Tianjin : catastrophe humaine et écologique sans précédent

17 août 2015, par @celinetabou

Le dernier bilan de la série d’explosions survenues le 14 août dans le port de Tianjin, dans l’est de la Chine, fait état de 112 morts, 95 disparus et plus de 700 blessés, selon les autorités locales. Les conséquences humaines et écologiques de cette catastrophe devraient à terme se répercuter sur l’économie du pays.

La chronologie de l’évènement a pu être établi, au lendemain des explosions, le 14 août. Ainsi, un incendie a été détecté vers 22h50 mercredi soir dans un entrepôt de matières chimiques dangereuses appartenant à la société Ruihai International Logistics.
Cet incendie a été le déclencheur, 40 minutes plus tard, de deux explosions puissantes, avant qu’une gigantesque boule de feu ne s’élève dans la nuit au-dessus des immeubles d’habitation. La seconde explosion, équivalente à 21 tonnes de TNT, a fracassé des milliers de vitres et fait pleuvoir une multitude d’aiguilles de verre sur les riverains.

Un bilan humain certainement plus lourd

Le bilan humain se concentre principalement dans le « nouveau district de Binhai », qui se situe à des dizaines de kilomètres du centre-ville, selon FranceTVInfo. Le directeur de l’Alliance française à Tianjin, Fabrice Plançon, a expliqué que « la déflagration a été énorme, mais ça s’est passé dans la nouvelle ville, à une trentaine de kilomètres du centre-ville historique. La plupart des Tianjinois n’ont rien ressenti ou vu. Il y a vraiment deux villes à Tianjin. »
Le district de Binhai est principalement habité par des ouvriers travaillant sur la plateforme logistique. Ainsi, les victimes sont certainement, outre les pompiers et les forces de police, « des ouvriers venus d’autres régions plus pauvres pour travailler à Tianjin » et qui dorment sur leur lieu de travail, a expliqué ce dernier à FranceTVInfo.
« Nous avons déjà identifié 24 corps. Nous devons en identifier 88 autres », a indiqué le directeur adjoint du service de la propagande de la ville de Tianjin. Parmi les personnes décédées figurent 21 pompiers selon les médias. De nombreuses familles de pompiers, toujours portés disparus, ont fait part de leur colère et leur incompréhension.
En effet, selon l’Agence France Presse sur place, depuis les déflagrations, plusieurs pompiers n’ont plus donné signe de vie. « Je n’ai plus aucune nouvelle de mon fils », a expliqué à l’agence Monsieur Liu. Son fils de 22 ans ferait partie des milliers de pompiers peu expérimentés envoyés sur le site.
De son côté, Madame Long, attend des nouvelles de son fils, Zhiqiao. Ce dernier appartient aux brigades qui ont gagné la zone portuaire avant même l’explosion : « Une brigade comprenait 25 personnes. Dans celle de mon fils, on a eu confirmation vendredi soir qu’il y avait un mort. Pour tous les autres, ils ne nous ont rien dit. Ils nous font simplement attendre encore et encore. »
En plus des pompiers, les forces de police ont compté de nombreux disparus. Cependant, selon un responsable d’un bureau de police - cité par des médias chinois -, des décès avérés n’ont pas été intégrés dans les bilans officiels. Laissant penser un bilan humain beaucoup plus important.

Présence confirmée de cyanure

La Chine, premier pays pollueur au monde, a entamé depuis quelques années une politique environnementale destinées à réduire ses émissions de gaz à effet de serre. En 2012, le gouvernement avait annoncé la fermeture de près de 3000 usines afin de lutter contre la pollution. Plusieurs mesures ont par la suite été mises en place, mais la question de la sécurité industrielle fait toujours défaut. Les réglementations sont souvent ignorées pour des raisons de rentabilité et les contrôles sont laxistes.
La catastrophe de Tianjin rappelle le décès d’une quinzaine de personnes, le mois dernier, lors de l’explosion d’un site illégal de stockage de feux d’artifice dans le Hebei (nord du pays). Où encore en 2014, la mort de 146 personnes dans l’explosion d’une usine de pièces automobiles à Kunshan, près de Shanghai.
Suite à ces explosions à répétition, le gouvernement vient de décider qu’il allait mener une campagne d’inspection des produits chimiques dangereux et explosifs à l‘échelle nationale. Les autorités souhaitent aussi renforcer les conditions de sécurité dans l’industrie.
Cependant, l’armée chinoise a confirmé ce dimanche 16 août, la présence de centaines de tonnes de cyanure hautement toxique, entreposées sur le site des explosions. Cette déclaration laisse craindre une contamination de grande ampleur. Le général Shi Luze, chef d’état-major de la région militaire de Pékin, a déclaré lors d’une conférence de presse, que du cyanure avait été identifié en deux endroits du site. « D’après les estimations préliminaires, le volume atteignait plusieurs centaines de tonnes », a-t-il dit.
Les médias chinois ont de leur côté indiqué qu’il y avait près de 700 tonnes de cyanure de sodium, composant chimique très toxique en cas d’inhalation, d’ingestion ou de contact avec la peau. Selon le Centre américain pour le contrôle des maladies, cité par l’AFP, le cyanure de sodium peut sous certaines conditions libérer du cyanure d’hydrogène. Il s’agit d’un « gaz hautement toxique asphyxiant qui agit sur la capacité de l’organisme à utiliser l’oxygène », et pouvant être « rapidement mortel ».

Des risques environnementaux en perspectives

Pékin tente de rassurer les habitants, assurant qu’en dépit de la présence de taux anormaux de certains polluants, l’air de Tianjin était respirable. Cependant, l’agence de presse Xinhua, a indiqué que la densité de cyanure dans les eaux usées était jeudi 13 août, 10,9 fois supérieure à la normale.
De son côté, Greenpeace a expliqué dimanche avoir testé les eaux de surface en quatre endroits de Tianjin, dont les niveaux de cyanure n’étaient pas élevés. « Cela montre que les réserves d’eau ne sont pas gravement contaminées », a indiqué l’ONG dans un communiqué. Cette dernière a toutefois précisé que ces tests ne révélaient rien la présence ou non d’autres produits dangereux, appelant à de nouveaux tests exhaustifs de l’air et de l’eau, dont les résultats doivent être rendus publics pour Greenpeace.
Malgré la volonté de rassurer les habitants, les autorités ont ordonné samedi 15 août l’évacuation d’habitants hébergés dans une école proche du site des explosions. Cette évacuation serait due au changement de direction du vent, laissant craindre une dispersion de particules toxiques.
Pour l’heure, les causes de cette catastrophe ne sont pas connues, et les autorités peinent à identifier précisément les substances chimiques entreposées sur le site. Le président chinois Xi Jinping a exhorté samedi les autorités à améliorer la sécurité des sites industriels et à tirer les leçons de cette catastrophe.
D’autant plus que « plusieurs médias affirment que la norme qui veut que les zones résidentielles soit à plus d’un kilomètre d’un site dangereux n’a pas été respectée », selon Les Echos.

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