Première élection du Printemps arabe

La Tunisie dirigée par des religieux ?

26 octobre 2011, par Céline Tabou

En Tunisie, le parti islamiste d’Ennahdha a récolté la moitié des 18 sièges réservés aux Tunisiens de l’étranger, lors des premières élections libres qui ont suivi la chute de Ben Ali, réfugié en Arabie Saoudite.

Plus de 7 millions de Tunisiens ont été appelés à élire dimanche 23 octobre une assemblée constituante, qui a donné une large victoire d’Ennahda, et donner le coup d’envoi aux négociations politiques afin de dégager une majorité dans la nouvelle assemblée. Cette Assemblée Constituante devra rédiger une nouvelle constitution et désigner un nouvel exécutif jusqu’aux prochaines élections générales, prévues d’ici un an.

Victoire des Islamistes

Le parti islamiste a revendiqué le lendemain de l’élection une position dominante sur le nouvel échiquier politique tunisien, estimant son score entre 25% et 30 des voix, ce qui pourrait donner entre 60 et 65 sièges sur les 217 que constitue la future assemblée. Ennahda a trouvé un écho retentissant chez les Tunisiens de l’étranger, récoltant la moitié des 18 sièges qui leur étaient réservés. Face à cette situation, certains jeunes tunisiens ont exprimé leur mécontentement face à un vote qui vient de l’étranger, a révélé le site d’information canadien, Cyberpresse.
Vainqueur, le parti d’Ennahda ne gouvernera pas seul un pays confronté à une situation économique tendue, où la croissance habituellement autour de 5-6% est nulle ou négative depuis janvier, et où le désastre de la dernière saison touristique a détruit des emplois et gonflé un taux de chômage estimé aujourd’hui à 19%.

L’inquiétude des Occidentaux

Hamadi Redissi, politologue qui anime l’Observatoire tunisien de la transition démocratique a indiqué au "Parisien" qu’« Ennahda n’a pas rompu avec son idéologie populiste. Il a toujours deux fers au feu avec des promesses de bonne conduite en externe et un positionnement sur une ligne dure en interne. Il suffit de lire le journal du parti pour le constater ». Même son de cloche, de la part de Vincent Geisser, chercheur à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman : « C’est un parti ultraconservateur que l’on peut définir avec plusieurs caractéristiques : libéral sur le plan économique, sur le plan politique, il reconnaît la primauté du système pluraliste, il a renoncé à la théocratie, et en revanche sur le plan des valeurs et des mœurs, il reste un parti profondément conservateur ».
Face aux réactions en chaine des dirigeants occidentaux, sur la victoire des Islamistes, les chefs du mouvement ont promis de ne pas revenir sur le statut de la femme et de garantir le respect des libertés publiques. Le chef d’Ennahdha, Cheikh Rached Ghannouchi a déclaré samedi 22 octobre qu’il projette l’instauration d’un régime parlementaire qui « rompra avec le régime présidentiel, source de toutes les catastrophes, et qui extirpera les racines de la dictature en Tunisie ». Selon lui, le prochain gouvernement « s’attachera en priorité à réaliser les objectifs de la révolution, en bannissant la corruption, en procurant du travail pour les chômeurs et en portant l’intérêt requis aux régions déshéritées qui ont déclenché le soulèvement ».

Céline Tabou


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