Un des défis du développement

Des terres pour les pauvres

23 juillet 2013

L’Afrique centrale et australe recense près de la moitié de toutes les terres utilisables non cultivées du monde mais, à ce jour, le continent n’est pas parvenu à développer les 202 millions d’hectares de terres disponibles pour mieux lutter contre la pauvreté, générer de la croissance, créer des emplois et promouvoir une prospérité partagée.

Rizières à Madagascar. Une meilleure gestion des terres permettra de lutter contre la pauvreté. En Afrique centrale et australe, une superficie égale à 4 fois celle de Madagascar n’est pas exploitée au mieux de ses possibilités pour nourrir la population.

Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale intitulé « Securing Africa’s Land for Shared Prosperity », rendu public aujourd’hui, les pays africains et les communautés pourraient mettre fin aux « accaparements des terres », accroître leur production agricole et améliorer leurs perspectives de développement, s’ils parviennent à moderniser, au cours de la décennie, les procédures complexes qui régissent le droit foncier et la gestion des terres en Afrique. L’Afrique a le taux de pauvreté le plus élevé au monde avec 47,5% de la population vivant avec moins d’1,25 dollar par jour.

« Malgré ses abondantes richesses en terre et en ressources minières, l’Afrique reste pauvre » , déclare Makhtar Diop, vice-président de la Banque mondiale pour la Région Afrique.

Le rapport souligne que plus de 90% des terres rurales agricoles en Afrique ne sont pas enregistrées ce qui a pour conséquence de faciliter des phénomènes tels que l’accaparement des terres et l’expropriation sans dédommagement substantiel. Cependant, le rapport « Securing Africa’s Land for Shared Prosperity », citant des expériences pilotes menées avec succès dans des pays africains comme le Ghana, le Malawi, le Mozambique, la Tanzanie et l’Ouganda, propose un plan d’action en 10 étapes qui pourrait contribuer à révolutionner la production agricole, mettre un terme à « l’accaparement des terres » et éradiquer l’extrême pauvreté en Afrique.

Conditions propices au changement

Le nouveau rapport évalue à 4,50 milliards de dollars la somme que devront débourser sur 10 ans les pays africains et leurs partenaires au développement ainsi que le secteur privé, pour intensifier les réformes foncières et les investissements en la matière.

« Améliorer la performance et la productivité du secteur agricole en Afrique est indispensable si l’on veut une croissance généralisée, créer des emplois, attirer les investissements et une réduction significative de la pauvreté » , souligne Jamal Saghir, directeur du développement durable pour la région Afrique de la Banque mondiale. « La gouvernance foncière s’avère un moyen efficace de propulser l’Afrique sur la voie du changement et garantir un meilleur avenir pour tous les Africains » .

La flambée des prix des denrées de base et l’augmentation des investissements directs étrangers font qu’il est d’autant plus rentable d’investir dans la gouvernance foncière qui se traduit par de meilleurs rendements agricoles, un meilleur accès aux marchés et des prix plus avantageux. La plupart des pays d’Afrique ont déjà adopté des textes de lois reconnaissant les droits fonciers coutumiers et garantissant les droits des femmes à la propriété foncière, droits qu’il est cependant essentiel de renforcer.

Les défis persistent

Avec seulement 10% des terres rurales enregistrées en Afrique, l’absence de gouvernance foncière fait que le transfert de propriété prend deux fois plus de temps et coûte deux fois plus cher par rapport aux pays industrialisés. De plus, la faible gouvernance est la cause principale de corruption dans le secteur foncier.

Le rapport souligne qu’ « à moins que les droits communaux et individuels ne soient enregistrés et que la gouvernance des terres ne soit améliorée, la récente vague d’investissements directs étrangers en Afrique subsaharienne ne se traduira pas par une croissance inclusive et durable, car la spoliation des communautés locales causera des troubles et les investissements ne porteront pas leurs fruits comme on l’a vu à Madagascar en 2009 » .

« Les questions de gouvernance foncière sont au premier plan et au cœur du défi de développement de l’Afrique » , déclare Frank Byamugisha, auteur du rapport et spécialiste des questions foncières pour la région Afrique de la Banque mondiale.

En 2002, au moins 20 pays d’Afrique subsaharienne avaient reconnu les droits fonciers coutumiers et l’égalité des sexes en la matière, un nombre qui a pratiquement doublé. La Commission de l’Union africaine a élaboré un plan stratégique de cinq ans pour la mise en œuvre d’une politique foncière d’ici 2016.

Comme le souligne ce rapport, l’Afrique possède la plus grande superficie de terres cultivables au monde et garantir l’accès à la terre est fondamental pour ses millions d’habitants. Investir dans la gouvernance foncière bénéficiera tant au gouvernement qu’aux investisseurs et aux personnes privées de droits fonciers.

Propositions

- Encourager les réformes et les investissements visant à améliorer le titrage et l’enregistrement des terres communales et individuelles.

- Régulariser les droits fonciers des squatters qui occupent des terrains publics, les bidonvilles abritant 60% des citadins africains.

- Améliorer la gouvernance foncière et lutter contre la corruption endémique en matière de gestion des terres qui, dans bon nombre de pays d’Afrique, heurte les intérêts des pauvres en maintenant le statu quo.

- Mobiliser la volonté politique des gouvernements africains afin de réformer le système foncier et encourager les partenaires au développement à soutenir ses réformes financièrement et politiquement.

WASHINGTON, 22 juillet 2013/African Press Organization (APO)


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