La conspiration du silence : Sous contrôle des autorités

25 juin 2008

Le deuxième point très critique dans les déclarations des gendarmes est l’évocation de la “conspiration du silence” qui a fait qu’aucune instruction sérieuse n’a pu démarrer avant 1998.

Chacun des deux gendarmes a fait, devant les jurés et devant le tribunal, le récit de la façon dont il avait intériorisé la consigne de se taire.
« Cette logique de silence, si elle avait été abandonnée plus vite, l’auriez-vous suivie ? » demande Me Najzstat à son client, Alain Michelot. « J’aurais obéi » se contente de répondre le gendarme, qui ne répondra pas non plus aux questions sur le rôle du colonel Guillaume qui, s’il est là aujourd’hui, sera invité à répondre directement.
Et Me Najzstat de faire préciser comment, en 1998, alors que Michelot sortait du bureau de la juge d’instruction, Mme Braud, sous la protection de la Brigade des Recherches, il apprenait la tenue de la conférence de presse que donnait le procureur Legras au même moment. « J’ai trouvé cela cavalier » dit le gendarme, commentant l’empressement du Parquet. « J’ai trouvé cela dramatiquement dangereux et pour le moins léger » ajoute son avocat. « M. Legras a cherché à se dédouaner rapidement de quatre ans de silence » ajoute-t-il.
Or, ces quatre années de silence, le même Legras, raconté par Gamet cette fois, paraît y avoir pris une part déterminante.
Les premiers comptes rendus des gendarmes vont au colonel Guillaume. Mais Gamet se souvient aussi que, lors d’un transfert sur les lieux du tir, en juin 1994, le procureur Legras le prend "à part" :

« Je suis persuadé que c’est un gradé de l’ELI GPN qui a tiré sur Théo Hilarion, mais pour des raisons d’ordre public, je n’en ferai pas état » dit le procureur à Charles Gamet.
Et le même Charles Gamet a donné hier, devant les jurés, un élément nouveau, affirmant qu’il tenait du colonel Guillaume lui-même « le fait qu’il (Guillaume - Ndlr) avait informé les autorités judiciaires et préfectorales ».
L’ordre de se taire venant “d’en haut”, chacun a composé avec la chape de silence. « J’ai sciemment élaboré une version pour épargner ma hiérarchie » déclare Gamet. « J’ai obéi » dit Michelot, tout en faisant état de son « malaise » dans le conflit ouvert entre sa déontologie et le devoir d’obéissance.
Charles Gamet a évoqué hier « une situation douloureuse dans laquelle [j’ai] du mal à faire la part des choses ». Il raconte comment, tout de suite après les faits, il a été « pris en étau » entre la panique du tireur, Alain Michelot (« Si vous me dénoncez, je me suicide ») et les pressions de la hiérarchie.

P. D

Théo Hilarion

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