L’indignation sélective des dirigeants occidentaux

Koweit : la France vend pour 1 milliard d’euros d’armes à un pays en guerre

11 août 2016

L’industrie militaire française a annoncé la commande de 30 hélicoptères signée avec le Koweit. Ces armes serviront à faire la guerre au Yemen, car le Koweit est engagé aux côtés de l’Arabie Saoudite dans un conflit visant à renverser le gouvernement de ce pays. Des milliers de personnes sont mortes. Par ailleurs, le Koweit est un pays où les droits humains ne sont pas respectés. C’est ce que rappelle Amnesty International. Voici un extrait de son rapport à ce sujet.

Les autorités ont renforcé les restrictions à la liberté d’expression, notamment en adoptant une nouvelle loi en matière de cybercriminalité et en engageant des poursuites pénales contre des membres de l’opposition et des détracteurs du gouvernement qui s’exprimaient sur Internet. Une loi obligeant tous les citoyens et les résidents à fournir des échantillons de leur ADN pour des motifs liés à la lutte contre le terrorisme a également été adoptée. Des membres de la minorité bidun (Arabes apatrides) faisaient l’objet de discriminations et étaient privés des droits relatifs à la citoyenneté. Les travailleurs étrangers n’étaient pas suffisamment protégés contre l’exploitation et les traitements abusifs. Cette année encore, des tribunaux ont prononcé des condamnations à mort ; aucune exécution n’a été signalée.

Contexte

Le 26 juin, 27 personnes ont trouvé la mort et plus de 220 autres ont été blessées dans un attentat-suicide contre la mosquée de l’imam Sadiq, une mosquée chiite de Koweït. Il s’agissait de l’attentat-suicide le plus meurtrier à ce jour.

Le Koweït a rejoint en mars la coalition internationale dirigée par l’Arabie saoudite qui participait au conflit armé au Yémen (voir Yémen).

Le gouvernement a accepté en juin 179 recommandations présentées dans le cadre de l’Examen périodique universel de l’ONU, dont neuf concernant la liberté d’expression. Il en a rejeté 71 autres, notamment celles relatives aux droits des bidun ainsi que celles qui préconisaient l’abolition de la peine de mort.

Liberté d’expression et de réunion

Cette année encore, les autorités ont restreint le droit à la liberté d’expression et engagé des poursuites contre des détracteurs du gouvernement et des militants sur Internet aux termes de dispositions du Code pénal érigeant en infraction le fait de tenir des propos jugés insultants envers l’émir, le système judiciaire et les dirigeants étrangers. Le Parlement a adopté, en juin, une loi relative à la cybercriminalité qui érigeait en infraction et restreignait davantage l’expression sur Internet. Ce texte, qui devait entrer en vigueur en janvier 2016, a étendu les interdictions figurant dans la législation existante pour y inclure l’expression en ligne, et notamment les réseaux sociaux et les blogs.

Des personnes ont fait l’objet de poursuites pour insulte sur les réseaux sociaux contre des dirigeants arabes, dont le défunt roi Abdallah d’Arabie saoudite.

Un tribunal a condamné en janvier Abdulhakim al Fadhli, militant des droits des bidun, à un an d’emprisonnement suivi de son expulsion. Les charges étaient liées à sa participation, en février 2014, à un rassemblement organisé pour le troisième anniversaire d’une manifestation réclamant l’octroi de la nationalité koweïtienne aux bidun. Sa peine a été maintenue en appel en décembre. Cet homme a également été condamné à une peine distincte de cinq ans d’emprisonnement assortie d’une ordonnance d’expulsion, après avoir été déclaré coupable d’avoir insulté l’émir, endommagé un véhicule de police et participé à une manifestation illégale.

En mars, le militant des droits humains Nawaf al Hendal a été arrêté et battu par des policiers alors qu’il observait une manifestation pacifique de l’opposition. Détenu pendant deux jours, il a ensuite été inculpé de « rassemblement illégal ».

