Après le référendum

Une implosion du P.S. ?

11 avril 2005

Au vu des sondages qui se succèdent, une victoire du “non” est de plus en plus possible le 29 mai prochain. Elle aurait pour principale conséquence d’accentuer les divisions au sein du Parti socialiste et de l’affaiblir en vue de la présidentielle de 2007. Le piège tendu par Jacques Chirac, qui a décidé d’organiser un référendum sur le projet de Constitution européenne, pourrait bien se refermer sur le PS.

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Sondage après sondage, le “non” apparaît toujours comme l’emportant le 29 mai prochain. D’ici là, la tendance pourrait-elle se renverser ? L’intervention que doit faire le chef de l’État sur la télévision du service public ne semble pas être en mesure de bouleverser profondément les données.
Pour le référendum sur le Traité de Maastricht, François Mitterrand avait affronté lors d’un débat télévisé, Philippe Séguin, partisan du “non”. Jacques Chirac, lui, dialoguera avec de jeunes interlocuteurs. Sans doute pour fournir un travail pédagogique d’explication et non pour faire réellement campagne. Le Président de la République s’attachera vraisemblablement à ne pas trop lier son nom à un vote en faveur du “oui”.

Changement de discours au PS

Des attitudes, des déclarations de partisans du “oui” montrent qu’ils commencent à accepter une victoire du “non” et qu’ils se préparent à une telle éventualité.
Invité d’un débat sur France 2 la semaine dernière, le secrétaire national des Verts dont le parti appelle à voter “oui” admet que le texte constitutionnel donne à boire et à manger et qu’il contient tout et son contraire. À ses yeux, l’essentiel est d’avancer dans le processus de construction européenne tout en se battant pour réaliser une Europe plus sociale, plus verte.
Plusieurs dirigeants socialistes ont, quant à eux, changé de discours. Ils n’évoquent plus une victoire du “non” comme un chaos ou une catastrophe. Ils reconnaissent qu’il faudra, dans cette éventualité, discuter pour trouver les moyens d’une Europe plus sociale. On verra dans les semaines qui viennent, si les dirigeants de la fédération locale continuent, à l’image d’un Jean-Claude Fruteau, de diaboliser le “non”.

Une majorité d’électeurs socialistes pour le “non”

S’il y a un parti qui a le plus à perdre avec une défaite du “oui”, c’est bien le Parti Socialiste. Il s’est profondément divisé sur le référendum. Sa direction n’a pas pu faire taire les partisans du “non”. D’Henri Emmanuelli à Laurent Fabius en passant par Marc Dolez, Arnaud Montebourg ou Jean-Luc Mélenchon, chacun a trouvé la voie et le moyen propre à s’exprimer.
Fait beaucoup plus grave : les sondages montrent que, bravant les consignes de leur direction, une majorité d’électeurs socialistes s’apprêtent à voter “non”.
Une défaite du “oui” porterait plus de conséquences pour le PS que pour l’UMP et le camp présidentiel. N’ayant pas l’intention de faire du référendum un plébiscite, Jacques Chirac ne démissionnerait pas. Jouant le rôle de fusible et de bouc émissaire, Jean-Pierre Raffarin quitterait son poste de Premier ministre et serait remplacé.

Jospin se prépare

Par contre au PS, désavoué, François Hollande ne pourrait rester Premier secrétaire. Dans la foulée il devrait abandonner l’ambition de représenter son parti à la présidentielle de 2007. La lutte entre les candidats potentiels sera plus vive.
On annonce même le retour d’un Lionel Jospin, qui donne l’impression de se préparer à cela. Un Parti socialiste sortant grand battu du référendum, contesté sur sa gauche et déchiré sur le plan interne aura bien du mal à affronter la présidentielle de 2007.

