Des conséquences importantes pour l’Europe

La Libye au bord de la guerre civile

23 février 2011, par Céline Tabou

La révolte populaire de Libye découle des évènements qui se sont déroulés dans deux pays voisins, la Tunisie et l’Égypte. Cependant, Mouammar Khadafi n’est pas prêt à se faire déloger, et le contexte est bien différent des pays voisins. La Libye est en effet le maillon fort de la stratégie européenne de lutte contre les migrants chassés de leur pays par la pauvreté et le changement climatique.

La Libye est en crise, c’est une situation de guerre civile, bien différente de l’Égypte ou la Tunisie. En effet, la Libye est le second producteur de pétrole du monde, et un frein à la migration africaine vers l’Union européenne. La position stratégique de Khadafi lui confère une autorité, et des soutiens de poids qui lui éviteront de s’exiler comme Ben Ali, ou d’être déchu comme Hosni Moubarak.

Répression sanglante

Au huitième jour du soulèvement, la répression a fait plus de 400 morts et des centaines de blessés, selon l’estimation fournie mardi par le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme (HCDH). Mouammar Khadafi a fait usage de tanks, hélicoptères et avions de guerre pour mater la révolte grandissante dans le pays. Face à cette riposte sanglante, de nombreux hauts responsables libyens, ministres, diplomates, militaires ont démissionné ou fait défection au régime de Kadhafi afin de marquer leur opposition aux méthodes utilisées par ce dernier.
Face à ces répressions, la communauté internationale a dénoncé de « graves violations du droit humanitaire international », par la voix du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon. De son côté, l’OTAN a réclamé la fin des répressions et plus de démocratie. Le secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a déclaré, mardi 22 février : « J’appelle les autorités libyennes à cesser la répression contre des civils non armés », et s’est dit « choqué par l’usage aveugle de la violence contre des manifestants pacifiques » en Lybie. Cette déclaration a été suivie par un communiqué du gouvernement cubain, qui a fustigé le gouvernement américain, avide des ressources pétrolières libyennes. Dans un communiqué, Fidel Castro a indiqué que « l’administration étasunienne se fiche bien de la paix en Libye et qu’elle n’hésitera pas à donner l’ordre à l’OTAN d’envahir ce riche pays, peut-être même dans quelques heures ou quelques jours ».

Khadafi essaie de s’allier les tribus

À la différence des pays unifiés d’Afrique du Nord, la Libye est composée de plusieurs tribus, dont les penchants vis-à-vis de Khadafi varient d’une tribu à une autre. Les représentants de différentes tribus ont violemment réagi à la répression sanglante des manifestations, notamment la tribu Al-Warfala, l’une des plus importantes du pays avec près d’un million de membres, a appelé la population à s’opposer au régime. Le second clan du pays, les Touaregs, qui comptent près de 500.000 personnes, en a fait de même. Le dirigeant de la tribu Al Zouaya, Faradj al-Zouway, a également menacé de couper les exportations de pétrole vers les pays occidentaux si les violences ne cessaient pas dans les vingt-quatre heures, a relaté le quotidien suisse "Le Temps". Le pays est particulièrement concerné par la situation en Lybie, car les autorités suisses dépendent en grande partie du pétrole libyen.
Voulant manipuler les différentes tribus, le fils de Khadafi, Saïf al-Islam a annoncé à la télévision nationale « la menace des divisions claniques. La Libye est une société de clans et de tribus, dit-il. Cela pourrait causer des guerres civiles ». Ce dernier a affirmé que le gouvernement resterait en place coute que coute, et que la répression perdurera, « le régime se battrait jusqu’au dernier homme pour se maintenir en place », a indiqué “Le Temps”.

L’allié stratégique des Européens

La révolte libyenne pourrait avoir des conséquences sur la migration africaine vers l’Europe. En effet, l’Italie, l’Espagne, le Portugal pourraient subir l’arrivée massive de migrants venus ou transitant des pays en pleine révolution (Tunisie, Égypte, Maroc, Algérie, Libye…). Actuellement en plein repli sur eux-mêmes et embourbés dans leurs difficultés économiques, ces pays n’ont pas la capacité d’intégrer les migrants, ni de gérer financièrement leur retour.
Alors que la Suisse espère que la situation se résolve avant que les prix du pétrole ne s’envolent, et que certaines tribus décident de couper les pompes, certains membres de l’Union européenne craignent que la migration africaine ne soit plus contenue par les autorités libyennes.
Hormis la Suisse, la France, l’Allemagne et l’Espagne sont des clients du pétrole libyen. La France importe environ 130.000 barils par jour, pour une consommation d’environ 2 millions quotidiennement, soit 6,5%, a expliqué le magazine "L’Expansion". En effet, la société Total exploite deux grands champs en Libye, dont l’un d’eux est susceptible d’être la cible des manifestants.
À La Réunion également, des questions se posent sur les conséquences. La compagnie pétrolière Tamoil opère dans notre île. 35% de son capital est détenu par la Libye.

Céline Tabou

Libye

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