L’ancien député Musallam al Barrak, détracteur bien connu du gouvernement, a commencé en juin à purger une peine de deux ans d’emprisonnement. Il avait été condamné en avril 2013 à cinq ans d’emprisonnement pour avoir critiqué le gouvernement dans un discours ; sa peine avait été réduite en appel. Plus de 60 personnes qui avaient protesté contre son arrestation en faisant circuler son discours et en en récitant des extraits ont également fait l’objet de poursuites ; deux ont été condamnées à une peine d’emprisonnement ferme et 21 autres à des peines assorties du sursis.

En juillet, des procureurs ont interrogé 13 personnes à propos de discussions sur le réseau social WhatsApp concernant un enregistrement vidéo réalisé en 2014 sur lequel on pouvait voir des membres importants du gouvernement qui préconisaient l’éviction de l’émir. Ces 13 personnes, parmi lesquelles figuraient des membres de la famille régnante, ont été laissées en liberté sous caution avec interdiction de quitter le Koweït ; leur procès était en cours à la fin de l’année.

Déchéance de la nationalité

En avril, les autorités ont arrêté Saad al Ajmi, militant politique et conseiller de l’ancien député Musallam al Barrak (voir plus haut), et l’ont expulsé vers l’Arabie saoudite en affirmant qu’il était de nationalité saoudienne, ce qu’il a nié.

En mai, la Cour d’appel administrative a ordonné au gouvernement de rétablir dans sa citoyenneté koweïtienne Abdullah Hashr al Barghash, un ancien député qui avait été déchu de sa nationalité en juillet 2014. Le gouvernement a interjeté appel de cette décision. La Cour administrative d’appel s’est déclarée incompétente en novembre.

Discrimination – les bidun

Plus de 100 000 bidun, Arabes apatrides résidant au Koweït, continuaient d’être privés de la nationalité koweïtienne. Le gouvernement les considérait comme des résidents illégaux. Les militants des droits des bidun étaient en butte à des arrestations et des poursuites judiciaires. Deux jours après l’attentat perpétré en juin contre une mosquée, pour lequel 13 bidun ont été arrêtés, les autorités ont cessé de délivrer des documents de voyage aux bidun, hormis ceux qui devaient recevoir des soins médicaux à l’étranger.

Dans un mémorandum remis en août au Parlement, le Système central du gouvernement pour résoudre le statut des résidents illégaux, organisme qui s’occupe de la question des bidun au Koweït, a indiqué que la naturalisation de 31 189 bidun enregistrés dans le recensement de 1965 utilisé par le gouvernement pour déterminer la citoyenneté ne devait pas être systématique. Le Système central a affirmé que d’autres facteurs, comme la sécurité, devaient être pris en compte lors de l’examen de leur droit à la nationalité koweïtienne. Ceci ajoutait un obstacle supplémentaire à l’obtention par les bidun de la nationalité koweïtienne.

Droits des femmes

Les Koweïtiennes avaient le droit de voter et de se présenter aux élections, mais elles faisaient toujours l’objet de discriminations dans la législation et dans la pratique. En particulier, la loi leur reconnaissait des droits inférieurs à ceux des hommes pour les affaires familiales, entre autres en matière de divorce, de garde des enfants et d’héritage.

Droits des travailleurs migrants

Les travailleurs migrants, notamment les employés de maison et ceux qui travaillaient dans le secteur de la construction, étaient exploités et maltraités. Le Parlement a adopté en juin une loi qui accordait pour la première fois aux employés de maison, pour la plupart des femmes, des droits dans le domaine du travail – à savoir un jour de repos par semaine, 30 jours de congés payés par an et une indemnité de fin de contrat équivalant à un mois de salaire par année travaillée.

Peine de mort

Quinze personnes au moins ont été condamnées à mort, dont cinq par contumace. Aucune exécution n’a été signalée.

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