L’ONU et le droit à l’alimentation

« Tout enfant qui meurt aujourd’hui de la faim meurt assassiné »

28 octobre 2006

Lors d’une conférence de presse donnée jeudi à New York, le rapporteur sur le droit à l’alimentation auprès des Nations Unies, Jean Ziegler, a estimé qu’en l’état des capacités de l’agriculture mondiale et de l’obligation d’assistance en droit international, tout enfant qui meurt de faim à l’heure actuelle meurt assassiné.

Le premier des huit Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), Réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour, ne sera jamais atteint, a affirmé Jean Ziegler, rapporteur spécial auprès Nations Unies sur le droit à l’alimentation.
Au contraire, le nombre de personnes qui souffrent de la faim ne fait qu’augmenter très rapidement, notamment en raison de la désertification, a-t-il souligné, lors d’une conférence de presse au siège de l’ONU, au lendemain de la présentation de son rapport à l’Assemblée générale. Le rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) 2005 souligne que 852 millions de personnes dans le monde souffrent de malnutrition chronique - soit un être humain sur six.

Un massacre silencieux

Un enfant de moins de 10 ans meurt de la faim toutes les cinq secondes et des centaines de milliers de personnes meurent de la faim ou de ses conséquences immédiates chaque jour.
Pourtant, selon le rapport, la production agricole actuelle pourrait sans problème fournir une nourriture suffisante, soit 2. 700 calories adultes par jour à 12 milliards d’habitants, soit le double de la population mondiale actuelle.
Il n’y a donc pas de fatalité à ce massacre silencieux. Un enfant qui meurt de faim aujourd’hui meurt assassiné, a dénoncé Jean Ziegler. Le nombre de personnes sous-alimentées s’est accru de 11 millions entre 2004 et 2005. Il ne se stabilise qu’au regard de l’évolution démographique, a-t-il précisé. Des progrès impressionnants ont été réalisés, par exemple au Brésil. Le président Lula a tenu ses promesses : en 4 ans, la sous-alimentation de près de 44 millions de Brésiliens a presque disparu, grâce à la bourse familiale qui profite à 31 millions de Brésiliens et au programme ’Faim zéro’, a-t-il rapporté.

Les oubliés du Darfour

Jean Ziegler a aussi cité l’initiative française rejointe par 15 pays, d’une taxe sur les billets d’avions. En fonction de la distance et de la classe, le passager paie de 6 à 15 euros en faveur d’un Fonds pour lutter contre le sida et la faim. Mais il y a eu de terribles défaites dans la lutte contre la faim, notamment la tragédie humanitaire au Darfour depuis février 2003, a-t-il encore dénoncé.
Près de 650.000 personnes sont mortes de cette guerre menée par le gouvernement islamique arabe de Khartoum contre les très anciens peuples du Darfour, un territoire grand comme la France, a- t-il accusé, estimant que 320.000 personnes étaient menacées de famine en septembre parce qu’ils n’étaient plus accessibles en raison de l’insécurité.
Jean Ziegler a dénoncé la paralysie de la communauté internationale malgré la résolution du Conseil de sécurité. Le gouvernement du Soudan a refusé les termes de cette résolution et malheureusement le Conseil de sécurité n’a pas le courage de poursuivre, en dépit du devoir d’assistance.
Ce principe est supérieur à la souveraineté des États, a-t-il insisté, plaidant pour que le Conseil de sécurité le mette en application. Le président des États-Unis parle de génocide, le Conseil de massacres, mais quelle que soit la qualification, il faudrait intervenir pour assurer l’assistance humanitaire.


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