L’accord de paix a été signé au Kenya

Soudan : Fin de la plus vieille guerre civile d’Afrique

11 janvier 2005

Un événement historique a été enregistré ce dimanche, suite à la décision unanime du gouvernement soudanais et des rebelles du Sud, de s’entendre sur un accord de cessez-le-feu mettant un terme aux 21 années de guerre civile au Sud Soudan.

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La signature de l’accord de paix global dimanche, à Nairobi (Kenya), met un terme définitif à la guerre civile au Soudan. Elle constitue la fin du processus marqué par la signature de six protocoles de paix et de deux textes d’application au cours des deux dernières années. Après 21 ans de guerre civile, c’est le plus vieux conflit plus d’Afrique qui se termine enfin.
Les ennemis d’hier ont déclaré la fin des hostilités. Ils ont qualifié cet acte de "meilleur cadeau de Nouvel An" pour le Soudan et le continent africain tout entier. Ils ont également fait référence à l’accord, en l’identifiant à l’avènement, pour le Soudan, d’une nouvelle ère au cours de laquelle les lourdes dépenses militaires appartiendront au passé.
La fin de la guerre, un événement à la fois mémorable et d’une forte intensité dramatique, a été consacrée par la signature de l’accord de cessez-le-feu définitif par le chef de l’Armée/Mouvement de libération du peuple du Soudan (SPLA/M), John Garang, et le vice-président du Soudan, Ali Osman Taha.

Fin de "39 années de guerre"

Plus de 15 chefs d’État africains, le secrétaire d’État américain, Colin Powell, et plusieurs ministres des Affaires étrangères de pays de l’Union européenne, ont pris part à la cérémonie de signature organisée dans le stade Nyayo de Nairobi. "Nous avons mis un terme à 39 années de guerre (depuis les troubles suite à la “révolution populaire” de 1964, NDLR). La guerre a pris fin dans la dignité. Il n’y aura plus de fusils, plus de bombes tombant du ciel, plus de pleurs d’enfants innocents, ni de femmes. La paix sera une plus grande bénédiction pour nous", a déclaré John Garang.
Immédiatement après la signature de l’accord, la SPLA/M a procédé à la remise en liberté de plus de 1.000 prisonniers de guerre, constitués, pour la plupart, de soldats du gouvernement de Khartoum.
Elle a également déclaré qu’il s’agissait de la première véritable Fête de l’Indépendance de la région semi-autonome du Sud Soudan. John Garang a indiqué à l’intention du peuple soudanais que cet accord marquait le début d’une réelle insertion politique de tous, expliquant que les nombreuses guerres civiles du Soudan résultent de l’accaparement du gouvernement par une la minorité, excluant les autres composantes de toute participation à la vie politique.
"Nous venons d’assister à la signature d’une paix honorable pour le Soudan. Le meilleur cadeau de Nouvel An que nous venons d’offrir au peuple soudanais", a affirmé M. Garang. Pour sa part, le président soudanais, Omar Hassan El Béchir, a déclaré que la signature de l’accord de cessez-le-feu définitif ouvre la voie à la relance des relations entre le Soudan, les États-Unis et l’Europe et à la redynamisation du processus démocratique.
Cependant, le président Béchir a fermement mis en garde les insurgés du Soudan, les accusant de faire constamment germer de nouveaux conflits civils dans le pays. Il a ensuite demandé au monde d’apporter sa contribution à la mise en œuvre de l’accord de paix, de la même manière qu’il avait apporté son soutien aux pourparlers de paix.

Le difficile chemin de la paix

Khartoum a promis de respecter les accords conclus à l’issue des pourparlers de paix initiés il y a deux ans et qui ont pris fin dimanche, par la signature de l’accord de paix final. "L’accord de paix qui vient d’être conclu n’est pas un simple accord pour mettre fin à la guerre. Il représente un contrat en ce qui concerne le transfert du pouvoir, le partage du pays entre les populations soudanaises et le partage équitable des ressources", a encore expliqué le président soudanais.
Par ailleurs, M. Taha qui a dirigé la délégation gouvernementale aux négociations de paix, a rappelé le chemin difficile qu’il avait fallu parcourir pour arriver à ce dénouement heureux.
"De nombreuses collines ont été rasées et de nombreuses montagnes franchies, mais cela ne fut pas en vain. Ce jour marque la fin d’une longue période de négociations animées. Le gouvernement d’union nationale sera mis en place dans quelques semaines", s’est exclamé le vice-président Taha, devant quelque 20.000 ressortissants soudanais, rassemblés à Nairobi.


