DÉVELOPPEMENT DURABLE

Paul Bérenger : les îles devraient parler d’une seule voix

14 janvier 2005

Après le Premier ministre mauricien, c’est le secrétaire général des Nations-unies, Kofi Annan, qui est intervenu hier. Sa visite dans les zones dévastées d’Asie l’a laissé voir ’la volonté humaine’ de reconstruire, contre laquelle ’la nature ne peut rien’.

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Les petites îles sont de plus en plus vulnérables. Intervenant hier matin à l’ouverture de la conférence, lors de la réunion des petits États insulaires en développement, le Premier ministre mauricien, Paul Bérenger, a observé que la vulnérabilité des PEID s’accroît.
Pour Paul Bérenger, le tremblement de terre du 26 décembre 2004, le tsunami qui a suivi, de même que les récentes tempêtes dans les régions des Caraïbes et du Pacifique ont démontré de manière irréfutable la vulnérabilité des PEID. Il a constaté que très peu de progrès ont été réalisés dans la mise en œuvre du Programme d’action de la Barbade, adopté en 1994, en raison d’un manque de ressources. Il a souligné la nécessité pour les petits pays insulaires en développement de parler d’une seule voix sur le plan international.

"Les souffrances et les ravages sont stupéfiants"

Le secrétaire général des Nations-unies, Kofi Annan, a observé que la conférence internationale les Petits États insulaires en développement a pris davantage d’importance après le violent raz-de-marée qui s’est abattu sur la région il y a 18 jours. Il a fait ressortir que si Maurice a été épargnée par le tsunami, "en Asie et en Afrique, beaucoup d’hommes, de femmes et d’enfants ont eu nettement moins de chances"
C’est avec beaucoup d’émotion qu’il a évoqué sa récente tournée en Indonésie, au Sri Lanka et aux Maldives. "J’ai vu des dégâts terribles : de larges bandes de terre sans vie qu’occupaient avant des collectivités dynamiques, j’ai rencontré des familles déplacées et entendu des récits d’une tristesse inimaginable. Et j’ai été témoin de l’incessante activité des équipes de secours en mouvement nuit et jour pour apporter de l’aide".
"Ce que j’ai vu n’est qu’une toute petite parcelle de ce qui s’est produit. Les souffrances et les ravages sont stupéfiants par l’ampleur et la rapidité avec lesquelles ils ont été infligés. Une fois de plus, nous avons été forcés de nous incliner devant le pouvoir qu’a la nature de transformer en un instant la vie des êtres humains et la face de la terre. Mais ma visite dans la région m’a également laissé voir autre chose, contre quoi la nature ne peut rien : la volonté humaine. En l’occurrence, la détermination de reconstruire et, surtout, de reconstruire ensemble".
Kofi Annan a rassuré les survivants : "Nous sommes et resterons solidaires avec eux. L’aide a afflué de toutes parts y compris des pays qui ont eux-mêmes des moyens limités ou qui traversent des crises". Pendant la phase de secours, il s’agit d’acheminer de l’eau potable, des moyens d’assainissement, des vivres et des fournitures médicales. À long terme, il s’agira d’apporter une aide à la reconstruction et au développement.

Pour un traitement préférentiel

M. Annan a insisté sur l’importance de la prévention et de l’alerte rapide dans l’océan Indien et l’Asie du Sud-Est. "Nous devons aller plus loin. Ce qu’il nous faut mettre en place, c’est un système d’alerte mondial, non seulement pour les tsunamis mais pour tous les autres phénomènes dangereux".
"Aucune partie du monde ne doit être laissée pour compte. Nous devons penser en termes mondiaux et envisager des mesures à la hauteur des risques", a-t-il dit.
La réunion internationale sur les petits États insulaires en développement prend fin aujourd’hui avec l’adoption d’un document stratégique et une déclaration politique qui doit porter, entre autres, sur la nécessité que les petits pays en développement bénéficient d’un traitement préférentiel. La journée d’hier a été entièrement consacrée aux interventions des chefs d’État et de gouvernements et des chefs de délégation présents dans l’île. Le ministre français de la Coopération et de la Francophonie qui dirige la délégation française doit intervenir aujourd’hui.

De notre correspondant à Maurice J.-M. P.


Wilfrid Bertile et les nouveaux défis sociaux des PIED

"La lutte contre la pauvreté doit être globale"

Membre de la délégation du Conseil régional à l’île Maurice, le professeur d’université a insisté sur la nécessité de coopération régionale pour vaincre le SIDA et l’insécurité.

