Le S.G.P.E.N. - C.G.T.R. et le traité européen

Pour les luttes et les revendications syndicales : un “non” impératif au projet de Traité constitutionnel

2 avril 2005

(page 7)

Nous reproduisons ci après un communiqué diffusé avant-hier par le S.G.P.E.N. - C.G.T.R.
Le bureau académique du SGPEN-CGTR a débattu du contenu et des enjeux portés par le projet de Traité constitutionnel européen.
Le projet de traité, dès ses premiers articles, indique ses objectifs fondamentaux : offrir "un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée" (art. I-3-2) et œuvrer "pour le développement durable de l’Europe fondé (...) sur la stabilité des prix et une économie sociale de marché hautement compétitive" (art. I-3-3).
À l’aune de ces principes, les fonctions dites essentielles de l’État sont réduites à la portion congrue : "assurer l’intégrité territoriale, maintenir l’ordre public et sauvegarder la sécurité nationale" (art. I-5-1).
Le texte explicite les procédures de décision permettant de remplir les objectifs de l’Union européenne, dont "la concurrence libre et non faussée" :

- "La Constitution et le droit adopté par les institutions de l’Union, dans l’exercice des compétences qui sont attribuées à celle-ci, priment le droit des États membres" (art. I-6) ;

"Les États membres facilitent l’accomplissement par l’Union de sa mission et s’abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l’Union" (art. I-5-2).

Dans tous les aspects des décisions de puissance publique, l’Union européenne a donc la primauté, voire l’exclusivité, de l’initiative, cela au service du libéralisme, dont la prédominance dans la construction européenne proposée apparaît principalement dans la Partie III du texte, en particulier sur la question des services publics.

La notion de services publics n’existe pas dans le projet de Traité constitutionnel

Seuls sont évoqués (art. II-96) les services d’intérêt économique général (SIEG), soumis aux règles de la concurrence et ne pouvant en être exemptés que de façon dérogatoire, dans un nombre de situations limitativement énumérées (art. III-161, III-166 et III-167). En même temps, une directive relative aux services dans le marché intérieur, dite "directive Bolkestein", est proposée à la ratification en 2005. Cette directive prévoit qu’en dehors des services déjà couverts - et ouverts au marché - par une autre directive (transports, services financiers, télécommunications...) et à l’exception de ceux qui sont fournis gratuitement et directement par les pouvoirs publics, tous les services seraient concernés par la libéralisation, y compris l’enseignement, la culture et la santé.

En matière de coordination des politiques économiques, budgétaires, monétaires et fiscales, la contrainte du marché s’oppose à la croissance, au développement humain et à l’emploi ; le pacte de stabilité est intégré dans le texte (art. III-184) et même renforcé (l’article III-194 précise que les États membres de la zone euro doivent encore "renforcer la coordination et la surveillance de leur discipline budgétaire") ; la Banque centrale européenne, totalement indépendante, se fixe pour objectif exclusif et désormais inscrit dans le projet de traité la stabilité des prix ; l’unanimité est de règle en matière d’harmonisation fiscale, ce qui aurait pour conséquence de favoriser le moins disant fiscal.

L’inclusion dans la partie II du texte de la Charte des droits fondamentaux ne garantit pas d’avancée notable pour les citoyens des 25 États membres. Il est important de relever l’article II-112-7, qui précise que "des explications élaborées en vue de garder l’interprétation de la Charte des droits fondamentaux sont dûment prises en considération par les juridictions de l’Union et des États membres". Ces "explications" font l’objet d’une déclaration annexée - qui d’après l’article IV-442 a même valeur que le texte du projet de traité - et posent des principes en recul par rapport à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 ou le préambule de la Constitution française, par exemple. Ne sont pas reconnus explicitement, entre autres, le droit au travail, à un revenu minimum, à l’égalité salariale, à une pension de retraite, aux allocations de chômage, à un logement convenable, à l’éducation tout au long de la vie, à l’IVG, le droit de grève transnational, le droit d’être soigné en cas d’urgence, le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales des résidents étrangers à l’Union. Le préambule du texte remet en cause la laïcité des États en citant "les héritages religieux de l’Europe".

Le projet de Traité constitutionnel ne répond en rien aux attentes et besoins des salariés, actifs, retraités et privés d’emploi, aux intérêts des usagers des services publics. Au contraire, il constitue un obstacle majeur au développement des luttes, y compris aux échelons européen et mondial, au progrès social. Il s’inscrit dans le prolongement du Traité de Maastricht, du pacte de stabilité, destructeurs du service public et de l’emploi (le préambule du texte indique que les chefs d’État des États membres sont "résolus à poursuivre l’œuvre accomplie dans le cadre des traités instituant les Communautés européennes et du Traité sur l’Union européenne, en assurant la continuité de l’acquis communautaire").

C’est pourquoi le bureau académique du SGPEN-CGTR se prononce sans ambiguïté pour un NON syndical à ce projet. Pour sa part, il appelle les fonctionnaires de l’Éducation nationale, et tous les autres, les usagers des services publics à empêcher par leur vote et leurs mobilisations, la ratification de ce texte. Le rejet du projet de Traité constitutionnel constituera un moteur et un point d’appui au développement des luttes pour les droits sociaux. Le SGPEN-CGTR appelle les personnels à s’inscrire pleinement dans les mobilisations nationales et européennes à venir pour la défense des droits des salariés, leurs conditions de travail, les salaires et pour des services publics de qualité.
Au-delà, il propose de s’inscrire dans les mobilisations futures pour empêcher l’adoption des directives sur le temps de travail et sur les services dans le marché intérieur.


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