Assemblée plénière de la Région

Débats tendus sur le budget primitif 2014

13 décembre 2013, par Céline Tabou

La discussion aura été tendue au cours de l’assemblée plénière du Conseil Régional, jeudi 12 décembre. Dernière de l’année, celle-ci aura été l’occasion pour l’opposition de mettre en avant les « invraisemblances » de la gestion de Didier Robert, notamment concernant la Nouvelle Route du Littoral.

Les dépenses sont bien au-dessus de la trajectoire d’équilibre : la Région ne pourra pas financer la nouvelle route du littoral.

La « gestion particulière » de Didier Robert aura été vivement contestée par l’Alliance, mais également interpellée par les élus PS/Progrès. En effet, selon les élus de l’Alliance, « le projet de budget primitif 2013 doit être analysé » à partir de la trajectoire d’équilibre et « l’exercice des budgets antérieurs » .

Des dérapages à venir

Pour l’Alliance, le budget présenté est en « trompe-l’œil » car il est « potentiellement insincère ». Bien que le projet répond aux « grands équilibres » fixés par la majorité régionale, car les dépenses de fonctionnement en crédits de paiements ont diminué de 0,1% par rapport à 2013 pour atteindre 360 millions d’euros, selon la trajectoire d’équilibre (TE) mise en place. De plus, les investissements dont de 495 millions, en augmentation de 14%, mais le montant est supérieur de 164 millions supérieur au montant fixé par la trajectoire d’équilibre. D’ailleurs, M. Balthazar, directeur général adjoint des finances, a indiqué lors de sa présentation que la collectivité aura « recours à un emprunt parce que l’investissement ne suis pas la trajectoire d’équilibre » .

Contrairement à ce que souhaite faire paraître Didier Robert, le projet de budget primitif « est nettement au-dessus du plafond en matière d’investissement » , car « les dépenses d’investissement intègrent 133 millions de crédits de paiement pour la nouvelle route du littoral » . Bien loin des quatre mots d’ordre — respect, maitrise, dynamisme et volontarisme —, la Région a fait exploser les dépenses de fonctionnement entre 2012 (+54 millions d’euros) et 2013 (+38 millions), de 92 millions d’euros. Pour Camille Sudre, « on a mal au cœur, chaque fois que l’on consulte les projets budgétaires » , car « les prévisions sont fantaisistes et ne servent à rien » . Pour l’élu, « montrer des chiffres, en comparant la trajectoire d’équilibre et le budget primitif, ça ne sert à rien » , parce qu’il « faut comparer un TE à un compte administratif, auquel cas c’est ridicule ».

NRL : gestion douteuse des fonds publics

Point de tension entre la majorité, l’Alliance et le groupe PS/Progrès, la Nouvelle Route du Littoral (NRL) qui est « un scandale » , car « quel équilibre des comptes, il y aura-t-il dans les dix prochaines années à venir ? La gestion ne s’arrête pas à 2015 » , a interpellé Camille Sudre. Ce dernier a mis en avant le dépassement du coût de la NRL, prévu à 1,6 milliard par la Région, car « tous les investissements ont coûté plus de 50% de leur prévision », comme le pont Saint-Étienne ou encore la Route des Tamarins. « On prévoit un financement à six mois, mais pas plus » , a dénoncé l’élu de l’Alliance, qui a de nouveau demandé une expertise économie et financière de la NRL.

Un point de vue soutenu par les élus du PS/Progrès, dont Christine Soupramanien a affirmé « je partage une partie de vos remarques sur la rigueur et l’utilisation des fonds publics ». Cette dernière a évoqué « l’évolution spectaculaire du budget » et indiqué que la collectivité était à «  un point charnière dans l’exécution du projet de NRL. Nous sommes inquiets de l’incapacité sur le long terme de la Région à réaliser la NRL et les autres projets  ». Confiante dans la réalisation de la NRL, Christine Soupramanien a toutefois redouté que « des coupes » soient réalisées dans d’autres secteurs pour pouvoir financer la NRL. L’élu du groupe PS/Progrès a demandé à Didier Robert des éclaircissements sur les coupes à venir, car « si la route démarre, il faudra assurer la totalité des dépenses engagées avec les conséquences qui vont avec » .

La responsabilité de Didier Robert engagée

Pour l’ensemble des élus de l’opposition et du PS/Progrès, le président de la Région, Didier Robert « porte une responsabilité lourde » vis-à-vis de La Réunion. En effet, Christine Soupramanien a exprimé « des inquiétudes persistantes » , d’autant plus qu’elle espère que « les entreprises réunionnaises bénéficient un maximum de cette NRL. Il faut revoir immédiatement un certain nombre de sujets et dire la vérité aux gens » , car selon le rapport Kopfler, « les emprunts sont énormes et débutent en 2016, soit après les élections, donc après vous, il y aura le déluge » , a fustigé Camille Sudre.

Ce dernier a d’ailleurs prévenu le président de la Région, « il vous reste deux ans pour en profiter et continuer à faire flamber les dépenses de fonctionnement » . D’autant plus que le dernier rapport voté par l’assemblée, porte sur la création de 97 emplois au sein de la Région, dont 66 en catégorie C, 19 en B et 12 en catégorie A. Camille Sudre a ainsi incité Didier Robert à « en profiter et continuer à alimenter sa campagne électorale, à créer des SPL déficitaires, à proposer la pose d’une première pierre devant les caméras, à louer des bureaux à 35.000 euros à Saint-Paul (pour l’IRT) auprès de CBO Territoria et 25.000 euros à Saint-Denis » , mais aussi « à continuer des embauches de complaisance et à voyager » .