La paix rend possible l’exploitation du pétrole

La signature, dimanche, d’un accord de paix entre le gouvernement soudanais et l’Armée/Mouvement de libération du peuple soudanais (SPLA/M) annonce une nouvelle ère de paix en Afrique et une période de grandes opportunités économiques.
Pour le gouvernement sud-africain, la paix au Soudan représente une relance de la coopération économique qui, selon le président Thabo Mbeki, va promouvoir le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).
Des entreprises sud-africaines, conscientes des potentialités économiques massives de la région pétrolifère du Sud-Soudan, ont passé deux contrats importants pour le droit exclusif d’explorer les gisements pétroliers du pays.
Selon la presse sud-africaine, la compagnie nationale pétrolière sud-africaine, Petro SA, a récemment signé un accord avec la société nationale pétrolière soudanaise, Sudapet, pour les droits exclusifs sur le Bloc pétrolier 14 au Soudan, où l’exploration va bientôt démarrer.
La visite récente de M. Mbeki dans ce pays a contribué à accélérer la coopération économique entre les deux nations. Le ministère sud-africain des Affaires étrangères a déclaré que plusieurs firmes sud-africaines ont des intérêts économiques dans ce vaste pays, riche en ressources naturelles.


Le pétrole comme garantie

Suite à la signature de l’accord de paix, les autorités kenyanes estiment que l’implication active au Soudan de la communauté des bailleurs de fonds et le démarrage rapide des activités de reconstruction sont essentiels.
"On espère que la communauté internationale sera en mesure de se joindre au Sud-Soudan dans le cadre de la tâche essentielle consistant à réaliser la construction tant attendue des infrastructures du pays", a déclaré le ministre kenyan de la Planification et du Développement national.
Le projet de reconstruction de la ligne de chemin de fer de 2.500 km entre l’Ouganda, le Kenya et le Sud-Soudan, intéressant certaines des plus grandes sociétés de fabrication d’infrastructures ferroviaires d’Europe, devrait coûter environ 5 milliards de dollars.
La société allemande d’ingénierie ferroviaire, Thormaehlen Schweisstechnik Group, est le principal investisseur de ce projet. Mais le commissaire de la SPLA/M pour les Relations extérieures, Castello Garang Rign, a annoncé que son mouvement a obtenu une ligne de crédit du gouvernement allemand pour le financement de ce projet.
M. Ring a déclaré à la PANA que la SPLA/M négociait ce prêt avec le Trésor allemand en vertu de son contrôle des vastes ressources pétrolières du Sud après l’application des accords de paix. Le responsable de la SPLA/M a indiqué que le gouvernement allemand a été clair sur ce prêt de 300 millions d’euros pour ce projet ferroviaire, soulignant qu’il ne serait accordé qu’après la signature de l’accord, avec le pétrole comme garantie.
Les entreprises sud-africaines visent aussi la signature de contrats avec des entreprises soudanaises. Une de ces sociétés sud-africaines, Global Railway Engineering Consortium SA, aurait signé un contrat de réhabilitation du réseau ferroviaire avec la Sudanese Railway Corporation. Les deux compagnies ont signé le 9 décembre 2004 un contrat de 21 millions de dollars dans le cadre duquel le consortium sud-africain "devrait exploiter les énormes ressources naturelles du Sud-Soudan, qui ne l’étaient pas du fait de la guerre".


Crédits américains pour la reconstruction

Les États-Unis vont mobiliser les principaux bailleurs de fonds pour le déblocage de crédits destinés à la reconstruction du Soudan, a annoncé samedi, dans la capitale kenyane, le secrétaire d’État américain Colin Powell. Le gouvernement américain va aider le Soudan à reconstruire le pays, ravagé par des décennies de combats violents, a déclaré M. Powell.
Le secrétaire d’État américain a expliqué que la reconstruction des institutions sanitaires du Soudan, du réseau routier ainsi que la réhabilitation de toutes les infrastructures, nécessitaient une évaluation adéquate de la part des organisations donatrices. Le gouvernement américain a fait part de sa volonté de débloquer des crédits pour la reconstruction du Soudan.
Le Soudan a indiqué avoir besoin de 15 milliards de dollars pour fournir des services essentiels aux citoyens dans le Darfour, ravagé par la guerre, sur une période de trois ans et de 1,8 milliard de dollars supplémentaires pour relancer les projets de développement dans les secteurs de l’agriculture et des petites industries.
Avant de fixer le budget qui sera alloué au Soudan, Colin Powell a déclaré qu’avant toute chose, les États-Unis allaient d’abord consulter les donateurs appropriés comme l’Union européenne, les Nations unies et le Conseil de sécurité de l’ONU. "Les États-unis vont évaluer la situation en consultant les partenaires au développement pour voir ce que nous pouvons faire", a déclaré M. Powell à la presse à Nairobi, samedi.
"La signature de l’accord de paix n’est que le commencement de la paix. Il faut redonner espoir aux populations. Le travail qui nous attend sera motivant et difficile", a fait remarquer M. Powell. "Le succès de l’accord de paix doit se traduire par le rétablissement de l’ordre au Darfour, en mettant fin à la violence dans la région et en subvenant aux besoins essentiels des populations affectées", a souligné M. Powell.


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