La Faim du Monde

L’Inde se débat pour nourrir 1 milliard de personnes

28 avril 2008

Vijender Vardhman connaît une ou deux choses à propos du riz. Depuis sa petite boutique familiale au Sud de Delhi, il vend 63 variétés de grains - ce qui est remarquable -, sans parler de la multitude de légumineuses, ainsi que des denrées conditionnées entassées sur ses étagères.

Au cours des 6 derniers mois, le prix de la denrée de base la plus commune en Inde, le riz basmati, a augmenté de 70%, et celui du riz ordinaire, d’environ 10%. « Le riz basmati est maintenant à 80-100 roupies le kilo [1,25-1,60 euros », dit-il.


Si M. Vardhman avait l’air tranquille tandis qu’il se tenait assis derrière son comptoir, le gouvernement indien ne l’est certainement pas. Avec 1 milliard d’habitants à l’intérieur de ses frontières, sur les 3 milliards qui dépendent du riz chaque jour, l’Inde a été l’un des premiers pays à prendre des mesures pour protéger son approvisionnement intérieur en stoppant ses exportations, sauf sur le basmati, qui est vendu à prix d’or.


L’Inde a été un exportateur majeur de riz et sa décision force les autres gouvernements de la région à rechercher des sources alternatives d’approvisionnement au fur et à mesure que la crise du riz se poursuit.


En effet, l’Institut International de Recherche sur le Riz, dont le siège se trouve aux Philippines, a déclaré que le prix du riz, déjà aux alentours de 1.000 dollars la tonne [633 euros], continuera de croître, alors que la demande dépasse l’offre. « Nous avons consommé plus que ce que nous avons produit et la recherche pour accroître la productivité du riz est nécessaire pour répondre à ce déséquilibre », a-t-il établi.


De tous les pays d’Asie où le riz est l’aliment de base, ce sont les Philippines qui se débattent le plus pour répondre à cette crise. En tant que gros importateur de riz, le gouvernement philippin, dans une tentative de sauvegarder ses stocks, a essayé désespérément de sécuriser son approvisionnement.


La semaine dernière, la Présidente Gloria Macapagal-Arroyo a été obligée de passer un accord avec le Vietnam pour acheter 1,5 million de tonnes de riz à 708 dollars la tonne [450 euros], presque 50% plus cher qu’en janvier dernier. Elle n’est pas la seule à avoir recours à des mesures désespérées dans une région où, pour la plupart des gens, un repas consiste en un bol de riz et où le grain a une signification culturelle considérable.
Le Cambodge, où les prix alimentaires ont bondi d’environ 40% au cours de l’année dernière, a aussi imposé une interdiction sur les exportations de riz, tandis que le Sri Lanka a essayé de négocier un accord avec les autorités militaires birmanes pour résoudre leur déficit.


Au Bangladesh, un groupe paramilitaire a été chargé de la surveillance des marchés au riz pour empêcher les hausses de prix. En Thaïlande, où le mot "manger" se traduit littéralement par "manger du riz", on a rapporté que les gens stockent le riz, ajoutant une tension supplémentaire sur des prix déjà élevés. Les magasins ont établi des limites sur le nombre de sacs qu’ils vendent aux particuliers, pour les en dissuader.


Mais le stockage est une raison comparativement mineure à la hausse spectaculaire de l’année dernière. Le développement rapide de l’Asie, avec une classe-moyenne plus nombreuse et plus aisée consommant plus de nourriture, a constitué un facteur important. En même temps, la terre qui était autrefois utilisée pour produire le riz a été affectée au développement de logements, d’industrie et même de terrains de golf.


Depuis 2006, une raison supplémentaire a été la croissance du marché des agrocarburants qui a encouragé plus d’agriculteurs à faire pousser du maïs plutôt que du riz. En conséquence de tout cela, les stocks mondiaux sont à leurs plus bas depuis 20 ans.


Il y a aussi eu des facteurs locaux. En novembre, un cyclone au Bangladesh a ruiné la totalité de la récolte d’automne - environ 800.000 tonnes - obligeant ce pays à importer 2,4 millions de tonnes supplémentaires pour éviter la famine.
Au Vietnam, qui a imposé une interdiction sur les exportations, le mauvais temps et l’infestation par les insectes nuisibles ont aussi fait baisser les récoltes. 



Traduction [JFG-QuestionsCritiques] 

Andrew Buncombe, “The Independent” (Inde, Delhi

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