Au cours de la conférence des Petits États insulaires en développement (PEID), la France est représentée par une délégation réunionnaise, composée du président de la Région, Paul Vergès, et de deux vice-présidents, Pierre Vergès et Wilfrid Bertile. Ce dernier est intervenu au cours de l’atelier sur “les défis sociaux nouveaux pour le développement durable des PEID” (lire également page suivante). Voici le texte de l’intervention du professeur de géographie à l’Université de La Réunion et ancien secrétaire général de la Commission de l’océan Indien.

"Il a été maintes fois souligné que depuis le début de la mise en œuvre du Plan d’Action de la Barbade, il y a 10 ans, de nouvelles préoccupations pour le développement des PEID se sont imposées. Il s’agit, notamment, de la pauvreté, des pandémies et de l’insécurité, trois points que je voudrais ici évoquer brièvement, en mettant l’accent sur la nécessité de la coopération internationale.
"En premier lieu, la lutte contre la pauvreté, un des principaux thèmes des Objectifs de développement du millénaire. Cette pauvreté se traduit notamment par de faibles revenus, un chômage important, une éducation et une santé souvent déficientes, un habitat en partie précaire et insalubre. Elle est la résultante de dysfonctionnements sociaux et de difficultés de développement. La lutte contre la pauvreté doit donc être globale.

Les PEID ne sont pas à l’abri de la pandémie

"Elle est de la responsabilité première des États eux-mêmes. Il convient de souligner ici l’initiative de nombreux pays de mettre en œuvre des Plans nationaux de réduction de la pauvreté. Dans cette action, les États doivent compter sur la solidarité internationale. C’est ce que fait la France à travers son Aide pratique au développement et des actions de coopération menées dans les organisations d’intégration régionale à partir des départements et territoires d’Outre-mer situés dans les Caraïbes, le Pacifique ou l’océan Indien.
"En second lieu, la lutte contre le VIH-SIDA. Certes, à l’exception des Caraïbes, seconde région la plus touchée au monde après l’Afrique, l’extension du SIDA est relativement peu élevée dans la plupart des PEID. Mais ils ne sont pas à l’abri d’une expansion de la pandémie. Là encore, la lutte doit se faire avant tout au niveau de chaque pays. Mais elle est à compléter par la coopération régionale, à l’exemple du programme de lutte contre le SIDA de la Commission de l’océan Indien, mené en liaison avec l’ONUSIDA, sur financement de la Banque africaine de développement et de la France.
"Enfin, les PEID sont de plus en plus confrontés à la montée de l’insécurité tant aux plans intérieur qu’extérieur. Plus qu’en tout autre domaine, la coopération internationale est ici une absolue nécessité. Pour sa part, la France propose aux pays de la COI - pour ne prendre qu’un exemple - un projet régional de lutte contre le terrorisme et les grands trafics.
De grands pays s’unissent dans d’importantes organisations régionales, de par le monde. Pour les Petits États insulaires, cette coopération régionale s’impose plus encore."


"Le peuple des Chagos a un droit de retour"

Le secrétaire général du Commonwealth, Don McKinnon, est arrivé à Maurice hier après-midi en vue de participer à la réunion internationale sur les petits États insulaires en développement.
Il a estimé que les Chagossiens ont le droit de visiter régulièrement l’archipel. Il a aussi mis l’accent sur la nécessité d’un "dialogue ouvert et positif" entre Londres et Port-Louis au sujet du différend sur l’archipel des Chagos.
"Je crois fermement que le peuple de l’archipel des Chagos a un droit de retour, sur des bases légales, dans les îles dont il vient", a soutenu le secrétaire général du Commonwealth à une question à la salle de presse, en marge des délibérations des PEID. Dans cette perspective, il a exprimé le souhait de pouvoir rencontrer les représentants des Chagossiens à Maurice avant son départ. Ainsi, des dispositions ont été prises en vue d’organiser une rencontre avec les dirigeants du Groupe Réfugiés Chagos d’Olivier Bancoult à cet effet pour la fin de la semaine.
Don McKinnon, qui a confirmé ses sympathies pour la cause des déracinés des Chagos lors de la création du British Indian Ocean Territory (BIOT) au début des années 60, n’a pas voulu s’aventurer plus loin pour commenter la réclamation officielle des Chagossiens pour une compensation de la part du gouvernement britannique.


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