles ne pourront pas maintenir leur processus de convergence et de croissance, s’il n’y a pas de continuité concernant l’intervention de la politique régionale européenne, à partir de 2006, dans un cadre global adapté à leurs particularités.

9) La Conférence salue la proposition de la Commission de favoriser l’insertion des RUP dans leur environnement régional et considère que cet objectif doit s’inscrire dans la création d’un espace de croissance et d’intégration économique, sociale et culturelle. Cette proposition nécessite une coordination effective des différents éléments de l’action extérieure et des moyens financiers adéquats. Les RUP pourront ainsi jouer leur rôle de frontière active de l’Union Européenne.

La Conférence s’interroge cependant sur les moyens concrets d’une telle orientation, et notamment sur l’absence de propositions relatives au volet coopération territoriale européenne - COM (2004) 495 - pour prendre en compte la particularité des RUP dans leur environnement géographique.

La Conférence fait remarquer que les négociations internationales menées par l’Europe, dans le cadre des accords de partenariat économique (APE) touchent directement les RUP dans leur zone d’influence. Les négociations des APE et la mise en œuvre des prochains règlements offrent l’opportunité d’une nouvelle dynamique pour les RUP de mise en chantier du plan d’action pour l’insertion dans l’environnement géographique de chacune des RUP. Il conviendra de mettre en place des programmes de développement par zone géographique. La future politique en faveur des RUP doit prendre en compte les nouveaux défis que doivent affronter ces ensembles régionaux.

10) La Conférence demande à chaque État-membre concerné, avec l’appui de la Commission, de prévoir des ressources financières adaptées pour le programme spécifique de compensation des surcoûts permettant de pallier à la perte de crédits liée à la sortie de l’objectif 1, de financer les équipements qui concourent à diminuer les handicaps associés à l’ultrapériphérie, et de favoriser une répartition juste et équitable, sur la base des critères définis par l’article 233 paragraphe 2. Dans le même objectif, la Conférence souhaite l’inclusion des ports et aéroports des RUP à l’égibilité du fonds de cohésion pour États bénéficiaires.

Par ailleurs, la Conférence considère que les régions dont le PIB par habitant continue de diminuer en partie, en raison d’une forte croissance démographique, doivent bénéficier de soutiens financiers supplémentaires, en vue d’une part de faire face aux difficultés structurelles permanentes, et d’autre part, de parvenir au niveau de cohésion économique et social contenu dans le Traité.

11) La Conférence considère que certains investissements d’infrastructures sont étroitement liés au concept et aux problèmes permanents de l’ultrapériphérie, notamment les infrastructures portuaires et aéroportuaires qui sont les seuls moyens de liaison de ces régions avec le reste du monde.

Aussi, la Conférence s’interroge sur la logique visant à exclure ces investissements du fonds destiné à réduire les coûts d’accès à leurs territoires.

La Conférence estime que dans le cas de l’ultrapériphérie, la politique régionale doit pouvoir soutenir ce type d’investissements indépendamment du critère du PIB par habitant.

12) La Conférence s’interroge avec gravité, au vu des difficultés déjà rencontrées en 1999, sur l’inadaptation aux RUP des projets de règlements qui mettront en œuvre la nouvelle politique de développement rural, la politique commune de la pêche et à un autre niveau sur l’évolution des lignes directrices des aides à finalité régionale. En particulier, la réduction des niveaux d’intensité d’aides précédemment accordées ou l’interdiction des aides à la flotte, constituent des éléments préjudiciables à la compétitivité des RUP, à la diversification de leur économie et en définitive à leur convergence réelle.

En conséquence, la Conférence demande, sur ces différents points, que la situation prévalant actuellement soit maintenue.

13) La Conférence tient à souligner dans ce contexte, l’importance de consolider les relations de partenariat entre la Commission, les autorités nationales et les RUP et de renforcer les capacités de l’unité RUP au sein de la nouvelle Commission.

Perspectives

14) Les présidents réaffirment leur ferme volonté de consolider leur relation de coopération, d’utiliser en particulier les moyens offerts par le projet RUP Plus, pour contribuer ensemble à la mise en œuvre de la stratégie dessinée par la Commission.

Les présidents mandent le Comité de suivi de leur Conférence pour initier les démarches nécessaires afin de favoriser sur le plan de l’organisation la mise en œuvre de projets communs.

15) La Conférence approuve les résolutions suivantes :

- sur les productions traditionnelles dans les RUP ;

- sur les RUP dans le VIIème PCRD (programme cadre de recherche et de développement) ;

- sur les nouvelles lignes d’orientation d’aides à finalité régionale ;

- ainsi que sur la création de groupes de travail sur l’environnement et sur l’emploi.

16) La Conférence mandate le président de la Conférence pour transmettre la présente Déclaration à la Commission européenne, au Parlement européen, au Comité des Régions, au Conseil économique et social, aux chefs d’État et de gouvernement concernés, ainsi qu’à la Conférence des régions périphériques maritimes.

17) La Conférence convient que la région de La Réunion prendra en charge la prochaine présidence de la Conférence des RUP.

Les présidents estiment que la place de l’Europe dans le monde est directement liée à l’ambition qu’elle se donnera sur le plan politique et aux valeurs qu’elle mettra en œuvre sur le plan interne et externe. Dans ce cadre, les RUP, compte tenu de leur position géographique, souhaitent mettre en œuvre un partenariat direct avec les pays de leur environnement proche, avec lesquels il existe des liens sociaux, économiques et culturels, afin de mieux asseoir leur stratégie de développement.

Acores, Canarias, Guadeloupe, Guyane, Madeira, Martinique, La Réunion
Ponta Delgada, le 2 septembre 2004


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