Sarkozy à la place de Le Pen

En laissant entendre qu’un dirigeant de l’UMP - en fait lui-même - pourrait être candidat face à Jacques Chirac si ce dernier se représentait, Nicolas Sarkozy fait le calcul que le PS pourrait se retrouver en grandes difficultés dès le 29 au soir et que son candidat à la présidentielle de 2007 sera éliminé du deuxième tour. Il rêve de rééditer en quelque sorte le coup de 2001 mais, lui, Nicolas Sarkozy, prenant la place de Jean-Marie Le Pen affronter au second tour l’actuel locataire de l’Élysée.
Le piège que ce dernier a tendu, en décidant d’organiser un référendum sur la Constitution - et non en demandant une ratification par la consultation du Parlement réuni en Congrès - se refermerait bien sur le Parti Socialiste. Lequel y aurait foncé tête baissée.

J. M.


Sondages sur le référendum

Le “non” s’installe

Les derniers sondages indiquent que le “non” reste en tête, même si la mort du Pape favoriserait un mouvement d’adhésion au projet européen. L’impopularité de Jean-Pierre Raffarin - qui a décidé de prendre la tête de la campagne - joue contre le “oui”, tandis qu’une majorité d’électeurs socialistes, désapprouvant leur direction, se prononcent contre le projet de Constitution.

Les sondages d’opinion sur le référendum se succèdent et se multiplient au point où il devient difficile de les suivre tous. Mais tous ont un point commun : ils montrent que le “non” s’accroche et reste en tête. Même si, d’un sondage à l’autre, les chiffres sont différents et les enseignements qu’on en tire divergent.
D’après le sondage Ipsos-Le Figaro-Europe 1, réalisé les 1er et 2 avril, le “non” reste majoritaire et stable à 52% en raison essentiellement de la force du “non de gauche”. La surprise vient cependant des électeurs socialistes qui se prononcent à 53% contre la Constitution européenne.
Le sondage réalisé par Louis-Harris pour Libération-Yahoo ! et i-télé les mêmes jours donnent des résultats légèrement différents : 54 % des électeurs auraient l’intention de rejeter la constitution européenne. "Alors que l’UMP et le PS ont entrepris, chacun de leur côté, de faire donner l’artillerie lourde de la campagne du “oui”, cette nouvelle enquête confirme le basculement de l’opinion déjà enregistré mi-mars", écrit “Libération”. "En attendant l’intervention de Jacques Chirac repoussée au 14 avril pour cause de décès du pape, l’entrée en lice des ténors du “oui” la semaine dernière n’a manifestement pas permis de stopper cette dynamique", ajoute le quotidien parisien.
Dans ce contexte, l’image de Jean-Pierre Raffarin pèse lourdement en défaveur du “oui”. La cote de confiance du Premier ministre vient de perdre encore 7 points. "À deux mois du référendum, tout se passe comme si les interventions de Jean-Pierre Raffarin ne faisaient que faire grossir le camp du non", écrit “Libération”, qui constate par ailleurs que "François Hollande sort lui aussi “plutôt affaibli” de ce début de campagne. Le numéro un du PS paie son incapacité à garantir un minimum de cohérence au sein de son parti".


54% des patrons des très petites entreprises voteraient "non"

Environ 54% des patrons des très petites entreprises (TPE, moins de 20 salariés) voteraient "non" au Traité constitutionnel européen, tandis que 46% voteraient "oui", selon le baromètre trimestriel Ifop/Fiducial, rendu public mercredi dernier.

Selon cette enquête, signalée la semaine dernière par l’Agence France Presse, 25% de ces patrons ne se prononcent pas.
Les chefs d’entreprise les plus opposés au Traité sont les artisans, dont 71% voteraient "non", les dirigeants d’entreprises du BTP (70%), les commerçants (66%), les entreprises unipersonnelles (60%) et les patrons les plus âgés (55%).
La situation économique et sociale en France, la crainte d’une Europe trop libérale et le débat sur l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne comptent "beaucoup" dans le vote des partisans du "non" pour respectivement 50%, 46% et 39% d’entre eux.
Interrogés comme tous les trimestres sur leur confiance vis-à-vis du gouvernement, les patrons de TPE sont 21% à dire que les actions du gouvernement leur inspirent confiance, contre 20% en janvier 2005 et 30% en octobre 2004.


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