« Un jour où l’autre, il y aura un audit sur votre gestion » , a indiqué Camille Sudre, car « plus de 100 millions d’euros ont été dépensés pour la NRL qui ne se fera jamais » . Ce dernier a rappelé la demande de l’Alliance pour une expertise économique et sociale de la NRL. En réponse, Fabienne Couapel-Sauret a affirmé que « la manne financière européenne permettra au Conseil Régional de mener à bien ses investissements » , si le budget primitif ne parvient pas à financer lui même les investissements engagés.

Céline Tabou

La « folie » des Sociétés Publiques Locales (SPL)

« Je ne comprends pas cette folie des SPL, on nous refait le coup de la SPLA Maraïna, avec la nomination d’un président grassement payé, d’une compensation du déficit par la Région », a dénoncé Camille Sudre. Au cours de l’assemblée plénière, la Région a acté la demande du Conseil Général de cofinancer une SPL Eau, à hauteur de 50 millions d’euros à charge de la Région. Toutefois, la question des sociétés publiques locales fige les débats dans un certain malaise.

L’Alliance a déposé une motion relative à la SPLA Maraïna, déficitaire de 1,4 million d’euros, demandant à ce que Didier Robert, président de cette structure « renonce à percevoir une rémunération qui est d’ailleurs facultative, afin de contribuer personnellement au redressement des comptes de la société  ». Une position rejetée par Didier Robert qui pense que « les élus ont le droit de toucher une rémunération » dans ce type de structure. Toutefois, le Conseil Général a acté la non-rémunération du président de la SPL Eau et mis en avant que de tels salaires ne sont pas obligatoires, car le président est un élu.

De son côté, François Sita est président de la SPL « Réunion des Musées Régionaux », rémunéré, dont la structure a vu son capital augmenter d’un million d’euros, bien qu’aucun rapport d’activité n’ait été présenté depuis sa création en 2012. Une situation à laquelle Béatrice Leperlier a demandé « plus de transparence », d’autant plus que Jean-François Sita a indiqué que « l’activité réelle de 2013 » pourrait être présentée l’an prochain . André Thien-Ah-Koon a exprimé son incompréhension, « je ne comprends pas cette génération qui pille l’argent des gens, sans jamais travailler » .
Des perspectives incertaines

Les élus de l’Alliance ont dénoncé la comparaison faite par la majorité entre la trajectoire d’équilibre (TE) et le budget primitif, car « une TE ne peut être comparé qu’à un compte administratif », et non pas à un document qui a vocation à être modifié. « Ce que vous faites est malhonnête », a interpellé Camille Sudre. Ce dernier a indiqué que la « TE est rompu depuis bien longtemps » , mais pour Didier Robert, « la TE est strictement respectée, à la virgule près » . Ce dernier omet les propos tenus par son directeur général adjoint des finances qui évoque « un emprunt possible parce que l’investissement ne suit pas à la ligne la TE » .

Pour Élie Hoarau, « les réponses apportées par la majorité sont légères face à l’importance des questions soulevées » , notamment sur la NRL. « Il existe des problèmes de fond sur les finances de la Région dans les années à venir », d’autant plus que les perspectives en matière de changement climatique pèsent sur les pays, et notamment à La Réunion.

Évoquant la conférence sur le Climat de Varsovie, l’élu a rappelé « le cri d’alarme lancé par les scientifiques disant que les précautions ne sont pas prises » . Pour Élie Hoarau, « la Région doit être le chef de file du développement économique de La Réunion, en votant le budget 2014, c’est un acte fort pour La Réunion » . D’autant plus que « l’on ne peut pas ignorer certains évènements de portée mondiale qui ont des conséquences chez nous », comme l’impact des changements climatiques et les accords de Bali, tendant vers une économie mondialisée, au sein de laquelle La Réunion aura des difficultés à faire face.
Urgence à poser une pierre

Lors des débats, Didier Robert a indiqué qu’il y a « urgence à agir, à poser la première pierre et il y a urgence à engager le chantier ». Une urgence vivement contestée dans l’opposition, « vous dites qu’il y a urgence à poser la première pierre et non à boucler le budget », a interpellé Camille Sudre.
Inquiétude pour les agriculteurs

Face à l’actualité internationale et notamment les accords de Bali sur le commerce mondial, Élie Hoarau a rappelé la situation alarmante des agriculteurs réunionnais, avec la menace que les quotas et les prix garantis pour le sucre. « Certains pays vont alléger leurs droits de douane sur les exportations des produits agricoles. Il est inévitable que cela va relancer les accords de partenariat économique sur le plan de l’agriculture, d’autant que ces accords sont en discussion » entre les fonctionnaires européens a expliqué ce dernier.

Élie Hoarau a dénoncé l’absence de représentants réunionnais dans les débats, «  c’est quelque chose de grave. Nous avons interpellé le commissaire européen au commerce, Karel De Gucht, sur le fait anormal que dans les discussions sur la zone océan indienne, La Réunion est absente  ». « L’État était présent, c’est donc à l’État d’associer La Réunion aux débats » , a indiqué l’élu de l’Alliance. « Si nous ne sommes pas présents, nous laisserons nos agriculteurs sans protection », a-t-il expliqué.

L’élu a indiqué que l’Union Européenne allait supprimer les quotas et les prix garantis pour le sucre, si bien que Victorin Lurel, ministre des Outre-mer, « veut la reconversion » . Mais « on ne peut pas assister avec passivité à la situation, et voir disparaitre notre agriculture » . Pour ce dernier, la Région « doit prendre une initiative » en réunissant tous les acteurs afin de « débattre » et « anticiper sur ce qui peut se produire en 2017 ». « C’est de la responsabilité de la Région d’anticiper », a conclu Élie Hoarau.
A la Une de l’actuDidier Robert

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