SPECIAL NOUVEAU TRAITÉ EUROPÉEN - NOUS VOULONS UN REFERENDUM

Un traité marqué de bout en bout par le néolibéralisme

7 janvier 2008

Rendu public fin juillet, le “traité modificatif européen” n’a rien du “traité simplifié” promis par Nicolas Sarkozy. Comprenant plusieurs centaines de pages, avec protocoles et projets de déclarations, il devrait être adopté les 18 et 19 octobre par un Conseil européen. En deux mois à peine, tout serait bouclé. La rapidité avec laquelle cette affaire va être bâclée en dit long sur la conception de l’Europe et de la démocratie qui anime les dirigeants européens. Nous assistons à la manifestation d’une volonté d’exclure les citoyens européens de tout débat sur l’avenir de l’Union. Visiblement le double non français et néerlandais au Traité constitutionnel européen (TCE) a à ce point effrayé les dirigeants européens qu’ils ne veulent plus prendre le moindre risque : tout doit être fait très vite pour prendre de vitesse une éventuelle réaction citoyenne.
(...) Le principe de concurrence reste présent dans nombre d’articles des traités. Citons par exemple l’article 105, maintenu dans le futur traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui réaffirme « le principe d’une économie de marché ouverte où la concurrence est libre ». De plus, pour éviter toute fausse interprétation, le protocole numéro 6 indique : « Le marché intérieur tel qu’il est défini à l’article (I-3) du traité sur l’Union européenne comprend un système garantissant que la concurrence n’est pas faussée. » L’article (I-3) porte sur les objectifs de l’Union. C’est ainsi que la concurrence non faussée est réintroduite dans les objectifs de l’Union d’où elle semblait avoir disparu. Le droit de la concurrence restera donc le droit organisateur de l’Union, un droit normatif, qui réduit la plupart du temps les autres textes européens à être des déclarations d’intention sans portée opérationnelle pratique.
La charte des droits fondamentaux sera « juridiquement contraignante ». Tout le problème est de savoir jusqu’à quel point. En effet, les droits sociaux qui y sont contenus sont de très faible portée. Ainsi, par exemple, le droit au travail et à l’emploi n’existe pas et seul apparaît le “droit de travailler”. Mais surtout, pour l’essentiel, l’application des droits contenus dans cette charte est renvoyée aux « pratiques et législations nationales ». Cette charte ne crée donc pas fondamentalement de droit social européen susceptible de rééquilibrer le droit de la concurrence qui restera dominant à l’échelle européenne.
Malgré toutes ces précautions, ce texte est encore de trop pour certains gouvernements. Le Royaume-Uni a obtenu d’en être dispensé et la Pologne et l’Irlande envisagent de faire de même. Ainsi, les droits sociaux au niveau européen, même réduits à portion congrue, ne sont pas obligatoires au même titre que les règles du marché intérieur. Le social serait donc en option et la concurrence obligatoire. C’est l’officialisation du dumping social.
On pourrait continuer à multiplier les exemples qui confirment que ce texte ne fait que transférer dans les traités actuels le contenu néolibéral du TCE. Les raisons de fond du rejet du TCE demeurent donc pour ce nouveau traité, marqué de bout en bout par le néolibéralisme, tant dans les principes qu’il promeut que dans les politiques qu’il prône. Comme l’a dit crûment Valéry Giscard d’Estaing : « Les gouvernements européens se sont ainsi mis d’accord sur des changements cosmétiques à la Constitution pour qu’elle soit plus facile à avaler. » Eh bien, refusons d’avaler, en commençant par exiger du président de la République la tenue d’un référendum. Le TCE a été rejeté par un référendum. Le « traité modificatif » qui reprend l’essentiel de celui-ci doit être soumis directement au vote des citoyens par référendum.

Pierre Khalfa,
Secrétaire National de l’Union syndicale Solidaires,
Membre du Conseil Scientifique d’ATTAC


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