Un monde qui manque de sagesse

2 janvier 2009, par Roger Orlu

Dans son numéro de décembre 2008 - janvier 2009, la revue “Philosophie Magazine” publie une « boîte à idées » dans laquelle six intellectuels français analysent la crise mondiale actuelle et tracent des voies pour en sortir. La plupart d’entre eux affirment que les causes de cette crise sont les fondements du système capitaliste, à savoir le pouvoir des détenteurs des moyens de production d’exploiter au maximum le monde du travail afin de réaliser toujours plus de profit. Un profit maximum et immédiat constamment recherché par les actionnaires et les spéculateurs de la finance, ce qui incite à faire consommer toujours plus et, finalement, à gaspiller toujours plus.
Certains de ces philosophes et autres experts plaident notamment pour une « autogestion démocratique » car, « économique, cette crise est aussi une crise de civilisation ». Ils demandent que l’on « mette en place de nouvelles réglementations » par les États, que ceux-ci « défendent les biens communs de l’humanité, le service public et la solidarité sociale » afin de « remettre l’Homme au centre du système et de ne faire de l’économie qu’un moyen à son service ».

« La crise d’un modèle »

Il se trouve que des philosophes réunionnais avaient pris conscience de la gravité de cette crise du capitalisme dès ses débuts. Ils ont donc organisé des conférences-débats à ce sujet à la suite de la célébration, le 20 novembre dernier, de la Journée Mondiale de la Philosophie à La Réunion sous l’égide de l’UNESCO. Ces conférences étaient animées par un jeune économiste réunionnais, Risham Badroudine, sur le thème : "La philosophie peut-elle contribuer à résoudre la crise mondiale actuelle ?".
Le conférencier a conclu son exposé par une question : « Cette crise n’est-elle pas finalement la crise d’un modèle ? Ce modèle qui met également en péril la pérennité écologique de la planète. Ce modèle où l’Homme n’a toujours pas trouvé la solution pour faire partager à tous les fruits du progrès ».
Et d’ajouter : « Quel est donc le modèle harmonieux pour la société ? Plus on s’intègre dans le modèle actuel, plus on partage les joies mais aussi le revers de ce modèle. Il arrive un moment où le revers devient supérieur aux joies. Il est donc nécessaire de mettre en place des expérimentations pour déboucher sur un système plus équitable et viable ».

« Une leçon de liberté et de responsabilité »

Lors de ces conférences, un jeune philosophe réunionnais, Bernard Pitou, a également apporté son éclairage : « La philosophie, s’appuyant sur la seule raison, nous enseigne que nous sommes au bord du gouffre, mais que nous avons encore les moyens de changer la trajectoire de la course, à condition de le vouloir ; qu’il ne faut donc pas tomber dans le fatalisme, que ce sont les humains qui sont acteurs de l’histoire et non de simples sujets. Elle nous donne une leçon de liberté et de responsabilité ».
La philosophie, au sens étymologique, signifie “l’amour de la sagesse” (1). Si les citoyens s’adonnent à cette pratique, elle ne peut que contribuer à transformer ce monde. En effet, celui-ci est piégé : les humains y sont condamnés à mort par le non-sens, l’irrationalité et par la criminalité des dominants envers les plus pauvres. Nous vivons dans un monde qui manque de sagesse. La philosophie nous invite donc à nous rebeller contre un tel contexte et mode de vie.

Roger Orlu

*
Envoyez vos critiques, remarques et contributions afin que nous philosophions ensemble...! [email protected]

(1)
En grec, “philein” signifie “aimer” et “sophia” signifie “sagesse”.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus