Marche pour Aafifoudine Aboudou

Ils demandent la Vérité et la Justice

21 mai 2010, par Geoffroy Géraud-Legros

Hier, plus de 500 personnes se sont rassemblées au domicile des parents du jeune Anfifoudine Aboudou, point de départ d’une marche silencieuse en direction du Lycée Léon de Lépervanche, où étudiait le jeune homme.

Empreinte de dignité, la procession s’est déroulée via le front de mer de la cité portoise. Au sein du cortège, des amis de la famille, des camarades de classe du jeune homme, ainsi que de nombreux citoyens solidaires, venus de toute l’île pour rendre hommage au jeune défunt dans la cour du lycée Léon de Lépervanche.
Dans le recueillement général, le père du jeune disparu a dressé le portrait de son fils : un jeune homme pieux, travailleur et dévoué à son prochain.

« Nous sommes venus en paix »

« L’homme que vous avez devant vous est membre d’une famille très étendue. L’homme que vous avez devant vous a tout fait pour élever ses enfants dans le bon sens, pour qu’ils réussissent et pour qu’ils puissent devenir quelqu’un. Et je dois parler aujourd’hui à ses camarades de classe et à ses amis : vous aussi, mes enfants, travaillez, faites tout pour devenir quelqu’un. Nous sommes venus ici en paix », affirme-t-il, se tournant vers le proviseur du Lycée « vous nous avez ouvert les portes de votre école parce que nous vous avons parlé, parce que vous avez eu confiance en nous. Vous savez que nous ne sommes pas venus casser, ni pour piller, ou dégrader cette école. Nous aussi, nous avons confiance ».

Appel à témoignages

Robin Rochcouste, porte-parole de l’Association Vérité et Justice pour Aafifoudine, a exhorté celles et ceux qui auraient gardé le silence à donner leurs témoignages, rappelant que ceux-ci bénéficieraient de la « garantie de l’anonymat ». Un appel qui rappelle que de multiples zones d’ombres entachent encore les circonstances du drame, auquel a succédé le proviseur du lycée pour des mots de condoléance envers la famille. Mémona Patel, adjointe au maire du Port, a exprimé à son tour un « hommage » à la manifestation, soulignant elle aussi la « solidarité » et « l’émotion partagé » de la population portoise dans la quête de vérité et de justice de la famille et des citoyens.

Les cœurs s’ouvrent

Parfois, à voix basse, entre deux pas silencieux sous le lourd soleil du front de mer, les marcheurs ont parlé. Par bribes, pour témoigner d’une réalité bien éloignée du registre des faits divers et de la lecture dégradante qu’ils imposent à l’opinion publique réunionnaise. « Il y a deux justices dans cette société », dit à l’un de nos journalistes à cet homme venu du Sud de l’île accompagner la mémoire d’Aafifoudine Aboudou . « Si on était respectés comme les autres, on ne devrait pas marcher sous ce gros soleil pour que la justice soit faite, et pour connaître la vérité », nous dira plus tard un autre marcheur.

«  Justice pour mon frère !  »

Ça et là, des mots ont jailli des coeurs. Des mots pour dire le malaise qui étreint ces Réunionnais qu’on ne voit jamais, émus par la disparition d’un être que la plupart d’entre eux n’avaient jamais rencontré. Le malaise d’une société où le racisme, l’incompréhension des institutions, le sentiment d’abandon établissent entre les hommes des frontières de plus en plus infranchissables. « Justice ! » s’est écrié la jeune sœur d’Aafifoudine d’une voix étranglée par l’émotion, élevant à bout de bras face à la foule le portrait de son frère.

Geoffroy Géraud-Legros

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