Elias Sanbar. Palestine-Israël : le piège du diktat américain - 2 -

« La solution idéale, un État binational laïque et démocratique, un État de tous ses citoyens »

14 janvier 2009

Dans la suite de son interview à ’l’Humanité’, le représentant de la Palestine à l’UNESCO revient plus en détail sur l’attitude des puissances occidentales dans le conflit.

Il y avait aussi l’impression, alors très forte, que l’Autorité ne protégeait pas les citoyens contre les exactions d’Israël, qu’elles viennent de l’armée ou des colons.
- Elias Sanbar. En fait, le problème fondamental, c’est qu’il est difficile d’être occupé et de négocier en même temps avec l’occupant. C’est un cas complètement fou. Si tu es occupé, tu dois t’opposer à l’occupant, et en même temps, tu négocies avec lui. (...) Il y a des critiques acerbes contre le gouvernement actuel qui est pourtant très bon. Pour la première fois, nous avons des finances rationnelles. 57% du budget va à Gaza. Pas un salaire ne reste impayé. Personne ne le dit. Les assurances médicales sont payées. On n’avait jamais eu ça avant. Le ministère de l’Éducation marche très bien, avec une excellente ministre qui était, auparavant, responsable à l’UNRWA.
La sécurité s’améliore en Cisjordanie, aussi paradoxal que cela paraisse. À Naplouse et Jenine, la police palestinienne, désormais unifiée, a repris les choses en main. Tout cela n’apparaît pas, car il y a trop de paradoxes. Celui d’être occupé en même temps que négociateur. Celui d’un Fatah qui se saborde alors que les islamistes montent. Celui d’une Amérique qui négocie pour tout bloquer. Et enfin celui d’une Europe qui n’ose pas forcer la porte alors qu’elle en a les moyens. C’est elle qui paie le plus, mais accepte de n’avoir rien à dire !

C’est pire que cela, avec la décision annoncée la semaine dernière (mi-décembre-NDLR), sous présidence française, de hausser le statut des relations de l’UE avec Israël.
- La décision de Bernard Kouchner est absolument incompréhensible. Il a suffi qu’il voie Tzipi Livni cinq minutes en tête-à-tête, il est sorti et a annoncé cela. Alors que les députés européens avaient voté dans le sens contraire quelques jours plus tôt. C’est très inquiétant.

Est-ce que cela vaut la peine de continuer ce jeu de dupes ? Certains, comme Sarih Nusseibeh, disent qu’il faut tout reprendre à zéro. Dissoudre l’Autorité, remettre la responsabilité des territoires occupés et des Palestiniens qui y habitent à Israël. D’autres disent qu’avec l’extension des colonies, la solution des deux États n’est plus possible, qu’il faut revenir à l’idée d’un État démocratique binational.
- La vraie question, c’est : qui a les moyens de sortir du jeu ? Pas nous en tout cas. Je connais la thèse de Sarih et de ceux qui demandent la dissolution de l’Autorité. C’est impossible.
On ne peut pas lâcher comme cela la population, laisser tomber le système de santé, les écoles, les 190.000 familles qui vivent du salaire que leur verse l’Autorité. La taille moyenne d’une famille est de 10,3 personnes, cela fait deux millions de gens qui n’auraient plus un centime pour vivre. Israël n’aurait plus qu’à les pousser vers les frontières pour une autre Nakba. Voyez ce qui se passe à Gaza où de plus en plus de gens, pris dans la nasse du blocus, songent à partir. Le seul résultat, c’est qu’on dira : « Regardez ces irresponsables, incapables de gérer un État ».
Quant à l’idée d’Azmi Bichara, un État binational, c’est très bien, c’est magnifique. Le seul problème, c’est que les Israéliens ne veulent pas. Dans binational, il y a “bi”. Cela veut dire qu’il faut être deux pour le faire. Sinon, bien sûr que c’est la solution idéale, un État binational laïque et démocratique, un État de tous ses citoyens. Mais on en est très, très loin. Les gens simples le savent. C’est l’intelligentsia qui confond le souhaitable, tout à fait légitime d’ailleurs, et le réel. Ce qu’il faut, c’est se battre sur les principes et trouver le meilleur chemin du court terme au long terme.

(à suivre)


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Messages

  • Impossible pour un état religieux (qu’elle soit juive, musulmane ou chrétienne) de VIVRE dans cette région du Monde...La création de l’état d’Israël était une erreur fatale de la part des grandes puissance(Bretagne, USA, France..)...Je pense que la solution de ce grand problème est la résolution de l’état d’Israël, l’arrêt de l’immigration, le retour des réfugiés et la création d’un état palestinien pour tout les citoyens (juifs, chrétiens, musulmans, arabe) avec capitale Jerusalem.


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