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par le Dr Raymond Vergès

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« La capacité de résistance des Irakiens a été anéantie par des décennies de souffrance »

Irak

Après l’arrivée des troupes anglo-américaines à Bagdad

vendredi 11 avril 2003


Presque pas de coups de feu, pas d’uniformes gris ou noirs en vue, pas de conférence de presse du ministre de l’information. Mercredi, la ’bataille de Bagdad’, rue après rue, immeuble après immeuble, prévue des jours voire des semaines par de nombreux observateurs est apparemment finie avant même d’avoir véritablement commencée. La résistance irakienne s’est apparemment évanouie. Mais a-t-elle vraiment existé, s’interroge RFI, en dehors des prévisions erronées de nombreux experts, surtout en Europe ? Nous reproduisons ci-après un article de RFI qui analyse cette situation.


Comme lors de la première guerre du Golfe, les différents corps de l’armée de Saddam en charge de la défense de la capitale ont disparu du champ de bataille dès les premiers vrais affrontements. En 1991, pour expliquer pourquoi l’armée irakienne avait été facilement repoussée du Koweït, on avait souvent évoqué le fait que cette armée ne pouvait être « motivée » sur une terre étrangère. Et qu’il fallait donc s’attendre à des véritables « batailles de rue », notamment à Bagdad, dès que les premiers marines auraient foulé le sol irakien. Certains prévoyait pour la capitale irakienne une « résistance comme à Stalingrad ». D’autres parlaient du sort peu enviable de Grozny ou Berlin, deux villes rasées au sol lors de leur chute. La propagande de Saddam égrenait quant à elle de nombreux "volontaires arabes" et plus de 4000 kamikaze.

Apparemment, c’est l’exact contraire qui s’est passé. Juste quelques combats, pour l’essentiel de la part de membres de la Garde républicaine et de certains « feddayin » de Saddam Hussein, avant qu’ils ne prennent à leur tour la fuite. Le "peuple de Bagdad" n’a offert aucune résistance aux « envahisseurs ». Il s’est d’abord terré chez lui, et il a payé un tribut assez lourd à une guerre qui n’était visiblement pas la sienne. Avant de sortir pour accueillir l’armée américaine et piller les bâtiments publics, symbole du régime dictatorial de Saddam Hussein. En réalité, sa « capacité de résistance avait été anéantie par des décennies de souffrance », selon Brahim Haïdar, un Sénégalais d’origine libanaise.

Des incertitudes

Bien entendu, Bagdad avait été minutieusement "préparée" par une longue campagne de bombardements, le plus souvent très ciblés, qui ont évidemment découragé toute riposte massive. Il demeure néanmoins que les troupes américaines ont pris Bagdad en quelques heures seulement, après y être entrées plutôt facilement. Les forces d’élite de Saddam n’étaient visiblement plus là. À commencer par la fameuse Garde républicaine.
Cette fois-ci, les 60.000 hommes de la Garde républicaine, ou les 15.000 qui composent la Garde républicaine spéciale, ont choisi de ne pas se battre. Un certain nombre avaient déjà été tués ou faits prisonniers ces derniers jours. D’autres se sont sans doute dispersés, ce qui inquiète déjà ceux qui ont la charge de l’après-guerre. Si l’on croit des sources militaire américaines, au moins trois brigades de la Garde républicaine - soit environ 7.500 hommes - n’ont pas été touchées par les combats et demeurent une force réelle de combat. Peut-être sont-elles dans la région de Tikrit, la ville natale de Saddam Hussein.
Il en est peut-être de même d’une autre unité très discrète : les 5.000 membres de la Sécurité spéciale, un corps considéré comme le plus fidèle au dictateur irakien, lui aussi très bien équipé, et qui devrait assurer la dernière défense de Saddam Hussein, et qui très probablement restera à ses côtés jusqu’à la fin. Autre inconnue de taille : le sort réel des « Feddayn » de Saddam, un corps paramilitaire engagé le plus souvent dans des opérations de police et qui compterait au moins 20.000 hommes (40 000, selon certaines sources occidentales).

Armée coupée du peuple

Une chose semble sure : « les structures de commandement et de contrôle du régime irakien semblent s’être effondrées », à Bagdad, a déclaré un porte-parole britannique mercredi matin, avant de rappeler qu’une « résistance acharnée et féroce » était toujours signalée par endroits. La tactique souvent attribuée à Saddam Hussein consistant à attirer les troupes américaines dans la capitale, pour livrer une dernière « grande bataille » de guérilla urbaine censée provoquer un « massacre des envahisseurs » a fait long feu. Le dernier échec militaire de Saddam Hussein ressemble aux précédents.

« Les Irakiens ont tenté de nous ralentir, mais ils n’ont pas arrêté notre progression. Nous agissons ici de la même manière que lors des autres batailles depuis le début de la guerre », a dit un officier américain à propos de la « bataille de Bagdad ». Et un autre de préciser : « Il n’y a plus de commandement depuis le sommet. Nous avons détruit cela. Les forces irakiennes agissent donc de leur propre initiative », et ne disposent plus que d’armes légères et d’armes anti-chars. Ceci pourrait signifier qu’un certain degré de guérilla peut se poursuivre.
« Il y aura une frange de combattants incontrôlables. Ils continueront à combattre. Ce ne sera pas cohérent, mais ce seront des attaques d’opportunité », selon un autre officier, ces attaques pourraient être menées par des jusqu’au-boutistes, vraisemblablement des volontaires égyptiens, soudanais, tunisiens, algériens ou syriens. Si tel était le cas, cela prouverait une dernière fois - et de façon tragique - que l’armée de Saddam Hussein ne bénéficiait désormais d’aucun soutien de la part du peuple irakien, tout simplement parce qu’elle avait perdu depuis longtemps toute légitimité.

La majorité du Conseil de sécurité « veut avoir un rôle politique » en Irak
Une majorité des membres du Conseil de sécurité sont en désaccord avec le rôle des Nations unies dans la reconstruction de l’Irak envisagé par le président américain George W. Bush et le Premier ministre anglais Tony Blair.
Après une réunion informelle du Conseil de sécurité qui s’est tenue tard mercredi soir à la mission britannique auprès des Nations Unies, l’ambassadeur chilien Gabriel Valdes a assuré que la majorité des membres du Conseil souhaitent que l’ONU joue un rôle politique important.
Certains États souhaitent une grande conférence internationale, sur le modèle de celle qui avait permis d’établir un pouvoir de transition en Afghanistan. Cette proposition n’a été écartée ni par les États-Unis ni par la Grande-Bretagne, selon d’autres diplomates qui ont tenu à conserver l’anonymat.

George W. Bush et Tony Blair avaient affirmé mardi vouloir conférer un rôle « fondamental », à l’ONU pour la reconstruction de l’Irak, tout en évoquant des missions limitées. George Bush avait ainsi déclaré que l’ONU pourrait fournir une assistance humanitaire au pays, réunir des fonds pour la reconstruction et faire des suggestions pour la formation d’un gouvernement de transition. Rien qui s’approche du large mandat souhaité par d’autres membres de l’ONU.

« Je pense que quelques différences tiennent à la façon dont est défini le rôle des Nations unies dans la déclaration elle-même », a commenté l’ambassadeur chilien en ajoutant que « la majorité du Conseil veut avoir un rôle politique ».


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