Congrès de l’UNCCAS

Les centres communaux d’action sociale s’alarment

26 mai

Lors de son 94ème congrès de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (Unccas), qui s’est tenu à Chambéry à la fin mars 2025, était axé sur « l’urgence sociale », notamment en Outre-mer.

À la veille de l’ouverture du 94e Congrès de l’Unccas, les centres communaux ultramarins, confrontés aux catastrophes naturelles, à la vie chère, à la précarité et à l’isolement, luttent quotidiennement pour maintenir le lien social.

Une situation catastrophique à La Réunion et Mayotte

À La Réunion comme à Mayotte, les passages des cyclones Garance et Chido ont mit en évidence la vulnérabilité des territoires ultramarins. Ericka Bareigts, maire de Saint-Denis de La Réunion et vice-présidente de l’Unccas, a évoqué une "situation post-traumatique" après le passage du cyclone Garance alors même qu’il fallait répondre à de nombreuses urgences de sécurité et de salubrité publiques. L’ancienne ministre des outre-mer a également déploré le gel de tous les contrats aidés.

"Certains sont morts, d’autres ont tout perdu, et maintenant les personnes les plus fragiles et éloignées de l’emploi vont perdre leur contrat aidé ?", s’est-elle insurgée. "Chaque crise aggrave la situation et l’État nous traite comme si nous étions des mendiants. Notre territoire insulaire a participé à la richesse de la France. Nous demandons à être accompagnés justement. Qui va nettoyer les ravines ? S’occuper des enfants ? Procurer un revenu par le travail ? Payer des matériaux de qualité pour prévenir de nouvelles catastrophes ?", a complété David Belda, adjoint au maire de Saint-Denis de La Réunion, premier vice président de l’Udccas.

A Mayotte, la situation s’avère également dramatique après le passage de Chido. "Plus de 49 morts ont été recensés mais nous savons qu’il y en a davantage. Chido a anéanti tous les efforts de l’État et de nos collectivités, département et communes alors que 70 % de notre population est en situation de pauvreté et que plus de 40 % des habitants, en situation irrégulière, logent dans des bidonvilles", a témoigné Madi Madi Souf, maire de Pamandzi.

Ce dernier a remercié les personnes qui se sont mobilisées avant l’arrivée des secours : "cette solidarité nationale et internationale nous va droit au cœur". Madi Madi Souf a également déclaré : "Cessons de parler de reconstruction de Mayotte car tout est à construire".

"Nous avons engagé beaucoup de dépenses pour nourrir les personnes dans les centres d’hébergement, enlever les déchets, dégager les routes. Nous avons demandé un fonds de compensation à l’État mais nous n’avons rien obtenu", a déploré Marib Hanaffi, maire et président du CCAS d’Acoua.

Des territoires en détresse

Durant le congrès, Luc Carvounas, président de l’Unccas et maire d’Alfortville a déclaré que "je le dis depuis cinq ans maintenant : ces territoires vivent en pire ce que nous vivons en Hexagone, et ils n’ont pas le luxe de pouvoir choisir entre défense de la nation, sauvegarde des services public et fin de mois difficiles. Notre dernier baromètre du social, en partenariat avec l’IFOP (Institut français d’opinion publique, ndlr), nous a montré que près de 70% de nos concitoyens ne se sentent pas proches des préoccupations des Ultramarins. C’est dire le fossé que les gouvernements successifs sur des dizaines d’années ont laissé se creuser entre les territoires de la République".

Ce dernier a appelé à la création d’une Agence nationale d’évaluation des politiques publiques dans les Outre-mer. David Belda, a indiqué que "notre territoire insulaire a participé à la richesse de la France. Nous demandons à être accompagnés justement. Qui va nettoyer les ravines ? S’occuper des enfants ? Procurer un revenu par le travail ? Payer des matériaux de qualité pour prévenir de nouvelles catastrophes ?".

Concernant la continuité du service public, Saïd Ahamada, directeur général de l’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité (Ladom), a indiqué que l’État finance des dispositifs pour "établir un trait d’union entre nos territoires, en particulier avec ceux d’Outre-mer, dont on sous-estime le potentiel".

Toutefois, ce dernier s’est interrogé sur les outils à créer afin de faciliter la continuité territoriale dans des domaines comme l’enseignement supérieur, le logement ou l’apprentissage.

Vie chère : un sujet récurrent pour tous les outremers

Francesca Félix, présidente de l’Utccas de Guyane, a déclaré que "57% de la population vit sous le seuil de pauvreté. D’ici 2026, ce pourcentage passera à 67% si nous n’agissons pas. Et sur les 35% en situation d’extrême pauvreté, 17% sont de jeunes. Nous risquons de connaître une révolte sociale semblable à celle qu’a vécu La Martinique".

"Quatre yaourts coûtent 3,50 euros en Guadeloupe, et il s’agit du premier prix. La problématique de la vie chère est une injustice sociale car ce sont les publics précaires qui sont le plus en difficulté", a souligné Eliane Guiougou, vice-présidente Unccas, présidente Udccas de Guadeloupe.

"Même en innovant, nous n’avons pas les moyens financiers pour répondre à la demande sociale, ce qui a pour conséquences l’abandon des plus âgés et la montée des violences", a indiqué cette dernière.

"La problématique de la vie chère est une injustice sociale car ce sont les publics précaires qui sont le plus en difficulté", a ajouté Éliane Guiougou, présidente de l’Udccas de Guadeloupe. "Même en innovant, nous n’avons pas les moyens financiers pour répondre à la demande sociale, ce qui a pour conséquences l’abandon des plus âgés et la montée des violences".

"Si la vie chère est due aux coûts du transport, pourquoi les frais bancaires ou de télécommunication sont-ils beaucoup plus élevés que dans l’Hexagone ?", a interrogé Martial Foucault, professeur des universités à Sciences-Po Paris et directeur du Cevipof (Centre de recherches politiques de Sciences-Po).

Ce dernier a évoqué une "sujet économique, social et politique", se questionnant sur "la lenteur du législateur à se saisir des injustices vécues par les dizaines de milliers d’ultramarins", mais aussi l’octroi de mer.

L’octroi de mer est "une ressource fiscale importante mais cette mesure, qui visait à favoriser la production locale, n’a pas permis le développement de ces chaînes de production. Politiquement, plus une société s’appauvrit et plus elle s’éloigne du rapport au politique", a précisé le chercheur.


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