Violences en Martinique : la police tire un jeune homme
Couvre-feu décrété dans certains quartiers de Fort-de-France dans la soirée du 18
19 septembre
La Martinique fait face depuis plusieurs jours par des violences urbaines dans un contexte de mobilisation contre la vie chère. Des policiers ont été envoyés en renfort afin de mâter la contestation.
Le préfet de la Martinique, Jean-Christophe Bouvier, a annoncé l’instauration d’un couvre-feu à partir du 18 septembre au soir et jusqu’à nouvel ordre dans certains quartiers de Fort-de-France. Il s’agit des zones les plus touchés par les violences urbaines.
Dans un communiqué, la préfecture précise que cette interdiction temporaire de déplacement court au moins jusqu’au 23 septembre, « dans certains quartiers des communes de Fort-de-France et du Lamentin, entre 21h00 et 05h00 ».
« J’annonce également avoir signé un arrêté de couvre-feu » dans certains quartiers du chef-lieu de Martinique, a déclaré Jean-Christophe Bouvier, lors d’une conférence de presse après plusieurs nuits de violences urbaines.
Ces violences ont éclaté dans un contexte de mobilisation contre la vie chère depuis début septembre. Un escadron de gendarmes, soit une centaine de militaires, a d’ailleurs été envoyé en renfort aux forces de l’ordre déjà très présentes, afin de mâter la mobilisation.
Dans la nuit du 17 et 18 septembre, un McDonald’s du quartier Dillon a été incendié et des barricades ont été enflammées. Dans ce même quartier, un hypermarché Carrefour a été « envahi par une cinquantaine d’individus qui ont monté une barricade sur le parking et ont tenté de l’incendier », ont indiqué à l’AFP les autorités.
« J’ai demandé aux forces de sécurité intérieure de saturer les axes routiers et les ronds-points de leur présence et de procéder à un maximum d’interpellations », a poursuivi le représentant de l’État. Les mesures sécuritaires seront renforcées sur tout le territoire, notamment dans le quartier populaire de Sainte-Thérèse.
« Des renforts significatifs sont arrivés et vont continuer d’arriver dans les prochains jours », a détaillé Jean-Christophe Bouvier. « Depuis le début des opérations de rétablissement de l’ordre, nous comptabilisons 15 interpellations », a annoncé le préfet de la Martinique, évoquant « 11 fonctionnaires de police blessés par balle de tir d’armes à feu ».
Ce dernier a indiqué que « trois émeutiers » ont également été blessés, dont un par balle, et qui fait l’objet d’une « enquête en cours ».
Dans la nuit du 17 et 18 septembre, « les quartiers de Sainte-Thérèse et de Dillon à Fort-de-France ont à nouveau fait l’objet de pillages et de saccages de la part d’un groupe d’une cinquantaine de délinquants », a indiqué, dans un communiqué, la préfecture de la Martinique. « 12 véhicules ont été incendiés, 17 commerces vandalisés ou cambriolés », a-t-elle encore précisé.
Depuis plusieurs jours, la ville de Fort-de-France est au cœur de vives tensions entre groupes d’individus et les forces de l’ordre. Cette tension intervient dans un contexte de mobilisation contre la vie chère sur un territoire où les prix des produits alimentaires sont 40% plus élevés qu’en France, selon des chiffres de l’Insee en 2022.
« La cause est noble, mais la méthode, ce que nous sommes en train de vivre là, discrédite le mouvement », a indiqué sur Franceinfo, Rosette Jean-Louis, présidente du conseil citoyen du quartier populaire Sainte-Thérèse, l’un des plus touchés par les violences.
Ce quartier « n’est pas concerné par le couvre-feu. Je n’ai pas souhaité pénaliser deux fois les citoyens qui y vivent, qui subissent déjà les violences, qui doivent parfois se déplacer, pour des raisons professionnelles, la nuit », a indiqué la préfecture.
Des violences avaient déjà éclaté à Sainte-Thérèse dans la nuit du 2 au 3 septembre, au cours de laquelle des policiers avaient été la cible de tirs à balles réelles.
Dans la nuit du 14 et 15 septembre, deux personnes ont ouvert le feu sur la façade du commissariat de Fort-de-France, sans faire de blessé. « Cette stratégie du chaos ne peut aboutir à aucune issue positive », a prévenu la préfecture.
Le Grand port maritime de Martinique, par lequel transitent 98% des marchandises qui entrent ou sortent de ce territoire ultramarin, est lui aussi visé par le mouvement de contestation.
« On a lancé des injonctions depuis le mois de juillet, le 1er juillet précisément, envers la grande distribution en leur demandant d’aligner leurs prix à la France hexagonale », a déclaré à l’AFPTV Rodrigue Petitot, dirigeant du Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro caribéennes (RPPRAC).
"Nous sommes Français, nous avons les mêmes cartes d’identité, les mêmes amendes, les mêmes taxes si ce n’est plus de taxes, on ne comprend pas pourquoi au sujet de l’alimentaire précisément on ne pourrait pas avoir les mêmes prix", a indiqué ce dernier.
Invités le 12 septembre à une table ronde en préfecture avec l’ensemble des acteurs de la grande distribution et les institutions, les représentants du RPPRAC avaient quitté les négociations au bout de cinq minutes suite au refus du préfet de retransmettre les échanges en direct sur les réseaux sociaux.
L’État, les distributeurs et les collectivités ont dit vouloir engager une « baisse de 20% en moyenne du prix » de 2.500 produits de première nécessité. Pour lutter contre la vie chère, la Collectivité territoriale de Martinique s’est elle prononcée en faveur d’une suppression des taux d’octroi de mer, la taxe spécifique aux départements d’Outre-mer s’appliquant aux biens importés, sur plusieurs centaines de produits.